Des
Artistes en voies de disparition.
Pourquoi
sont il pourchassées ?
Leurs
vies.
Découvrez ses gens de la rue qui vivants pour leurs Liberté.
Ce livre est écris par le
Saltimbanque Gilbert l´automate de Beaubourg.
Les recherche sont de différentes recources. ( Livres, musées,
interviews, photos privé, presses, etc…
L´Automate Gilbert
Gilbert Liberman / Jakubczyk
Saltimbanque depuis 1969 et
resteras Saltimbanque.
Né le, 31 jullet 1952 á
Bruxelles.
Email : streetact@aol.com
Web : www.saltimbanque.de
Tel : 0049 / 0171 811
70 25
Germany
2400
avant J.C.
A Cnossos en Grèce,
L´on a retrouvé une fresque
dans une grotte,
Qui représente un acrobate
sautant par dessus
Un taureau.
« Ah !
les braves comédiens des places
publiques, gais chevaliers errants de la misère,
grimaciers de génie que vous luttez
vaillamment contre le sort !
faut-il s’étonner qu’on découvre parmi vous
des types si marqués,
des figures si
expressives et si originales ?
Ce n’est pas sur les bancs
des conservatoires et des académies
que se forment ses
vigoureuses nature d’artistes.
Elles sortent des
entrailles de la populace. »
VICTOR FOURNEL
Les « Saltimbanques » ont-ils une
origine ?
De
l’Italien salto in Banco, sauter sur un banc, 1560.
Ne sont-ils pas plutôt des hommes qui ont puisé dans leurs propres
ressources
Ce qu’ils pouvaient exploiter pour gagner leur renommée et leur pain
quotidien.
Depuis l’Antiquité, des hommes divertissent la population. Ils
s’entourent de très peu d’accessoires mais leur don d’attirer le regard fait
parti de leurs atouts principaux.
Ils jouent sur l’apesanteur, les éléments naturels ou
leur propre corps. Ils s’entraînent à des numéros que le profane n’ose tenter.
En Occident, lors des grandes fêtes orgiaques données en l’honneur de
Dyonosos pour les romains et de Bacchus pour les grecs, ils président aux
grandes parades et invitent la population au rire et à la détente. Des hommes
transforment leur physionomie, d’autres se contorsionnent et se plantent des
clous dans la tête, certains avalent le feu. Qui sont-ils ?
Les spécialistes du cirque ont retrouvé les traces de
ces enfants de la balle à travers de nombreuses fresques, peintures rupestres
ou sur des ornements d’objets de la vie quotidienne, vase ou amphore…. Mais de
ces études aucune trace généalogique de ces personnages ne nous est révélée. A
Cnossos, 2400 ans av. J.C. une peinture rupestre représente des jeunes athlètes
se livrant à des exercices d’acrobatie sur un taureau.
Ces numéros courts, visuels ne tiennent pas un public des heures comme
le fait la tragédie grecque ou les jeux du cirque, ils servent souvent
d’intermède entre deux actes.(les danseurs de corde existeraient depuis 1345
av. J.C.)
Comme actuellement sur nos places publiques, nous retrouvons également
des vagabonds réjouissants la population des milles facéties de leurs tours sur
l’Agora (place publique où le monde commerçant, financier, religieux se
côtoie). A Rome, Ventilator fut le premier jongleur à jouer avec des coupes et
des amphores d’airain, et escamoter par ses doigts agiles des billes d’ivoire
plus grosses que des noix.
On suppose que les acrobates ont été engagés pour la
construction des pyramides égyptiennes.
En Orient, particulièrement en Inde, ces métiers sont pratiqués par des
gens d’une même caste. La transmission se fait de père en fils. Les acrobates,
portent une longue écharpe rouge flottante signe de leur profession. Un bas
relief provenant de Baârhout datant du 2ème
siècle av. J.C. représente 14 acrobates montés en pyramide.
Depuis 391, après une peste dévastatrice les consuls de Rome firent
venir d’Etrurie (ancienne Toscane) une troupe pratiquant ces divers métiers
pour procurer un spectacle nouveau et plus gai que les jeux du cirque, on les
prénomma histrions. Dans le dialecte usité en Etrurie un bouffon se nommait
hister. Histrion devint le terme général de tous ces amuseurs publics.
Ces hommes sont à l’époque les messagers des Dieux et des hommes. Des
Dieux, parce qu’ils se surpassent eux-mêmes dans la pratique de leur numéro,
des hommes parce qu’ils sont nomades et colportent de contrées en contrées les
nouvelles des guerres, des invasions, des naissances, des décès…. Ce sont les
«gazettes » de nos temps modernes.
Plus tard les épidémies et les invasions barbares
laissèrent de côté le désir de rire et de s’émerveiller. Mais comme disait
l’Egyptien Palladas « la vie n’est que théâtre et jeu », plus tard un moine le
transforma en « tout le monde joue la comédie, le monde est un histrion ».
Au Moyen - Age, d’abord sur le littoral méditerranéen, se développa un
nouvel art de vivre et de se courtiser. Des hommes inventèrent la poésie et
l’amour courtois, ils se nommèrent «troubadours» en langue d’oc et «trouvères»
en langue d’ oil. Grands voyageurs, souvent de haute lignée, ils fréquentent
les cours d’Europe. Certains composent seulement et font appel à des jongleurs
pour jouer et chanter leurs vers. Ces derniers servent en même temps de
messager à la «dame» pour qui ces vers sont destinés. Nouveaux métiers
pour nos jongleurs que sont nos histrions de l’antiquité. La langue populaire
plus prompte aux changements, leur a trouvé un nom plus en rapport avec leur
personnage : joglar «jouer, faire rire ». Ce nom englobe les
musiciens, les chanteurs de poésies, les montreurs d’animaux, les lanceurs de
couteaux….et ne définit pas seulement celui qui a l’art de lancer et de
maintenir en l’air plusieurs objets en mouvement. Cette grande famille
travaille en « palc » (numéros de saltimbanques sur un tapis à même le sol),
sur les places publiques, dans les châteaux ou sur les grandes foires de
l’époque.
C’est au moyen - âge que le berceau de l’art poétique, littéraire,
théâtral, prendra sa véritable source et s’imposera plus tard comme un art
académique. A cette époque celui qui n’est pas paysan ou seigneur ne dépend de
personne et il lui faut trouver moyen de subsistance et place dans la société.
Il le peut car la noblesse aristocratique divise son temps entre loisirs,
guerres, croisades. Un nouvel ordre naît dans la chrétienté occidentale :
« la chevalerie ». Avec elle l’organisation de tournois et de
cérémonies. Lors de ces festivités, place est faite aux amuseurs publics, entre
les joutes organisés en l’honneur des dames et les festins. Les seigneurs et
même le roi de France se déplacent régulièrement dans leurs nombreuses
résidences. L’art de recevoir fait leur renommée. Les clercs dans leurs abbayes
aiment aussi accueillir les jongleurs et se distraire de leur numéro.
Lors des croisades, les chevaliers engagent des jongleurs pour les
divertir lors de leurs longs trajets. Mais il y a eu aussi des saltimbanques
d’origine Turc, Egyptienne, Arménienne qui vinrent s’exhiber sur les foires
occidentales. Personnage sans origine, venant d’ici ou de là-bas, il reste bien présent dans l’imagerie
populaire. Au cours d’un voyage en orient, on ramena le premier jeu de tarot
(entre 1095-1270). Dans ce jeu la première figure représente un bateleur.
L’occident chrétien a une expansion rapide et
spectaculaire. Les villes sont de vaste chantier, l’église, les rois et les
grands seigneurs marquent leur passage en construisant des monuments grandioses
et les foires sont la représentation en miniature de cette société. Les nobles
font leurs emplettes, les paysans vendent leurs produits et se distraient des
journées répétitives et sans nouveauté. Les jongleurs sont rois. En France les plus grandes foires
se déroulaient en champagne où le duc était lui-même trouvère. Ainsi les
saltimbanques établirent leur carnet de voyage en fonction des dates des
différentes foires.
Une autre manifestation fit tomber quelques écus dans leur escarcelle.
La société, de culture orale et l’église, pour éduquer le peuple à la bible,
monta des pièces et les nomma les mystères et passions. D’abord jouée à
l’intérieur des églises par des clercs comédiens, la scène se déplaça sur le
parvis. Pour éviter que la population ne s’éclipse à l’arrivée d’un jongleur ou
d’un montreur d’animaux, ils inclurent ces derniers dans leurs spectacles.
L’essor des villes, la transmission orale, les déplacements des grands
du royaume et l’arrivée de marchands d’orient, contribuèrent à l’essor de ces
métiers artistiques, mais selon les rois et l’austérité de l’église, des
amendements s’érigèrent contre eux. Un roi faible ou trop directif ne pouvait
tolérer ces gens inclassables, sans attache, qui colportaient les nouvelles,
amassaient la population autour d’eux, et trouvaient parfois asile chez les
gueux et les mendiants.
Conrad, chantre de l’église de Zurich, vers l’an 1275 : « Comme
des vautours sur des cadavres, comme des mouches sur une liqueur sucrée, on
voit convoler à la cour des princes, pauvres, aveugles, bancroches, jongleurs,
danseurs, musiciens et prostituées. Ils sont comme bien d’autres, pareil à des
sangsues, qui ne lâcheront pas la peau avant d’être gorgées de sang. »
St Louis par contre, sous la promesse de se conduire loyalement, donna quelques privilèges aux trouvères,
entre autres, celui de payer le droit de péage aux portes de Paris en chantant
au gardien une de leurs petites chansonnettes. Il étendit cette faveur à leurs
amis et camarades jongleurs, montreurs de singe et autres bateleurs qui
s’acquittaient en égayant le portier par un tour de leur gibecière : d’où
le proverbe payer en «monnaie de singe».
Cet accord parut dans le livre des métiers que St
Louis fit mander à Etienne Boileau . Ce livre permit d’établir les droits et
les devoirs des différents métiers et ainsi naquit les corporations.
Il y eu donc la corporation des ménétriers.
« une ménestrandie bien composée, dit M. Victor Fournel, avait ses poètes, ses musiciens et
chanteurs, ses farceurs et saltimbanques. Les plaisirs des spectateurs étaient
ainsi des plus variés et après avoir entendu une chanson de geste et un concert
de harpe, il se reposait en contemplant les grimaces du jongleur et les
gentillesses du chien savant. »
Une rue dans Paris se nomma la rue des ménétriers
(actuelle rue Rambuteau). Mais cette organisation est véritablement aux
services des élites qui les emploient et comme toutes les corporations de
métier de l’époque, il faut composer un chef d’œuvre pour rentrer dans la
ménestrandie de la ville. Ainsi les étrangers et les artistes de passage se
voient exclus et interdits de travailler dans ces villes. Les individus empreint de liberté et qui travaillent selon
les aléas de leur déambulation, n’y trouvent pas leur place. C’est le début de
la hiérarchisation dans l’art. Et celui qu’on appelait peuple du voyage, ne se soumettait pas aux
lois des sédentaires. Bien souvent par la suite, on les associa aux gitans qui
apparurent en Occident vers l’an 1400.
Caractère insaisissable, bagarreur, joyeux lurons, ils
n’étaient pas les derniers à dépenser leur recette dans les tavernes et
terminer la nuit dans des lieux de débauches. Sans famille pour la plupart, ils
retrouvaient parmi la pègre une famille, comme eux hors la loi.
Il y eut des ordonnances très sévères contre eux comme
celle de 1543 qui défendait à tous bateleurs, jongleurs et autres semblables de
jouer en cette ville de Paris ou sonner le tambourin, quelque jour que ce soit,
sous peine de fouet et bannissement de ce royaume.
A la sortie du
Moyen- âge, la société change mais les saltimbanques immuables sont toujours
là.
Sous Henri IV, avec l’achèvement du Pont Neuf, on retrouve
des figures populaires dont les noms sont encore dans les mémoires. «Brioché»
et son fameux théâtre de marionnettes, dont le singe se fit embrocher par
Cyrano de Bergerac lors d’une bagarre. Le fameux Tabarin et son chapeau à
transformations et bien d’autres encore, qui firent la joie des badauds de
l’époque. Le parlement les chassa du Pont Neuf, et ils retournèrent dans les
foires.
Il y aura désormais deux mondes d’artistes ambulants, celui des artistes
spécialisés dans l’art des représentations théâtrales et celui des enfants de
la balle (sauteurs, danseurs, montreurs d’animaux.), désigné maintenant sous le
nom de bateleur. Petit à petit les comédiens trouvent des lieux fermés pour
exercer leur art comme l’hôtel de Bourgogne et le fossé se creuse entre les
artistes de culture écrite et ceux de
culture orale. Ces comédiens vont rejeter les bateleurs jusqu’à les
empêcher de faire des scénettes parlées dans les spectacles de foire. Avec
l’avènement de Molière qui pourtant s’enrichira de leur franc parler, la
création de la comédie française scinda ces deux mondes définitivement.
L’arrivée des troupes italiennes et la Comédia dell’arte redénamisa le
métier et les bateleurs devinrent saltimbanques. Nos saltimbanques se placèrent
à l’entrée des théâtres et, de plus en plus nombreux, firent la parade.
En 1768, un événement viendra encore bouleverser le monde des artistes
ambulants, Philip Astley en Angleterre réinvente les cirques de la décadence
romaine.
Au début le spectacle présente essentiellement des
jeux équestres issus des tournois militaires mais très vite s’y ajoute
sauteurs, acrobates, danseurs de corde. Les Saltimbanques cherchant une certaine
sécurité, leur permettant de rester dans le monde du voyage, s’établissent dans
les cirques, créent des familles et les premières générations de banquistes
voient le jour. Plus tard ils se distingueront totalement des saltimbanques en
revendiquant leur généalogie et leur plus grande connaissance du métier.
Mais l’histoire écrite viendra remédier à ce manque :
on en fera des héros populaires (les célébrités de la rue), des héros de roman
(Sans famille de «Hector Malot», l’homme qui rit, Notre Dame de Paris de
«Victor Hugo»), toujours seuls, sans famille mais pas voleurs, ils trouvent
dans ces métiers d’aventure, leur moyen de subsistance.
Au 19ème siècle des lois viennent réglementer le pavé parisien. Paris
est sous le contrôle d’une préfecture de police notamment en ce qui concerne la
réglementation du vagabondage, de la mendicité et de la surveillance des lieux
publics. On attribue donc à toutes les personnes qui ont des métiers ambulants une médaille de laiton
gravée du nom et de la profession du porteur.
Archive
prefecture depolice de Paris.
Cette médaille leur donne droit d’exercer dans la rue.
Mais au cours du siècle, la délivrance de ces permis est de plus en plus
difficile à obtenir. En 1926, on délivre
des autorisations uniquement à l’occasion de fêtes foraines et publiques.
Aujourd’hui, les saltimbanques existent toujours, les autorités
parisiennes les pourchassent pour attroupement sur la voie publique, ils
passent en jugement. En province, les mairies accordent encore des droits
d’exercer dans la rue à certaines heures et sous une durée déterminée.
Certaines villes interdisent tous voyageurs ambulants de rester.
Et pourtant ce métier continue d’exister, culture
orale, culture de la rue, il maintient la tradition de la société non savante.
Déplacé du moyen- âge au 20 ème siècle, ils sont immuables et
interchangeables. Leur base est la rue et leur origine vient du peuple. Le
héros populaire sans patronyme marque le spectateur. Il oublie ses soucis
pendant un bref instant, il n’a pas calculé ni prévu cet arrêt improvisé. A
l’inverse d’un spectacle en salle où le spectateur achète son billet, choisit
ce qu’il veut voir.
Les saltimbanques nourrissent encore la mémoire populaire orale. On ne
peut parler du saltimbanque sans faire référence à l’ambiance générale de la
société où il aura grandi. La misère, l’instabilité sociale, familiale, la
révolte politique, tous ces événements créent le saltimbanque.
Histrion : antiquité romaine. Acteur, comédien et particulièrement
pantomime par dénigrement baladin, bateleur, mauvais comédien. Comédien en
générale.
.
A l’origine, le bateleur exécutait des tours à l’aide d’un bâton ou
d’une baguette.
Le Batoniste : Collection Gilbert
La tradition des bateleurs est très ancienne. Au début de notre
civilisation, les hommes pratiquaient perpétuellement des hommages aux dieux et
déesses qui leur permettaient d’exister. Ceux qui jonglaient, jouaient avec le
feu, les instruments tranchants, les grimages, les instruments devaient
s’associer aux rituels, et être considérer comme des messagers des dieux ,
connaissant certains secrets de la nature.
En Chaldée, en Egypte, en Chine, au Japon, on retrouve ces colporteurs
du merveilleux, inspirant comme en se jouant aux peuples grossiers qu’ils
traversent le frisson de l’au-delà et le respect craintif de l’inconnu. Au
Japon, ils exhibent une chapelle portative, vendent des rosaires, des
talismans, des recettes médicales ; en Chine, ils courent le pays en montrant
des tigres, disent la bonne aventure et vendent des philtres, des secrets, et
jusqu’à du vent.
La Grèce et Rome les ont vus : les joueurs de gobelets, les
jongleurs, les devins, les astrologues, les hercules, les danseurs de corde,
les promeneurs de chèvres savantes, d’éléphants et de chameaux, les acrobates,
les marchands d’anneaux contre la morsure des bêtes venimeuses portaient le nom
significatif de circulatoires ou de circumforanei, et ces forains étaient pour
la plupart des Arabes, des Chaldéens, des Egyptiens, des Juifs. On ne
distinguait guère d’eux les agyrtes, prêtres mendiants qui s’étaient infiltrés
dans le monde hellénique, puis avaient pénétré dans le monde romain avec les
dieux de l’orient, accueillis partout par la crédulité publique et une sorte de
terreur religieuse, méprisés pourtant à cause de leurs pratiques et de leurs
mœurs dissolues. Ils conduisaient avec eux des bêtes féroces apprivoisées,
dansaient au son des flûtes, des tambours et des cymbales, distribuaient des
présages sous forme de sentences écrites sur des tablettes, tirées d’une urne
par un jeune garçon ou des secrets pour guérir, et ne négligeaient jamais de
faire la collecte.
A Rome, des Syriennes et des Gaditanes, par leurs danses mystiques et
leurs costumes étranges, attiraient les passants aux abords du cirque, où
toutes sortes de spectacles et d’amusements sollicitaient d’ailleurs les
oisifs.
Le Mexique précolombien : citons deux exemples de ces
saltimbanques prestidigitateur : « Le premier se réfère au
Motetequi, c’est à dire celui qui se mutile lui-même, et qui crée l’illusion de
se couper les mains et les pieds. Le deuxième nous parle d’un homme qui
incendiait les maisons.
Ce que l’on appelle mutilation n’avait lieu que dans la cour des
seigneurs. Alors le Motetequi se coupe les mains et les met à part, puis les
pieds, ailleurs il dépose les articulations ; de tout côtés il va poser
(ce qu’il coupe). Puis quand il s’est mutilé, il se cache derrière une
couverture rouge, et alors à nouveau, ses membres un à un croissent,
repoussent, se dressent comme s’il ne s’était rien coupé. Ensuite il
réapparaît.
Celui qui met le feu aux maisons :
On pouvait voir l’embrasement d’une maison : les maisons
s’enflammaient, elles étaient entourées de flammes de telle sorte qu’il semblait
qu’elles brûlaient réellement. C’est cela que l’on voyait et qui amusait les
gens ; il faisait ce tour dans le palais et il était gratifié pour cela.
On lui donnait du maïs égrené.
Il y avait également des conteurs qui allaient répéter sur les places
publiques, les vieux poèmes retraçant les légendes.
On en voyait déjà chez les
grecs.
La grande place
publique situé entre le capitole et le mont palatin connut , comme plus
anciennement Athènes, Babylone et memphis. Les réjouissants spectacles offerts
par les êtres errants , autour desquels la multitude se presse. On goutait tout
à la fois leur adresse à faire des tours et leurs gâité communicative .
C’est en de telles
manifestations ayant précédé l’ère chrétienne qu’il faut voir les tout premiers
ancêtres d’une catégorie de nos forains actuels .
L’art des funambules
ou danseurs de corde , se développa chez les grecs bien avant de pénétrer sur
la terre latine . Mais du jour où ils se firent connaitre leur attrait eu une
vogue extraordinaire .
On raconte que vers
165 av J.C. les romains admiraient si passionnément l’agilité de ces
équilibristes qu’ils en arrivaient à délaisser pour eux le theâtre .
Les romains se
montaient très friands d’autres divertissements qui fuent continués ou
longtemps après repris par les amuseurs en plein air .
Le funambule .
Parmi ceux - ci
Ventilator fut à Rome le premier des jongleurs jouant avec des coupes et des
amphores d’airain, des billes d’ivoire, plus grosses que des noix étaient de
même par ses doigts agiles fort bien escamotées.
Dans le trochus
cerceau parfois très petit des contorsionistes parvenaient à faire
merveilleusement passer tout leur corps tordu. L’un d’eux nommé Senex s’étant
composé pour cet exercice une gaine en peaux de serpents africains obtint sous
cet aspect un phénomène succès.
Des animaux étaient
dréssés à des travaux exceptionnels bien propres à susciter l’enthousiasme
populaire, tel cet éléphant de numidie dont la trompe retirait toutes les
pastèques emplissant deux énormes corbeilles pour les jeter par derrière une à
une dans la caisse fixée sur son dos.
Un vase grec reproduisait un jongleur entouré d’un
singe et d’un chien ascensionniste.
L’éléphant dressé,
lui aussi tire ses lettres de noblesse de l’antiquité. Ch. Magnin assure que
l’on vit, sous Tibère, des éléphants funambules et que, sous Néron, un éléphant
descendit du faîte de l’amphithéâtre sur une corde tendue. Pline raconte que 4
éléphants funambules portaient dans une litière un de leurs compagnons qui
contrefaisait la nouvelle accouchée.
Les dresseurs
d’animaux faisaient partie de l’immense tribu des saltimbanques dans laquelle
figuraient aussi d’autres amuseurs de la foule : sauteurs – et c’est de là
que vient l’origine du nom- marionnettistes, arracheurs de dents, danseurs de
corde, jongleurs, escamoteurs.
Des jeunes danseuses
venues de Grèce imitatrices de celles dont avaient parlé Xenophon furent très
admirées sur le forum au temps des césars.
Evoluant sur la
partie supérieure d’une roue de potier tournant à toute vitesse elles
trouvaient le moyen pendant ce temps d’écrire sur des tablettes et de les
lancer à la foule sans perdre l’équilibre.
Et puis il y avait la célèbre
lutte à lois fixes que l’on retrouvera plus tard dans toutes les contrées où le
séjour des cohortes romaines laissa derrière elle un sillage si profond qu’il
ne put être effacé par le temps...
...
Les Romains, bien que préférant
les jeux du cirque, avaient aussi leurs bateleurs.
. A Constantinople, à la fin du 4ème siècle, L’Agora est
toujours pleine de charlatans, de sorcières, de devins, d’empiriques qui
proposent des remèdes contre la stérilité, de magiciens qui se livrent aux
incantations, de bateleurs, de montreurs de bêtes traînant parmi la foule des
lions apprivoisés, de mimes, de
danseuses en robes bleues, d’acrobates, de funambules, volant comme des
oiseaux, s’habillant et se déshabillant dans l’espace, de jongleurs jouant avec
des épées et des coupes, d’équilibristes portant sur leur front une perche au
haut de laquelle sourient deux petits enfants, de déséquilibrés faisant la roue
en roulant les yeux d’une manière effrayante, rongeant le cuir des vieilles
chaussures, s’enfonçant des clous dans la tête.
Les grecs, qui avaient les comédiens en grand honneur, le
connaissaient ; et nous voyons dans le 6ème siècle avant
J.C. , Dolon et Susarion d’Icarie l’exercer avec succès à Athènes. Les
romains firent peu de cas des bateleurs, qui ne pouvaient pas être enrôlé dans
les armées. Plaute, auteur, acteur et chef de troupe, comme plus tard
Shakspeare et Molière, se trouva en concurrence plus d’une fois avec les
gladiateurs, des entrepreneurs de combat d’animaux et des bateleurs. Les
gaulois n’avaient pas de théâtre ; seulement ils se livraient à des
exercices publics et à des jeux souvent meurtriers, où l’adresse entrait toujours
en première ligne. Un de ces jeux , qu’ils appelaient le jeu du pendu,
consistait à suspendre celui que le hasard désignait à un arbre, à l’aide d’une
corde qu’on lui passait autour du cou. On lui mettait à la main une épée dont
le tranchant était bien affilée ; il devait couper la corde au risque de
se faire étranglé s’y il n’y arrivait pas. Ce spectacle provoquait la gaieté et
les plaisanteries de nos rudes ancêtres. Devenue romaine la gaule emprunta à
ses vainqueurs leurs divertissements et leurs spectacles ;
ce furent d’abord des jeux grossiers et en rapport avec l’état des
mœurs, dit un écrivain anonyme ; des courses de cirque, des
représentations scéniques d’une gaieté licencieuse, et dans lesquelles les
histrions se laissaient aller à des paroles et à des gestes obscènes. Mais à
mesure que la civilisation romaine pénétra dans les gaules, les mœurs
s’adoucirent, le goût s’épura, et le théâtre dut se régler sur celui de Rome.
C’est ce que prouve l’existence incontestable sur tous les points de la gaule,
d’un grand nombre de monuments destinés aux représentations dramatiques. Les
invasions des barbares, la ruine des villes gauloises, la destruction des
monuments qu’elles renfermaient, amenèrent la cessation momentanée des
spectacles ; mais après l’entière soumission du pays, quelques rois
mérovingiens firent encore célébrer des jeux du cirque. Contentons nous de
citer les jeux donnés par Childebert 1er, à Arles et par Chilpéric 1er,
à Paris et à Soissons en 587 ; ce dernier avait même dans son admiration
pour la civilisation romaine, fait construire des cirques dans ces deux villes.
Cependant les jeux romains finirent par disparaître entièrement. Alors les
histrions et les bateleurs prirent leurs places. »
En 391 de la fondation de Rome, une horrible peste vint désoler cette
ville.
Pour effacer autant que possible l’impression lugubre que cette
calamité laissait dans les esprits, les consuls en exercice résolurent de
procurer au peuple un spectacle plus nouveau, et surtout plus gai que les jeux
accoutumés du cirque, alors l’unique amusement de la grande cité, et, dans ce
but , ils firent venir d’Etrurie une troupe de baladins, de mimes et de
danseurs forts habiles et forts renommés. Arrivés à Rome pour y donner des
représentations, ces artistes s’y établirent bientôt d’une façon
permanente ; et comme dit-on, dans le dialecte usité en Etrurie, un
bouffon se nommait hister, les romains en firent histrio, et le mot passa dans
la langue.
Une fois établie à Rome, les histrions firent des élèves. Bientôt , et
peu à peu ces grotesques devinrent des acteurs parlants, qui tout d’abord ne
firent que débiter de mauvais vers improvisés et intercalés par eux au milieu
de leurs danses. Progressivement ils en arrivèrent à jouer de petites pièces
nommées satires. Ces pièces étaient accompagnées de musique composée pour elles
et qu'on exécutait sur des flûtes. Le théâtre romain ne vécut pas d’autre chose
jusqu’en l’an 514, époque à laquelle le poète Livius Andronicus fit , le
premier représenté des pièces régulières. Les histrions furent abandonnés, leur
règne était passé.
L’idée exprimée par Palladas, egyptien et païen, partagée par beaucoup
d’hommes de son temps, est que la vie n’est que théâtre et jeu.
La Gaule, devenue romaine,
emprunta à ses vainqueurs tous les genres de divertissement.
A partir du bas Moyen Age , les banquistes (comédiens, bateleurs), les
banquiers (changeurs de monnaie) et les marchands forains se côtoient sur les
champs de foire. Ils y entretiennent la fête marchande. Le banc c’est à dire
les tréteaux, constituent leur instrument de base commun.
Les premières foires
de France prirent naissance au début de notre histoire. Le droit d’organiser
des grands marchés publics était alors une sorte de privilège accordé par les
princes aux habitants d’une commune, en
récompense de leurs bons services .On y faisait la vente ou l’échange de
marchandises très variées. Et ce qui surtout composait l’attrait de ces énormes
rendez-vous commerciaux et périodiques c’est que des marchands de contrées
lointaines venaient y prendre part.
Ainsi dès le 6ème
siècle vit-on arriver dans le midi de la gaule des arabes et des syriens pour
la plupart juifs. Et ces gens se répandirent dans tout le pays qui s’étend
entre le Rhône, la Loire et la seine. Le commerce étant bon le nombre des
vendeurs exotiques s’accrut de siècles en siècles ; mais à la longue tout
plaisir s’émousse et peu à peu l’affluence des acheteurs devint moindre. Pour
raviver l’élan il fallait donc trouver du nouveau. Une possibilité d’en avoir
s’ offrait , en faisant appels aux ménestrels . D’autant que pour ces artistes
la vie n’était pas toujours rose .Les castels et les manoirs et le pont Levis
ne se baissait pas toujours pour eux .
Ces troubadours et
ces trouvères continuaient à leur manière pittoresque la tradition des aèdes
primitifs , le luth ayant été remplacé par la viole et le rebec. Lorsqu’il
arrivait à l’un d’eux de prendre pour compagnon de route quelque jongleur
expert à des jeux d’adresse, les deux éléments de ce couple se complétaient le
plus agréablement du monde .
Participer à ces foires étaient pour eux la consécration populaire . On
s’organisa certains jongleurs et baladins construisirent des estrades de planches sur lesquelles ils
prirent place , tandis qu’en bas un comparse récoltait l’obole du plaisir
offert. ( on sut bien vite que pour ce petit règlement honnête, il ne fallait
pas attendre que le spectacle fut trop avancé afin d’éviter la fuite de trop
nombreux malins ). D’autres s’enfermèrent dans des toiles de tentes ,
augmentant par son mystère la valeur des exercices la baraque était crée .
C’est à cette époque que se développa de façon tonitruante la fête du Lendit
dont la création était du au bon roi Dagobert (7ème siècle).
D’essence religieuse cette fête à son origine avait eu pour raison « la
vénération des saintes reliques et d’un
morceau de la vraie croix , grand pèlerinage attirant la population de Paris
dans la plaine entre St Denis et la Chapelle . Le commerce s’en est mêlé et le
pélerinage du lendit devint une foire d’une semaine. Là parmi des boutiques
bien achalandés où tous les corps de métiers présentaient leurs produits une
bande d’acrobates sur un tapis faisait la roue et s’érigeait en chancelante
pyramide. Plus loin une cloche sonnait en haut d’un mât pour attirer le badaudage
ébahi autour d’un petit bossu qui prétendait manger des miettes de verres,
avaler du feu et dans l’oesophage s’enfoncer jusqu’à la garde un poignard.
Richard cœur de lion, roi d’Angleterre honora les jongleurs de son
amitié.(12ème siècle, 1180)
Dès les 4ème et 5ème siècles, les spectacles des
histrions et des bateleurs furent en grande faveur, jusqu’au jour où l’église
éleva la voix contre eux (ils la critiquaient souvent). Ils furent dès lors
tellement décriés qu’ils deviennent fort rares.
Vers le 6ème siècle à l’hippodrome de Byzance , les
courses duraient la journée entière : il y en avait quatre le matin et
autant l’après midi ; entre les courses, c’étaient des intermèdes :
danseurs qu’accompagnaient des joueurs de flûte et de psaltérion ; jongleurs
ou montreurs de bête qu’on faisait parfois venir de fort loin. Aux grands jeux
que donna l’empereur Nicéphore Phocas, en 963, on vit des bouffons et des
acrobates arabes, des baladins venus de l’Inde et jusqu’à des danseurs
scandinaves vêtus de peaux de bêtes.
Le rituel.
Au 4ème siècle considère comme indignes de la communion des
fidèles qui font profession de divertir le peuple par des spectacles ;
elle en interdit l’assistance aux fidèles. Le concile d’Arles (314) est
catégorique à cet égard. Le canon 5 apparaît sur ce point dépourvu de toute
équivoque. Le théâtre est assimilé aux jeux gladiateurs ; les acteurs tels
les agitatores – cohers et écuyers de course – sont exclus de l
communion. Le théâtre grec ne sera jamais visé, son caractère sacré ne saura
jamais être contesté.
Depuis longtemps les mimes et les faiseurs de tours étaient en faveur.
On les signale au 4ème siècle alors que le théâtre païen, loin
d’avoir pu encore être aboli par le christianisme, jouit un moment d’une
certaine recrudescence ; on les
signale encore dans le siècle suivant, à l’heure où s’effectue, entre l’idée
païenne et l’idée chrétienne, un compromis littéraire, et qu’un troisième
élément arrive, qui disjoint tout à coup les deux idées et se réunit à la plus
jeune pour renverser la plus ancienne. Ce terrible personnage, qui entre si
tragiquement en scène ; cet acteur, dont le rôle devait être si sanglant, s’appelait tout simplement les
barbares. Les nouveaux conquérants, grossiers et sauvage, s’amusèrent des
farces ridicules et licencieuses des baladins et des bateleurs. L’église
s’opposa vainement au scandale de ces représentations. Charlemagne n’eut guère
plus de succès lorsqu’il renouvela contre les bateleurs le 96ème
canon du concile d’Afrique, et que, dans son capitulaire de 789, il les
plaça au nombre des personnes infâmes incapables d’être admise en
témoignage. Les conciles de Mayence, Tours, Reims et de Chalon sur Saône, tenus
en l’année 813, firent défense aux prélats et aux éclèsiatiques d’assister aux
exercices des histrions , sous peine d’encourir une répression sévère ;
ajoutons que les membres du Haut clergé, des Évèques, des abbés et même des
abbesses, avaient coutume d’appeler auprès d’eux des bateleurs pour se divertir
de leurs grosses facéties. Plus d’une fois même, des clercs s’étaient joints à
eux pour jouer en public des farces forts peu édifiantes. Les bateleurs avaient
poussé la hardiesse jusqu’à se revêtir d’habits sacerdotaux, et à mettre en
action certaines aventures de couvents. Religieux et religieuses étaient peu
ménagés dans ces scènes burlesques, si bien que le clergé réclama, et que Louis
le Débonnaire prononça contre les auteurs de ces excès la peine du
bannissement. Ces sévérités déconsidérèrent ceux qui en étaient l’objet. Les
bateleurs furent tellement décriés, l’église les frappa d’une si complète
réprobation, qu’ils se dispersèrent et disparurent peu à peu.
Ils disparurent presque
complètement aux 9ème et 10ème siècles, décimés par la misère
et les calamités publiques et surtout par l´église.
A l’avènement de Hugues Capet, on n’en trouvait plus que quelques-uns, confondus avec les
mimes et les baladins, menant comme eux une vie errante et précaire.
« J’imitais les visages, les gestes et les parlers des
interlocuteurs et l’on eut cru que plusieurs s’exprimaient par ma bouche
(…) ; ainsi le funèbre jour a ravi avec moi tous les personnages qui
vivaient en mon corps. » (Epitaphe du jongleur Vitalis, 9ème
siècle)
Des bords de la mer rouge aux colonnes d’hercule ils ont envahi le
monde ancien. De la Sicile, qui semble avoir été leur première patrie, ils ont
gagné l’Italie : installés d’abord dans la Grande-Grèce, où on les connaît
sous le nom de phlyaciens, ils ont ensuite gagné vers le nord, et venus à Rome,
ils compromettent par leurs succès celui des poètes tragiques et comiques.
Mimes et histrions traversent en un cortège joyeux, courtisés des empereurs,
adorés du peuple, les siècles de la décadence latine. Et quand le vieux monde
romain s’effondre, ils vont encore vers le nord, au devant des peuples
barbares, pour les amuser à leur tour. Bien accueillis, ils fonderont une race
vigoureuse et prospère, car ils sont les ancêtres authentiques des jongleurs,
et ici, des aïeux aux petits-fils, nos avons tous les intermédiaires. Des plus
vieux aux plus jeunes, des carrefours de l’antique Syracuse à ceux des villages
de France, ils formeront une chaîne ininterrompue et qu’on suit du regard
jusqu’au bout.
Ceux que, sur les places publiques ou dans les châteaux, les jongleurs
entreprenaient de divertir, ne se souciaient guère de l’origine de ces
vagabonds, et ils avaient oublié depuis longtemps les mimes latins. Mais les
noms de minus et d’histrion demeuraient dans la langue savante, et ils étaient
couramment employés par les écrivains informés, ecclésiastiques ou juristes,
pour désigner les jongleurs. En 836, Agobert, archevêque de Lyon, blâme les
prêtres et les gens de religion, qui au détriment des pauvres, entretiennent
des amuseurs. Et les mimes sont cités là à côté des jongleurs comme des êtres de
même espèce. D’ailleurs jusqu’au 9ème siècle les jongleurs étaient
bien des mimes et ils portèrent longtemps ce nom dans la langue savante qui est
plus conservatrice que la langue vulgaire. Le peuple leur donna une appellation
nouvelle car les mimes avaient largement élargi leur répertoire . Ce
n’était plus des gens qui imitaient mais des gens qui divertissaient.
C’est de très bonne heure que les mimes, avec les autre produits de la
civilisation romaine, s’étaient répandus sur les territoires conquis. Dès le 5ème
siècle ils sont partout. La voix inquiète et indignée des moralistes les
dénonce, et c’est aux colères de leurs inflexibles juges plus qu’aux
applaudissements du public que ces amis de l’ennemi doivent de vivre encore
dans notre souvenir. Une très vieille hostilité, justifiée par la vanité
corruptrice de tous les spectacles, anime les chrétiens contre les mimes. On
entend retentir par le monde les malédictions d’Arnobe, de Minicius Félix, de
Lactance, de Tertullien, de Cyprien. Puis ce sont celles de saint Jérôme et de
saint Augustin. C’est à dire depuis le 5ème siècle, jusqu’à
Leidrade, archevêque de Lyon en 798, et Alcuin, c’est une guerre sans pitié,
que continuent les docteurs des siècles suivants. Et comme la force persuasive
des Pères et des docteurs ne suffisait pas, les conciles à leur tour,
conseillent aux laïques, enjoignent aux clercs, de fuir la race maudite. On
n’oublie ni n’épargne les mimes ni à Agde, ni à tours, ni à Arles, ni à Reims,
ni à Châlons, ni à Aix la Chapelle…. On les traque. Mais leur succès vivace
nous est attesté par l’indignation des sages, par leurs craintes toujours
justifiées et leurs défenses toujours nécessaire.
Nous voudrions les connaître. Nous voudrions savoir quels talents
dangereux leur attiraient la haine de l’église. Des hommes de leur temps,
chacun les voyant tous les jours, aucun n’a songé qu’il pût être utile de les
décrire : aussi avons-nous peu de détails sur leur compte.
De toute façon ces mimes n’étaient pas seulement des gens de théâtre,
et déjà depuis l’antiquité, à l’étroit dans les fonctions d’acteurs, ils
s’étaient mis à des exercices variés. Ce n’est pas seulement sur les scènes
qu’on les voit ; on les rencontre au coin des rues et aux
carrefours ; et là, ils font des prodiges d’ingéniosité pour retenir
l’attention rémunératrice du public qui badaude et qui muse. De leur adresse
éphémère et de leurs chants poétiques il n’est rien resté.
Ainsi pendant la période qui précède l’âge carolingien, tous les
auteurs, poètes musiciens, qu’on désigne du nom de mimes, nous sont il faut en
convenir mal connus : du moins peut-on affirmer avec certitude qu’ils ont
existé et qu’ils ont maintenu toujours vivante la tradition romaine. Or nous
touchons au seuil du 9ème siècle, et voici que dès sont début, nous
retrouvons encore des mimes, ou pour leur donner le nom qu’ils commencent à
porter, des jongleurs.
A la protection puissante de Charlemagne les lettres doivent de pouvoir
s’épanouir en sécurité. Le goût des choses de l’esprit renaît, tandis que des
clercs s’appliquent aux travaux de copie et de grammaire, des hommes d’un génie
plus mondain s’exercent à la poésie et à la musique. Ils sont en France, en
Italie, en Espagne, dans tous les pays romans ; mais en outre ils ont fait
la conquête des pays germaniques. Ils tiennent leurs secrets de lointains
ancêtres qui divertissaient le peuple de Rome ; ils se sont répandus avec
les mœurs de la grande ville : ils présentent un aspect de la civilisation
et du génie latins. Mais ils se sont imposés à tout le monde , même aux barbares
venus du nord. Et juste au moment où un prince franc, donne l’ordre de
recueillir les chants germaniques qui circulent parmi son peuple, ce sont des
latins qui chantent à sa cour et qui refoulent les scôps au delà du Rhin. En
Italie et en Espagne la situation est plus modeste, Théophane fait venir
d’Italie un mime qui dressait habilement les chiens en l’année 543, mais on a
peut de documents.
Plus tard on conte que Charlemagne, en guerre contre Desiderius,
franchit les Alpes grâce à la traîtrise d’un jongleur Lombard. L’homme s’étant
présenté devant le camp des Francs, chanta, en s’accompagnant de la rote, un
chant énigmatique où il offrait en termes obscurs son concours à l’empereur. Il
fit passer l’armée franque, comme il l’avait promis. On lui accorda un riche
salaire : il monta sur une montagne, y sonna du cor, et régna sur tous les
pays d’où le son avait été perçu : les habitants de la région en prirent
le nom de Transcornati. L’anecdote se placerait en l’année 773. Mais cette anecdote
peut-être la fantaisie d’un moine ou le reflet d’un conte populaire. Il est
certain du moins qu’Alcuin connaissait bien les jongleurs d’outre-monts,
puisque, en écrivant à l’un de ses disciples partis pour Rome, il le met en
garde contre la séduction des banquets, où fréquentaient les mimes.
C’est en France, en tout cas, que les jongleurs sont dans toute leur
gloire. L’Eglise a beau gronder et menacer, rien n’y fait. Hincmar, archevêque
de Reims, défend aux prêtres le plaisir coupable des chants et histoires
profanes : « Qu’ils ne tolèrent point, commande-t-il, ces amusements
scandaleux, où l’on voit paraître des ours et des danseurs ». Le troisième
concile de Tours (813) répète les décisions sévères du concile de Laodicée, qui
interdisent à tous les clercs les spectacles profanes donnés par les histrions.
Il n’est pas sans intérêt de s’arrêter un instant aux querelles que provoquent
les jongleurs dans l’entourage même de Charlemagne. Elles divisent les
personnages les plus considérables de la cour impériale, Angilbert et Alcuin,
dont on vante le grand rôle dans la renaissance carolingienne, était moins un
maître de belles lettres qu’un maître de bonnes mœurs. Il voulait que l’on
s’instruisit, non pour se divertir, mais pour apprendre à mieux vivre. Il avait
une conception grave des fonctions de l’esprit, qui lui faisait détester la
frivolité des mimes. Angilbert, de son côté, ne manquait pas de réflexion.
C’était un homme de sincère piété et qui finit comme un saint. A 49 ans, il
quitta le siècle renonçant à sa femme et à ses enfants, et il se retira au
monastère de Saint-Riquier, où il mourut. La sureté de son conseil lui avait
attiré la confiance de Charlemagne, qui lui donna sa fille en mariage et le fit
primicier de son palais. Mais il était comparé à Alcuin, d’une vertu plus
riante et plus aimable. Il avait une indulgence de grand seigneur pour les
divertissements et les fêtes, il était l’ami des mimes. Alcuin n’admettait pas,
il écrivait à Higbald : « Il vaut mieux faire manger à sa table des
pauvres que des histrions. »
Il menait campagne secondés par des prêtres zélés contre ces histrions.
Fort de l’appui des sages, Alcuin demanda et obtint de Charlemagne un décret
qui proscrivait les spectacles. Ce fut sa victoire sur Angilbert. Il écrivait à
Adalhard, abbé de Corbie : « J’ai bien peur que notre Homère
(Angilbert) ne prenne mal le décret. » Mais il était sur d’avoir raison,
ayant pour lui les écritures ; et St Augustin n’avait-il pas dit :
« L’homme qui introduit chez lui des histrions, des mimes et des danseurs,
ne sait pas quelle multitude de démons abominables entre avec eux. »
L’austère morale de l’Eglise obtenait l’approbation officielle de Charles. Mais
la loi fut sans effet. Les jongleurs continuèrent à vivre heureux en France. Si
Louis le Pieux, prince scrupuleux, ne daigne jamais sourire à leurs facéties,
il les tolérait du moins et il devait faire cette concession à l’usage.
Les jongleurs paraissent donc fort répandus dans le nord de la Gaule,
lorsqu’un événement fort avantageux pour eux vint modifier l’esprit de la
société française vers l’an 1000. Robert le pieux ayant épousé à cette époque
Constance d’Aquitaine, fils du comte Guillaume 1er, on vit affluer à
la cour du roi , des contrées méridionales, une multitude d’hommes, qui
d’abord étonnèrent par l’étrangeté de leur costume et le relâchement de leur
morale, puis peu à peu imposèrent leurs manières et les mirent à la mode.
« Ils négligeaient les armes et les chevaux ; ils se faisaient couper
la chevelure à mi-tête ; ils étaient rasés à la manière des histrions ;
ils portaient des bottines et des chaussures indécentes. » Raoul Le Glabre
les décrit en ces termes. Ces gens là apparemment pas histrions avaient toutes
les dispositions pour goûter aux plaisirs mondains. La reine donna le ton à la cour.
Les francs qui jouissaient d’une vieille réputation de vertu, les Burgondes,
vertueux eux aussi, se mirent au train des hommes du sud. L’église protesta,
fit de sérieuses réprimandes aux rois mais l’abominable usage continua de
vivre.
En France donc, à partir de cette époque, les jongleurs sont pour ainsi
dire entrés dans les mœurs.
En Angleterre, dès le 8ème siècle, commencent à paraître des
amuseurs, qui présentent tous les caractères de mimes. Ils sont signalés dans
les décisions des conciles et dans les mandements, qui interdisent aux
écclésiastiques d’en entretenir : ainsi le concile relatif aux affaires
anglaises qui se tint à Rome en 679 ; ainsi le concile de Clovesho, en
747. Dans une lettre qu’il écrit à Egbert en 734, Bede parle de l’usage répandu
parmi certains évèques de s’entourer de gens qui ont pour office de les égayer
et de les faire rire. Plus tard, en 906 , les canons anglo-saxons d’Edgar
défendent aux prêtres d’avoir avec eux des bouffons. On peut donc tenir pour
problable que les jongleurs n’avaient pas attendu le 8ème siècle
pour franchir la Manche.
Ils avaient franchi aussi le Rhin. Ils visitèrent d’abord la Germanie
en petit nombre puis comme ils y vivaient à l’aise, d’autres les suivirent
toujours plus nombreux. Au 12ème siècle l’Allemagne vit sous
l’influence française.
C’est au 9ème siècle que les premiers jongleurs de la
Romanie occidentale s’aventuraient à Thuringe.
Depuis une épopée reculée vivaient en Germanie des rhapsodes, des
scôps, qui chantaient aux festins des princes. Ils étaient tenus en grand
honneur, demi prêtres, ils conservaient le souvenir du passé, les exploits des
guerriers, la gloire des dieux nationaux. La vieille loi du pays de Galles
interdisait l’exercice de ce ministère aux hommes qui n’étaient pas de
condition libre. On les écouta longtemps avec respect mais l’heure de la
décadence vint. Ils avaient des ennemis et tout d’abord l’église. Celle-ci les
considérait comme les apôtres des superstitions proscrites. D’autre part le
sens des traditions purement germaniques se perdait. La curiosité se portait
sur la culture latine. L’antique rapsode quitte la cours des rois, et se
réfugie dans le peuple, plus lent à évoluer. Mais là encore il rencontre la
concurrence redoutable des mimes, des jongleurs du sud et d’occident. pour
vivre il amuse par n’importe quel moyen, le scôp pour vaincre le jongleur se
fait jongleur lui-même. Dès lors le jongleur est établi en Allemagne.
Grâce à leur industrieuse activité les jongleurs s’étaient imposés en
fait. Il leur restait à acquérir dans l’opinion publique une estime et un renom
qui leur donneraient plus d’honneur et plus de faveurs. En élargissant et en
élevant peu à peu leur rôle, ils parvinrent à la longue à un certain respect.
Mais il y avait de bons et de mauvais sujets. Si certains s’employaient à une
œuvre belle, beaucoup pour un peu d’argent, consentait à tout. L’histrion
romain, avec tous ses vices, continue de vivre : il est l’amuseur sans
scrupules, et, comme c’est pour rire qu’on délie le plus volontiers les
bourses, il trouve tous les moyens bon pour faire rire. Mais déjà paraissent
les jongleurs d’une espèce nouvelle. Ceux là ne comptent pas pour vivre sur les
bouffonneries équivoques ni les sottes jacasseries. Ils agitent les passions
généreuses du cœur, ils célèbrent la vertu des ancêtres, ils racontent
l’histoire des âmes saintes. Ce sont bien les jongleurs du 10ème et
11ème siècles, qui ont été chez les peuples romans les premiers
éducateurs du goût littéraire.
Mais quelle relation entretiennent-ils avec la grande puissance morale
de l’époque, l’église ?
On les verra exécrés et maudits. Mais il y a tels d’entre eux qui
seront reconnus pour des ouvriers de bonne œuvre, et que personne, même parmi
les plus austères ne songent à réprouver.
C’était une guerre ancienne et obstinée que celle de l’église contre
les jongleurs, représentants de l’esprit de frivolité et de la corruption
mondaine.
Le souvenir des mimes nous a été conservé par les malédictions des
écrivains religieux, du 4ème au 9ème siècle. Cette
austérité n’est pas un accident : c’est l’attitude ordinaire de l’église
pendant tout le moyen âge à l’égard des agents de dissipation. Protectrice des
mœurs, elle n’aimait pas le trouble élevé dans les consciences par les chants,
les fêtes, les danses et les jeux. La même sévérité est encore, au 11ème
siècle, celle d’un canon cité par Abbon de Fleury, et qui compte dans les
devoirs de la justice royale d’arrêter les voleurs, de punir les adultères, de
refuser le vivre aux impudiques et aux histrions. Au 12ème siècle
Honorius d’Autun imagine un dialogue fort dur entre un maître et son disciple.
Le disciple demande : « les jongleurs peuvent-ils avoir de
l’espérance ? » Le maître répond : « Aucune. Car ils
sont, du fond de leur âme, les ministres de Satan. On dit d’eux qu’ils n’ont pas
connu Dieu…..et Dieu rira des rieurs. »
En France, du 7ème au 10ème siècle, les
représentations foraines sont données par des histrions qui élèvent de fragiles
théâtres au milieu des rues, dans les foires, et se font accompagner par des
bouffons, des mimes, des joueurs de cithares. Plus tard circulent des jongleurs
menant en laisse des ours, des singes, des animaux fantastiques, sortes de
salamandres à tête humaine et à griffes acérées, des bateleurs, des funambules.
D’abord les jongleurs sont de vrais nomades qui vont de ville en ville en
jouant des tours de passe passe.
Puis, à la fin de l’époque
carolingienne, ils se mettent à chanter les poèmes nationaux.
Au 9ème et au 10ème siècle, les terreurs de la
société, les calamités publiques, les misères excessives, l’effroi général, les
exilèrent presque complètement. A l’avènement de Hugues Capet, c’est à peine si
l’on en trouve quelques débris épars, confondus avec les mimes et les baladins,
et menant concurrement avec ces derniers
une vie errante et précaire. D’ailleurs les troubadours dans les provinces du
midi , et les trouvères dans les contrées du nord , allaient s’emparer de
l’attention publique. Les troubadours comme les trouvères avaient des réunions
générales appelées cours d’amour, pays d’amour, gieux sous l’ormel, palinods,
où accouraient en foule des seigneurs et des dames de haute noblesse, et dans
lesquelles ils se livraient des combats poétiques. Ces solennités revenaient
annuellement. Là, les concurrents récitaient des contes, des tensons, des
fabliaux dialogués, et les improvisaient quelquefois .Dans les intervalles
que laissaient ces exercices, qui créaient pour la France une riche et féconde
littérature, un grand nombre de ces poètes faisaient le métier de menestrels,
parcourant les châteaux et les monastères, pour réciter leurs ouvrages, et
recevoir en récompense du plaisir qu’ils procuraient , des présents en or,
argent, bijoux, robes de prix, armures, chevaux etc…….Tous ne menaient pas
cette existence vagabonde. Beaucoup étaient attachés à la personne des princes
et des grands seigneurs ; d’autres trop haut placés par leur naissance et
leur rang eussent rougi d’aller de porte en porte tendre leur main comme un
gueux de l’ostière. Ces derniers prirent à leur service des jongleurs ou
ménestrels, qui colportèrent les œuvres de leurs patrons, lesquels se
contentant de la gloire qu’ils en retiraient, leur en abandonnaient les
profits. Pierre de la Mula poète inconnu dans un sirvente fort curieux, se plaint
amèrement du métier qu’il fait, et accuse une infinité de gens sans talent de
se mêler de jonglerie, et de dégrader la profession par leur bassesse.
« Je veux, dit-il abandonner le service des jongleurs ; car plus on
les sert moins on y gagne. Ils se sont mulltipliés au point , qu’il y en a
autant que de lapins dans une garenne; on en est inondé. » Pierre de la
Mula nous apprend que les jongleurs vont deux à deux en
criant : « Donnez-moi, car je suis jongleur. » et qu’ils
injurient ceux qui ne leur donnent rien. Ordinairement le jongleur était le
chef d’une troupe composée de chanteurs, de conteurs, de musiciens, de
baladins, de farceurs et de bateleurs qui s’associaient pour mettre leur
talent et leur profit en commun. « Une
ménestrandie bien composée, dit M . Victor Fournel, avait ses poètes, ses
musiciens et chanteurs, ses farceurs et saltimbanques. Les plaisirs des
spectateurs étaient ainsi des plus variés, et après avoir entendu une chanson
de geste et un concert de harpe, il se reposait en écoutant les quolibets, en
contemplant les grimaces du jongleur et les gentillesses du chien savant.
«
Une estampe d’une bible du 10ème siècle, conservée à la
bibliothèque de richelieu, représente une de ces troupes : tandis que les
uns jouent de la harpe, de la trompe, de la flûte, les autres dansent, la tête
en bas et les pieds en l’air, jonglent avec des épées, des poignards, des
boules et des anneaux. Ces comédiens errants allaient animer de leurs jeux les
festins, les noces, les assemblées plénières.
Vers le 9ème, 10 ème, siècle commence à poindre dans la
chrétienté occidentale la chevalerie et avec elle l’organisation de tournoi.
Longtemps à l’avance, hérauts et messagers sont allés porter de château en
château, l’invitation et crier de village en village l’annonce du tournoi. Lors
de ces derniers entre les joutes, place est faite aux jongleurs et à tous ceux
qui amusent la foule : montreurs d’ours, acrobates ou lutteurs de
profession.
Le soir, les barons sont invités à un festin qui se termine en danses
et en intermède que fourniront les ménestrels qui chantent, en s’accompagnant
de la vielle ou de la rote, les chansons de geste ou les romans de chevalerie.
Au 10ème siècle le personnage du prestidigitateur magicien
paraît dans les enluminures de manuscrits, et, au Moyen âge, il est le jongleur
dont les tours de prestidigitations et d’escamotage deviendront bientôt métier
d’artiste.
Comme des vautours sur des cadavres, comme des mouches sur une liqueur
sucrée, on voit convoler à la cour des princes, pauvres, chétifs, aveugles,
bancroches, estropiés, jongleurs, danseurs, musiciens, vauriens et prostituées.
Ils sont comme bien d’autres, pareil à des sangsues, qui ne lâcheront pas la
peau avant d’être gorgées de sang. » : ainsi s’exprime Conrad,
chantre de l’église de Zurich, vers l’an 1275.
Les jongleurs sont des parasites ; ils chantent pour de l’or, des
vêtements, des chevaux. Comme le vilain fait de ses brebis, ils tondent les
riches, et souvent deux fois l’an. L’homme qui leur prête son attention, ne
tardera pas à épouser la pauvreté. Ils se vendent corps et âme pour le moindre
salaire, comme les pires femmes ; et il y a deux professions qui ne sont
que péché ; ceux sont celles de prostituée et de jongleur.
Ils reconquirent la faveur du public grâce aux troubadours et aux trouvères.
Quelques-uns , devenus riches, prirent à leur service des jongleurs ou des
ménestrels, qui colportèrent les œuvres de leurs patrons.
Le jongleur était le chef d’une troupe composée de chanteurs, conteurs,
de musiciens, de farceurs et de bateleurs, qui mettaient leurs talents en
commun. Au 12ème siècle, ils étaient très recherchés. On les payait
fort cher. Mais vint la création du théâtre de France où jongleurs, histrions
et ménestrels ne pouvaient guère espérer qu’une place de danseur.
(ménestrels, jongleurs, baladins que nous appelons aujourd’hui
paradistes et bateleurs)
Les ménestrels ou ménétriers se nommaient au 12ème siècle,
trouvères dans le nord, troubadours dans le midi. C’étaient des hommes en qui
l’esprit plus éveillé se laissaient aller aux écarts de l’imagination et ne
voyait dans la raison qu’un obstacle à leurs penchants. Ils comprenaient que le
plaisir peut se vendre et se payer. Ils voyaient que leurs lazzi, leurs jeux de
mots, leurs satires malicieuses, les faisaient bien accueillir, et que ceux
qu’ils amusaient un peu les invitaient au moins au souper. Les seigneurs dans
leur sombre manoir les hébergeaient et leurs faisaient des présents.
Ils composèrent des satires rimées, des chansons de gestes, des rondes
dont les traits sont l’origine du vaudeville. Il y eu bientôt des poètes
ambulants. Au 12ème siècle on ne voyageait pas ; les seigneurs
vivaient en petits souverains dans leurs manoirs….Au moyen - âge un troubadour
ou trouvère qui arrivait suivi de ses ménestrels, suivant l’usage était si
généreusement acceuilli, que tous ceux d’entre eux qui pouvaient se trouver
doués d’un peu d’ordre, devenaient riches. On cite un jeune seigneur, qui ne
possédant que la moitié d’une terre, courut le monde en troubadour, et avec les
présents qu’il reçut parvint rapidement à acheter l’autre moitié.
Cependant leurs chansons licencieuses laissaient partout des germes qui
couvrirent la France d’une grande plaie morale. Leurs mœurs répondaient à leurs
poésies ; et ils justifièrent cet adage que « qui perd la foi a perdu
d’abord les mœurs ». Ils saluaient les hérésies qui autorisaient leurs
désordres. Ils chantaient tout ce qui pouvait flatter les passions et semaient
le sarcasme sur les choses saintes. Ils firent assez de mal pour mériter d’être
bannis par Philippe - Auguste.
Saint Louis, trop pur et trop honnête pour croire à ces abus de
l’esprit dont on accusait les trouvères, les rappelle sur leur promesse de se
conduire loyalement. Il leur donna plusieurs privilèges , entre autres celui de
ne payer le droit de péage aux portes de Paris qu’en chantant au gardien une de
leurs petites chansonnettes. Il étendit cette faveur à leurs amis et camarades
jongleurs, promeneurs de singe et montreur d’ours et autres bateleurs, qui
s’acquittaient en égayant le portier par un tour de leur gibecière. ( se payer
de chansons et payer en monnaie de singe)
Pour ne pas se montrer indigne des bontés du roi, deux des principaux
trouvères Hugues Le Lorrain et Jacques Grure, firent bâtir aidés par leurs
confrères (car ils s’érigèrent en confrérie, eurent leur bannière et leurs
armes) une chapelle qu’on appela Saint – Julien – d es -Ménétriers. Elle
étaient dédiée à St Julien le Bon Hospitalier, qui selon les légendes
populaires, jouait très bien du rebec, et à St Genest le comédien, lequel était
alors souvent représenté par une vielle. St Julien avait sa statue à la porte
de la chapelle où il jouait du violon. La chapelle était bâtie rue St Martin,
au coin de la rue habitée par les confrères appelée à cause de cela rue des
ménétriers. Cette église à été détruite pendant la grande révolution.
Et la rue des ménétriers vient de disparaître dans le percement de la
rue Rambuteau.
Tout se passa bien sous St Louis . Louis 9 maria son successeur à Marie
de Brabant qui avait dans sa suite, Adénès dit le roi des ménestrels, avec qui
elle composa le roman de Berthe aux grands pieds. Mais tout dégénéra de
nouveau, la rue des ménétriers devint si scandaleuse qu’il fallut en bannir la
population.
On ne toléra que les jongleurs, bateleurs et danseurs de corde,
auxquels ceux des chanteurs qui tenaient au sol se joignirent sans bruit,
tombant dans la parade et se soumettant à vivre très surveillés.
Il s ‘éleva alors des poètes plus sérieux, qui se réunirent pour
composer et représenter de graves actions dramatiques. Ils débutèrent par le
mystère de la passion ; et on les voit longtemps donner ce nom de mystère
à tous les sujets religieux.
Ces représentations amenèrent des foules immenses de spectateurs. Mais
comme de grands désordres ne tardèrent pas à s’y introduire, le prévôt de Paris
les défendit.
Les artistes associés ne se tenant pas pour battus, s’érigèrent à leur
tour en confrérie, la confrérie de la passion et s’adressèrent à la cour.
Charles 6 Leur donna des lettres qui les autorisaient à s’établirent dans
Paris, le 4 décembre 1402. Ils s’installèrent dans la grande salle de l’hôpital
de la trinité, rue St Denis. Leur succès fut tel qu’il se forma une autre
troupe « les enfants sans souci « qui dressèrent leur théâtre aux halles
où ils représentèrent ce qu’ils appelaient les sottises et qui avaient pour
sujet les aventures les plus plaisantes survenues dans Paris.
Les deux troupes s’associèrent , mais ce mélange de bouffonnerie et de
morale déplut aux gens sages. On expulsa tout.
Les confrères de la passion qui avaient amassé de grands bénéfices
achetèrent l’ancien Hôtel de Bourgogne qui n’était plus qu’une masure dans la
rue Mauconseil. C’était sous Henri 2. Il ne leur fut plus permis de représenter
des sujets religieux. La réforme était venue. Un arrêt donné le 19 novembre
1548, permit aux confrères de jouer des sujets licites et honnêtes, mais non
plus des sujets saints. Cette nouvelle carrière ne convenant plus aux confrères
un peu religieux ils cédèrent la place à une autre troupe, laquelle devint la
Comédie Française.
Au 13ème siècle, ils formaient dans bien des villes,
notamment à Paris, de puissantes corporations.
Les premiers jongleurs récitaient les poésies des autres. Par la suite,
certains se procurèrent l’instruction nécessaire pour composer eux-mêmes. Ils
acquirent vite richesse et considération. Ils devinrent ménestrels, hérauts
d’armes, historiographes. Les autres virent leur profession s’avilir de plus en
plus. De nos jours « jongleur » est un mot qui ne doit s’appliquer
qu’à celui qui jette et rattrape avec adresse différents objets. Dans la
pratique, les jongleurs sont également équilibristes.
Troubadours et trouvères (langue d’oc pour le premier, le second langue
d’oil). Les ancêtres sont les jongleurs. De bonne heure, à l’art de réciter des
vers, quelques jongleurs joignirent celui d’en composer.
Les troubadours allaient de château en château. Au nord, les grands
seigneurs comme Robert d’Artois, s’entourèrent de trouvères, qui restaient
attachés à leur service.
Au 13 ème siècle, quelques trouvères firent évoluer leur rôle et leur
condition.
Le limousin et le Périgord furent le berceau de la poésie courtoise.
Dans le midi surtout en Provence, dans le comté de Toulouse et chez les
seigneurs de Rodez et de Narbonne les troubadours furent bien accueillis. La
Picardie et l’Artois furent également des centres importants de productions
poétiques. Au 14ème siècle, le rôle des troubadours est amoindri, la
langue nationale est remplacée par le français dans l’administration et la
littérature.
C’est dans une telle atmosphère fièvreuse que les
précurseurs des banquistes modernes apportaient leur collaboration dès lors
indispensables aux plaisirs des fêtes populaires.
Dès 1292 « Les jongleurs, bateleurs et joueurs de viole » constituaient à
paris une corporation régulière qui figure au rôle des tailles c’est à dire
dans la liste des impôts prélevés sur les roturiers. Par ailleurs presque dès
cette époque leurs manifestations attirèrent la sage attention du pouvoir
législatif car le 14 septembre 1395 une ordonnance prévotale leur défendait
déjà « de rien dire, rien représenter ou chanter sur les places publiques
ou ailleurs qui puisse causer quelque scandale à peine d’une amende arbitraire
et de deux mois de prison au pain et à l’eau. »
Au 13ème et au 14ème siècle on en vit souvent à
Paris. Ils s’y fixèrent dans une rue qui fut appelée rue des jongleurs, et qui
plus tard devint la rue de St julien des ménétriers. Ils s’associèrent des
femmes, qu’on nommaient jongleresses. On les louaient pour divertir les
compagnies dans les maisons particulières ; et la politique des rois, si
l’on en croit Dulaure, ne dédaigna pas leurs jeux pour les faire servir à ses
fins. Au 13ème siècle Philippe le Bel employa des jongleurs pour la
représentation d’une farce appelée la procession de renard, vive satire contre
le pape Boniface 8. Une pareille farce, ordonnée par le roi, dut en autoriser
d’autres plus ou moins scandaleuses.
Aussi trouve-t-on en 1395 (14 septembre), une ordonnance du prévot de
Paris, défendant aux histrions, baladins, bateleurs, jongleurs et autres,
« de faire ou chanter en places ne ailleurs, aucun diz ou rhymes qui
facent mention du pape. » Il était enjoint, en outre par la même
ordonnance de ne rien dire, représenter ou chanter, dans les places publiques
ou ailleurs qui pût causer scandale.
Une éternelle confusion de noms, qui se rencontre dans les auteurs
contemporains, empêche de distinguer le rôle précis que remplirent les
bateleurs dans la représentation des pièces dramatiques, qui alors prenaient le
nom de gestes, et dans celles des satires, des dialogues entre des amants
(tensons, sirventes). Les artistes qui exerçaient l’art de ménestrellerie ou de
jonglerie se trouvent désignés dans les anciens recueils sous une multitude de
noms d’une signification analogue, mais qui tous pourtant avaient leur valeur
spéciale : c’est ainsi que bateleur et baladin quoique souvent pris dans
le même sens, indiquent des attributions différentes ; mais il est à
croire que le même individu dans des troupes nomades peu importantes, étaient
chargés de plusieurs emplois, comme cela a lieu encore aujourd’hui dans des
troupes d’acteurs de province, où le jeune premier joue au besoin les pères
nobles ;Quoi qu’il en soit le 12ème siècle fut pour les
histrions une époque fortunée. On les rechercha et, quel que soit le nom sous
lequel il figure à côté des auteurs qui récitaient eux mêmes leurs vers ou des
interprètes qui les chantaient , il est certain que tous ensemble réunis en
compagnie, se firent payer fort cher les amusements qu’ils procuraient. Des
filles de joie s’adjoignirent à eux et les accompagnèrent dans les châteaux
auprès des seigneurs, des princes et des rois. Les religieux eux mêmes aux
jours de fête, louaient des troupes de ce genre et leurs permettaient,
moyennant finance de dresser des
tréteaux dans l’intérieur du monastère. Ce trafic singulier fut interdit par le concile de Béziers en
1223 ; mais on n’en vit pas moins dans certaines provinces, les prêtres
avec leurs clercs élever à l’intérieur même des églises des tréteaux où ils
faisaient, après vêpres, mille bouffonneries pour attirer et amuser les
paroissiens, appelant à leur aide des histrions de passage. Le concile de
Salsbourg défendit en 1310, ces profanations. L’un des articles des canons de
ce concile est ainsi conçu ; « Clerrici neu sint joculatores aut
galiardi. » Malgrè cette injonction, les clercs continuèrent à danser, à
se masquer et à parodier dans les lieux saints, où à y donner entrée aux bateleurs.
Jusqu’au 16ème siècle, l’autorité de l’église ne fut pas assez forte
pour les en empêcher.
Les représentations des Mystères nuisirent quelque peu aux bateleurs.
Lorsque les confrères de la passion, les clercs de la basoche et les enfants
sans-souci eurent crée notre théâtre, les
jongleurs, chanteurs, ménestrels et histrions abandonnèrent leurs
prétendues fonctions dramatiques et devinrent de simples danseurs. Nous avons
déjà montré un coin de leur histoire qui se mêle à l’histoire de la danse ou à
celle des chanteurs et des joueurs d’instruments, au mot baladin, auquel nous
renvoyons le lecteur. Toutefois, beaucoup parmi eux conservèrent le caractère
primitif des bateleurs, et sous le nom de jongleurs (joculatores), à peu près
abandonné par ceux qui l’avaient porté jusque là, ils continuèrent à divertir
le peuple en jonglant avec des armes, des anneaux, des bâtons, et faisant
toutes sortes de tours d’adresse. Ceux de qui ils prenaient le nom, les
jongleurs n’avaient pas tardé, tant à cause de leurs mœurs qu’à cause des proscriptions
des conciles et des rois , à tomber dans le mépris. Les vices et les bassesses
de la majorité avaient rejailli sur la profession toute entière. Ils étaient
bien loin maintenant, sous le rapport
moral, du ménestrel proprement dit, resté fidèle aux traditions héroïques de
son état, poète exercé et chanteur soigneux de sa propre dignité, et ne
s’abaissant point, comme eux, au rôle de sorcier et de grimacier obscène.
Nous parlions tout à l’heure des singes que les bateleurs menaient avec
eux et qu’ils dressaient à toutes sortes de gambades. Déjà, sous Louis 9,
l’usage de ces animaux existe parmi les amuseurs publics. Dans le livre des
métiers d’Etienne boileau, recueil de règlements colligés sous le règne de ce
roi, dans les essais historiques de Sainte Foy, et les curiosités de paris de
Dulaure, il est dit qu’un bateleur entrant à Paris, sous le petit châtelet sera
exempt de tout droit de péage, tant dudit singe que de tout ce qu’il aura
apporté pour son usage, en faisant jouer et danser l’animal devant le péager.
De là vient le proverbe, payer en monnaie de singe, en gambades. Un autre
article du tarif porte que les jongleurs en serait quitte, eux pour une chanson
devant le péager. Il y a loin de ce privilège aux proscriptions dont nous avons parlé. Philippe Auguste,
témoin cependant de la la vogue extraordinaire des jongleurs, n’avait pas eu
pour ceux ci le même goût. Aux grands seigneurs de son royaume, qui tous
entretenaient des jongleurs, il disait : « donner aux histrions,
c’est donner au démon. ».
Plus tard le 13ème,
14ème , 15ème, les conciles et les moralistes resteront
fidèles aux mêmes principes.
Les jongleurs sont exclus de la communion au même titre que les
épileptiques, les somnanbules et les magiciens, manuscrit de la bibliothèque de
Stuttgart qui date du 14ème siècle.
Des princes de l’église, des prélats et des abbés, qui auraient dû
donner l’exemple de toutes les austérités, ne craignaient pas d’afficher leur
prédilection pour de pareilles gens. Les conciles, de bonne heure avaient dû sévir :
ils interdisent à tous les clercs les spectacles profanes données par les
histrions. Mais leurs injonctions paraissent être demeurées sans effet. Au 12ème
siècle l’Archipoeta déplore que les grands personnages ecclésiastiques laissent
à leur porte les poètes, ceux qui ont la tradition des belles formes latines,
tandis qu’ils reçoivent des mimes dans leurs chambres. En Bretagne le jongleur
Troussebeuf reçoit de l’archevêque Roland de Dol une terre en fief viager, a
peu près à la même époque.
Plus tard au 13ème siècle on raconte l’anecdote suivante.
Deux vagabonds ont été acceuillis avec transports par le prieur et les clercs
d’un monatère : on les avait pris pour des jongleurs, et on se promettait
merveilles. Mais on reconnaît bientôt qu’on a affaire à deux frères
mendiants ; on les chasse ; et c’est à la pitié d’un jeune moine
qu’ils doivent de ne pas être mis aussitôt dehors, où la tempête souffle avec
fureur.
Tous ses excès qui compromettaient l’autorité personnelle des clercs,
ne portait pas atteinte à la majesté du culte. Mais les jongleurs en étaient
venus à se mêler aux cérémonies. Les jours de fête pour l’église étaient des
jours de fête pour eux. Si , en l’honneur du Christ, de la Vierge, ou d’un
saint, une procession était organisée, on comptait sur la magnificence de la
pompe pour exalter les esprits, et nul ne savait mieux que les jongleurs étaler
des costumes fascinants, sonner des fanfares perçantes, parer splendidement un
cortège.
Le mal jusque là n’était pas grand. Mais, dans certaines occasions,
après l’office, sous le porche des églises, les prêtres et les clercs
organisaient des spectacles et des jeux dramatiques : les jongleurs
étaient encore présents pour offrir leur concours. Ils assuraient la partie
musicale du programme. La musique des jongleurs n’avaient pas la gravité de la
musique de l’église : elle passait pour corruptrice. Mais quels qu’ils
fussent, ceux qui la faisaient étaient moins dangereux que la troupe de
farceurs qui les accompagnaient. Durant la représentation des mystères,
c’étaient ces derniers qui délassaient les spectateurs par des facéties et des
bouffonneries mêlées. Et on avait imaginé ce moyen pour empêcher le public de
courir aux montreurs d’ours pendant le spectacle, de leur montrer les ours sur
la scène même. Le théâtre profane fut apporté du dehors par les jongleurs.
Une fois sous le porche de l’église, il était difficile que les jongleurs n’y entrassent point : ils y
entrèrent et ce fut leur dernier succès. Ils y furent musiciens, acteurs,
danseurs.
Les évêques, les conciles et les pape s’élèvent avec force contre cet
abus. Mais leurs proscriptions répétées attestent la persistance vivace des
usages qu’ils condamnaient.
Tandis que les jongleurs apportaient devant les auteles le trouble des
divertissements profanes, des clercs, délaissant le service de Dieu, se
mettaient à courir le monde, et compromettaient par leur conduite le prestige
et la dignité de leur classe. Le mécontentement, un exemple pernicieux, le
hasard d’une fausse vocation, leur faisait oublier ce qu’ils devaient à
eux-mêmes et à la profession qu’ils avaient choisie. On en trouva bientôt
partout et dans tous les pays. On les appelait les clercs vagants.
Au 14ème siècle, ils retombent dans leurs premiers
errements : dansent à l’épée, montrent des truies qui filent, des cochons
savants déguisés en seigneurs et châtelaines, des ours qui font le mort, des
singes qui chevauchent, des chèvres qui jouent de la harpe. Ils se mêlent aussi
de sorcellerie et de médecine. Les mires et les physiciens étaient sur les
places publiques des herbes, des drogues, des philtres. Ils assemblent les
passants par des concerts d’instruments, des chansons des tours, des cabrioles,
la bizarrerie de leur accoutrement et des boniments qui ne diffèrent guère de
ceux des charlatans d’aujourd’hui,
Au 15ème siècle, les fêtes princières exhalaient de
grandeur. Tournoi, remise des prix , ce sont les entremets des banquets qui
sont restés célèbres. Le fait d’ailleurs que les invités moins privilégiés,
placés sur les estrades, regardent seulement ces festins, met bien en évidence
leur caractère spectaculaire. On y voit non seulement d’énormes pièces montées
avec fontaines, automates et musiciens, mais des entrées d’animaux et de
personnages plaisants ou fantastiques.
En parlant peu, ou pas du tout, les mimes échappaient à des sanctions
qui les eussent empêchés d’exercer leur profession .
Le mime pénètre en Gaule à la faveur de la conquête romaine. Eloignés
du pouvoir central, les acteurs ont toute latitude pour continuer leurs imitations.
Ils reprennent les mêmes farces, flattent le peuple, ne cherchant qu’à fouetter
des instincts vite blasés par des gestes et des attitudes obscènes. Charlemagne
les met hors la loi. Les conciles les condamnent.
Au Moyen âge, mimes et ménestrels restent confondus ; l’imitation
étant un attribut de la nature, la parodie persiste dans les spectacles
populaires et le mot même de mime conserve en soi l’idée de bouffonnerie.
N’ayant plus d’arènes pour s’exprimer,
le mime est devenu un artiste ambulant, imitateur, donc illusionniste et
bientôt escamoteur, jongleur qui va de foire en foire, de fêtes civiles en
fêtes religieuses, donne des représentations sur les places publiques ou chez
les seigneurs qui l’accueillent et lui offrent, pendant un temps plus ou moins
long, nourriture et logement, dans leur résidence féodale.
A ce compte et pour profiter plus longtemps du séjour, le jongleur
oublie son rôle primitif de mime et est tout à la fois conteur, déclamateur de
poèmes légendaires, d’épopées, d’amours malheureuses, danseur de corde,
escamoteur, dresseur d’animaux, contorsionniste, équilibriste et sauteur.
Il sert à l’occasion un troubadour qui jugeant indigne de jouer de la
musique quand il chante lui-même ses œuvres, le prend comme ménestrel. Dans les
festins solennels, le jongleur donne des spectacles mimés ou dialogués qui ont
pour but de divertir et de délasser les convives et ne comporte ni intrigue ni
dénouement. La langue française donna longtemps à ce genre le nom d’entremets,
c’est à dire un morceau délicat, nom oublié qui par corruption est devenu
intermède.
Les chanteurs et musiciens se séparèrent à la fin du Moyen âge, des
jongleurs et constituèrent la corporation des ménétriers. Les seconds,
considérés comme des bateleurs, continuèrent leurs pérégrinations, moitié
artistes d’agilité, moitié bouffons, jusqu’à la fin du 15ème siècle,
sous le nom de saltimbanques.
Suivant l’académie le bateleur est celui qui fait des tours de passe - passe
aux moyens d’un bâton qu’il tient à la main et par extension celui qui monte
sur des tréteaux dans les foires et sur nos places publiques, comme les
charlatans, les joueurs de farces, les danseurs de corde, les diseuses de bonne
aventure, les arracheurs de dents, les marchands de vulnéraire, les
escamoteurs, les jongleurs, les sauteurs, les ventriloques, les gilles, les
paillasses, enfin tous les sujets de cette bohème qui vient , à grand renfort
de cymbales et de grosse caisse, sur la place publique, pour amuser la populace
et lever sur elle un impôt de gros sous. Cet hercule qui soulève des poids à
bras tendus, bateleur ; cet Orphée qui racle une corde à boyau en faisant
des grimaces, bateleur ; ce Gargantua qui s’empiffre d’étoupes allumées,
dévore des épées nues et se régale de cailloux, bateleur ; cet homme incombustible,
cette femme à barbe, ce géant écossais,
ce nain difforme, ce marchand de crayons à panache ondoyant, cet opérateur à
cuirasse éclatante, cette tireuse de cartes à jupe bariolée, ces montreurs
d’ours ou de veaux à deux têtes, ces joueurs de marionnettes, ces chanteurs de
complaintes, ces musiciens ambulants qui jouent à la fois de cinq ou six
instruments et imitent le cri des animaux, bateleurs. Bateleurs est donc un
terme général, le nom donné à tous ces apôtres du rire grimace, de la gaieté forcée,
auxquels les dieux Comus et Momus ont dit : Allez et amusez les badauds,
depuis le pôle brûlant jusqu’au pôle
glacé. Quiconque amasse la foule par ses gasconnades, ses hâbleries, ses
cocasseries, et amène le badaud à cracher dans le bassinet de son escarcelle,
en arrachant une molaire, en escamotant la muscade, en dressant son mollet sur
son occiput, en ramenant sur son estomac l’éminence qui décore son épine
dorsale, en balançant ses tibias sur la corde roide ; en déclamant des
drôleries sur le grand mongol, des gaillardises sur la reine de Saba, des
âneries sur le roi du Congo, des cocasseries sur la sultane favorite, des coq à
l’âne sur le schah de perse ; celui là est un bateleur.
Bateleurs et badauds sont deux termes relatifs ; l’un nait de
l’autre. Supprimer le badaud ; du même coup vous pulvérisez le bateleur,
et réciproquement. Est-ce le badaud qui a crée le bateleur, est-ce le bateleur
qui a fait le badaud ? Question insoluble comme celle de l’œuf et la
poule. La science embryogénique croit qu’ils sont nés silmutanément , par suite
d’un rapprochement soudain, en pleine place publique. Le mot bateleur vient de
bâton.
Quoi qu’il en soit , ce nom de bateleur, qui dès le 15ème
siècle , remplaça ceux de jongleurs ou d’histrion, a été indifféremment donné
depuis longtemps aux baladins, farceurs, paradistes, charlatans et amuseurs
publics, vivant au jour le jour du produit de leurs tours, momeries, jongleries
ou hâbleries, et cherchant sans cesse le moyens de faire rire leurs auditeurs ,
d’amuser la populace, d’en imposer au badaud crédule, afin de faire tomber
quelques sous dans l’escarcelle posée devant eux. « le métier du bateleur
est de tromper le peuple en ayant l’air de le divertir » dit une
encyclopédie. Nous trouvons ce jugement bien sévère pour quelques-uns surtout
de ces artistes nomades, bohémiens de notre civilisation, qui gagnent si
péniblement le pain quotidien, riant de leurs propres difformités, acceptant la
laideur avec reconnaissance et comme la première mise de fonds de leur pénible
industrie, se rendant ridicules, grotesques ou repoussants à plaisir, pour
mieux exciter la gaieté et la générosité de « l’honorable
société. »Naissant on ne sait où, allant on ne sait où, mourant on ne sait
où ; affamés, besogneux, méprisés ; dépensant des trésors de ruse et
d’adresse, d’éloquence et de diplomatie, de patience et de courage, pour
aboutir à l’humiliation, à la misère, au faux pas qui les jette brisés sur la
pavé. Ces derniers mots s’adressent, il est vrai, plus particulièrement aux
acrobates proprement dits ; mais à tous les autres quel avenir est donc
réservé ? L’hôpital voilà ce qui les attend de mieux ; jadis ils
mouraient au coin d’une borne ou d’un bois, et on les jetaient à la voierie.
L’histoire nous apprend pourtant que quelques bateleurs devinrent riches. Mais
il faut tout dire : ceux que la fortune favorisa ne furent pas les plus
méritants ; ils furent les plus audacieux, et la fortune, qui est femme,
favorise les audacieux. D’ailleurs on ne les rencontre guère que dans la classe
toute spéciale des arracheurs de dent, marchands d’orviétan et empiriques, hommes bienfaisants et méconnus qui mettent
le grand art de guérir à la portée de toutes les bourses, et à qui la sottise
humaine refuse rarement une maison de campagne et des rentes sur l’état. Les
autres sont des pauvres diables déclassés, que des infortunes ou la mauvaise
conduite lancent sur la place en leur criant : « saute
paillasse !»
Au registre des recettes et dépenses de la royne Isabeau de Bavière,
pour l’année 1415, conservé aux archives et cité par M. Le Roux de Lincy dans
les femmes célèbres de l’ancienne France, nous voyons la belle sœur de
Valentine de Milan faisant jouer à plusieurs reprises devant elle les
ménestrels du roi, des bateleurs et des joueurs de personnage ; il est
baillé un escu à un joueur de basteaux, nommé Mathieu Lestuveur, qui a joué au
Plessis-Piquet ; à Ferry Cabinguet.
On remarque que dans ce document, la qualité de jongleur n’est pas
employée. Faut-il croire, avec Delamarre (traité de police, t. 3, liv. 2, ch 2)
que le nom de bateleur remplaçait déjà ceux de jongleur et d’histrion ?
Nous avons vu précedemment que le jongleur de la tradition, le primitif
jongleur, l’artiste multiple s’était transformé, et que son héritage était
dévolu aux ménétriers ou ménestrels et aux bateleurs. Mais le nom subsistait
encore, ne faisant plus qu’un, cela n’est pas douteux, avec celui de bateleur.
Dans le mystère de St Christophe, d’Antoine Chevalet,qui date des premières
années du 16ème siècle, on voit le jongleur Mauloue, parcourant
villes et villages avec tout l’attirail de sa profession :
Bastons, bacins, soufflets, timballe,
Les gobelets, la noix de galle.
Le singe, la chèvre, le chien,
Et l’ours……
Vendant des images de sainteté et chantant des chansons badines. Le jongleur
est tout à fait dégénéré en opérateur et en charlatan. Une ordonnance du
parlement, de l’année 1543, nous offre
un renseignement qu’il est bon de noter ; elle nous montre que,
concurremment avec les confrères de la passion, il y avait encore, à cette
époque, dans Paris, des comédiens appelés jongleurs et bateleurs. « La
cour, avertie que plusieurs du populaire et gens de métiers s’appliquent plutôt
à voir jeux de bateleurs et jongleurs, et y donnent un et deux grands
blancs ; ce qu’ils ne font pour les pauvres……. » défend à tous bateleurs,
jongleurs et autres semblables de jouer en ceste ville de Paris, ou sonner leur
tambourin, quelque jour que ce soit, sous peine du fouet et bannissement de ce
royaume. »
Après la fin du moyen - âge, la condamnation des mystères par les
parlements de Paris et de province marque le déclin des confréries spécialisées
dans les spectacles religieux ; elle jette sur les routes, en bandes
faméliques, les histrions qui étaient employés dans ces confréries.
Ce déclin annonce celui du théâtre non professionnel alors dominant.
A partir de la 2ème moitié du 16ème siècle de
véritables troupes professionnelles font la navette entre les villes :
certaines sont internationales comme celle des Gelosi.
Désormais et pendant quatre siècles, les comédiens forains
appartiendront à deux mondes : celui des «enfants de la balle »
(sauteurs, danseurs, montreurs de choses étonnantes….) et celui des artistes
spécialisés dans l’art de la représentation théâtrale et l’art du dialogue :
comédiens « dell’arte » italiens (du 15ème au 18ème
siècles), « comédiens de campagne » du 17ème siècle,
théâtres de la foire du 18ème siècle, théâtres démontables du 19ème
et 20ème siècles…
Delamarre, prétend qu’à la date où il écrivait (1705), les noms de
jongleur et d’histrion avaient décidément été remplacés par celui de bateleur
(probablement comme aujourd’hui ce dernier par celui de saltimbanque), et qu’ils n’en avaient point
d’autre alors. Il cite, en outre, un règlement de 1560 et 1588, toujours en
vigueur en 1705, qui défendait aux bateleurs
« de jouer les dimanches et les jours de fêtes, aux heures du service
divin, de se vêtir d’habits ecclésiastiques et de jouer des choses dissolues ou
de mauvais exemple, à peine de prison et de punition corporelle. »
2ème partie du 15ème moralités. Au 16ème
siècle les réformateurs tel Calvin parlera des « battelleries « de
la messe, « gestes de joueurs de farces, déshonnêtes et immodestes. Après
que cet enchanteur et joueur de passe-passe c’est approché plus près de l’autel,
il commence à jouer son rôle et sa farce, tantôt se remuant d’un côté et de
l’autre, tantôt restant sans bouger. Puis il marmonne ses murmurements
magiques, par lesquels il lui semble bien qu’il doive tirer Christ du ciel.
Au 16 ème siècle, des troupes de comiques italiens viennent à Paris
quand la cour de Médicis s’allie à la cour de France. La coutume existait alors
au théâtre de représenter des intermèdes pendant les entractes et les plus
grands écrivains espagnols en écrivirent. C’étaient de véritables farces dans
lesquelles tous les types étaient mis en scène . Dans la comédie italienne
tous ces types fixés par tradition prendront des noms : Arlequin,
Polichinelle etc….. dont les principaux survivants créeront la confusion, au 19ème
siècle, quand le mime reparaîtra dans un genre uniquement muet.
En France, au Moyen Age, on donna le nom d’histrions à certains
jongleurs et baladins qui faisaient leurs exercices sur la place publique.
Tabarin ne fut autre chose qu’un histrion de même que son compère Mondor, Barry
l’orviétan, Padelle, Gille le niais.
Enfin les derniers histrions que l’on puisse nommer sont les 3 bouffons
qui devinrent si célèbres à la fin du 16ème siècle, et qui fut on
peut le dire les premiers maîtres de nos comédiens et les introducteurs du vrai
théâtre en France, Gaultier-Garguille, Gros Guillaume et Turlupin.
Bateleur : Th. Gautier : Son ancien métier de bateleur et de
soldat lui donnait des facilités singulières pour ces sortes d’ascensions
obsidionales.
Individu qui amuse le public en plein vent, par des bouffonneries, des
tours de force ou d’adresse.
Le dictionnaire de la conversation de son côté, dit, mais plus
lourdement, que « le nom de bateleur peut être appliquer à tous ceux qui,
dans les relations d’une société plus relevé, apportent les prestidigitations
de la foire, et qui, grâce à la jactance, aux petites manœuvres des compères,
aux journaux, aux annonces, parviennent à se créer une réputation usurpée, à
attraper les niais de salon, plus nombreux peut-être encore que ceux de la
place publique. » Cependant ce mot qui est d’un si grand secours pour
l’allusion, est peu employé aujourd’hui. Il a été détrôné, ou peu s’en faut,
par un autre qui englobe tout mieux que
lui encore, si cela est possible, dans ses quatre syllabes avenantes et
dansantes, toutes les étonnantes variétés de parasites à qui le dieu de la
crédulité, de l’ignorance et de la badauderie donne chaque jour en pâture. Ce
mot est saltimbanque, mot générique sous lequel on confond maintenant toutes
ces classes d’amuseurs, de cabrioleurs et de dupeurs, qui avaient autrefois
leurs attributions sui généris, et qui maintenant -ô bienfait de la centralisation !- ne
forment plus qu’une seule et vaste
tribu.
Quel que soit aujourd’hui l’état misérable des bateleurs, et le peu
d’importance de leur rôle, il est certain que c’est par eux que commença notre
théâtre comique. Ils le prirent un gauchement à l’état embryonnaire, et quand
il fut né au bruit de leurs chansons graveleuses sur les tréteaux de la vieille
farce gauloise, ses pères nouriciers le
firent sauter et bondir dans ses langes plébéiens où ils pouvaient tout oser,
lui frottant le naseau d’une gousse d’ail, et lui donnant du vin à téter comme
le roi de Navarre à son petit fils Henri 4 . Certes ils ne lui enseignèrent ni
le beau langage, ni les grâces décentes ; trop souvent même, ils le
conduisirent au cabaret et dans les mauvais lieux ; mais après tout ils
lui apprirent à réfléchir sur ce mot de Pétrone , traduit, commenté par
Montaigne, et qu’un clerc sceptique et dégoûté, leur avait sans nul doute
répété en grignotant son pain sec trempé dans l’eau claire : tout le monde
joue la comédie ; le monde est un histrion. D’illustres farceurs
remplissaient alors, comme aujourd’hui la scène du monde, et le peuple méprisé,
n’avait pour se dédommager de leur insolence qu’une arme, arme terrible il est
vrai : la satire . Cette arme les bateleurs s’en emparèrent, et
s’abritant derrière le rire au gros sel et le coq à l’âne, derrière l’emphase
ridicule et la bouffonnerie ordurière, ils firent feu de leur plantureuse et
grotesque éloquence sur les grands qui mangent les petits, qui se laissent
manger par les grands ; ils firent les fous, les niais, pour avoir la
liberté de tout dire et tout oser, sans que cela tirât à conséquence ; ils
ouvrirent de grands yeux où brillait, pour qui savait voir, l’esprit gausseur,
narquois et badin de Jacques bonhomme ; ils s’élargirent la bouche,
s’allongèrent les oreilles, se rendirent laids et difformes à plaisir, afin de
dauber avec pleine licence sur les vices et les travers, regardant du haut de
leurs quatre planches, à travers leurs masques grossiers, le flux et le reflux
de la grande marée humaine, écrivant chaque jour à leur manière, le journal du
moment, chatouillant jusqu’aux larmes la fibre populaire. Oui, les bateleurs
ont cette gloire et cet honneur d’être les ancêtres de la comédie française. De
leurs rangs sont sortis des bouffons de
mérite, qui servirent de transition entre les jeux de la basoche et ceux de
l’hôtel de Bourgogne. Molière a rit de leurs parades, et il en a largement
profité. L’académicien St Amand et les poètes de son temps allaient entendre
assidument les bateleurs du pont neuf pour se former à l’éloquence. En France,
comme en Angleterre, comme partout sans doute, l’art de la scène éclot dans la
rue, le premier théâtre de Shakspeare et le premier théâtre de Molière se
ressemblent : un échafaudage, où l’on monte par une échelle, en fait tout
les frais. Molière et Shakspeare, pourquoi ne le dirait-on pas, furent d’abord
des bateleurs, imitèrent les bateleurs, arrachèrent aux bateleurs le grossier
vêtement de la farce, l’ornèrent de cent façons après l’avoir taillé et découpé
, et en firent une magnifique tunique, qui ne peut renier son origine
plébéienne. Sait-on tout ce que notre grand comique doit à ces trois histrions
célèbres : Gauthier Garguille, Gros Guillaume et turlupin, qui, avant
d’être des comédiens de l’hôtel de Bourgogne, avaient été des bateleurs de la
porte St Jacques ? Le petit Poquelin, âgé de douze ans à leur mort, avait
selon l’expression de M. Eugène Noël , recueilli un souffle de leur amitié, de
leur gaieté naïve et courageuse. Gros Guillaume, Gauthier Garguille et Turlupin
avaient commencé par jouer des farces de leur invention sur un théâtre portatif
dans un jeu de paume ; les comédiens de l’hôtel de Bourgogne, dont les
planches ressemblaient de si près à celle de la place publique, après avoir
longtemps souffert de leur concurrence, finirent par les engager dans leur
troupe. Nous pourrions multiplier les exemples . Mais n’a-t-on pas vu
suffisamment qu’on ne saurait faire l’histoire des bateleurs, sans toucher aux
origines de notre art dramatique ?
Si dès lors les histrions, bateleurs et paradistes, n’occupèrent que
des emplois inférieurs dans les théâtres royaux , les acteurs de grosses farces
ne disparurent pourtant pas. Héritiers des jongleurs et ménetriers ambulants,
ils travaillaient dans les carrefours, Paris n’ayant que très peu de place
publique avant Henri 4. Il fit beaucoup pur eux en achevant le Pont neuf en
1604,commencé sous Henri 3 en 1578, Il avait été suspendu pendant les guerres civiles.
Il fut occupé sur le champ par les paradistes, les jongleurs et les
charlatans. Brioché établit son théâtre de marionnettes dans une baraque qui
faisait l’angle du quai de Conti , en face du Pont Neuf , et qu’on appelait le
Château Gaillard. Une anecdote raconte que Cyrano de Bergerac passant sur le
pont eu maille à partir avec une bande de laquais formant le public des
amuseurs . Dans la bagarre le singe de Brioché s’en mêle et Cyrano prenant le
singe pour un laquais dans la confusion l’embroche. Brioché intente un procès
criminel à Bergerac, lequel riposte par des écrits facétieux ; il dit au juge
qu’il paiera Brioché en monnaie de singe ; Brioché sera débouté et se
verra même interdire de laisser vaguer le nouveau Fagotin, « crainte
d’accident ».
Les marchands d’élixir,
d’orviétan, de baumes pour les dents et pour les yeux, les charlatans de tout
genre s’installèrent sur les trottoirs et dans les demi-lunes. Au beau milieu
du pont, devant l’entrée de la Place Dauphine, en face du terre plein où plus
tard s’éleva la statue de Henri 4, Tabarin dressa son théâtre en plein
vent ; il était secondé par son gendre Gauthier-Garguille, par Mondor et
quelques autres. Le Pont Neuf devint la promenade favorite des badauds. Les
vaudevilles et refrains de Tabarin s’appellait les « Ponts Neufs ».
Mais ils allèrent trop loin et en 1634 le parlement les chassa du Pont Neuf et
renversa leurs planches.
En 1649, les libraires obtiennent un règlement interdisant les
boutiques portatives et l’étalage.
Les parades sur le pont neuf n’eurent plus lieu que les jours de fête
et les paradistes en troupe ne se montrèrent plus guère que dans les foires.
Ce fut après au tour du Palais Royal de continuer ses festivités. Puis
plus tard sous le second empire, le pont des Arts et d’autres ponts.
Il n’y eut similitude d’expression et de moyens entre la comédie
italienne et la pantomime muette qu’au début du séjour des acteurs italiens à
la cour de Charles 9. Ils jouèrent d’abord à la muette parce qu’ils n’étaient
pas en état de parler français. Mais leurs successeurs ne se privèrent pas dès qu’ils purent utiliser la parole. 100 ans
plus tard ils avaient leur théâtre privilégié comme l’avaient les comédiens
français.
Dès lors chaque fois qu’une troupe de saltimbanques et d’artistes
d’agilité voulut choisir des pièces mimées, ce fut contre elle une levée
d’interdictions. Les forains furent contraints, de gré ou de force, de s’en
tenir à leur genre habituel, acrobaties, tours de force, danse de corde etc….
D’année en année, de foire en foire, les démêlés sont continus entre
les spectacles forains où chaque artiste est un peu mime et les théâtres
privilégiés où les acteurs parlent plus qu’ils ne s’agitent. Des danseurs
peuvent danser sur la corde et non sur la scène ; ils peuvent chanter mais
la tête en bas et les pieds en l’air ou montés en seconde ou troisième position
sur les épaules d’un homme de force. Il n’est à cette époque, entre les troupes
de comédiens établies à demeure et les compagnies d’acrobates qui les imitent,
que différends, poursuites, saisies, condamnations, destructions de tréteaux et
de loges, reconstructions illégales, appels à la jurisprudence et au roi,
arrêts, sentences. Elles se multiplient, se complètent, se contredisent, ce qui
incite les jongleurs et les danseurs de corde à persévérer dans des activités
de bouffons et de mimes qui ne leur ont été jamais permises mais qui sont leur
raison d’être et d’exister. Si les bouffons des places publiques déguerpissent
rapidement pour éviter le pire, les troupes foraines qui s’installent à grand
frais doivent céder. Alard qui se trouve à la foire St Germain de 1710, joue
des « pièces à la muette ». Le public qui ne comprend rien réclame.
Alard utilise alors des écriteaux explicatifs…
Plus tard, les entrepreneurs forains traitent avec l’académie royale de
musique pour un privilège d’opéra-comique, privilège homologué enfin par un
arrêt du Conseil de régence, en 1717.
Plus tard sous l’œil protestataire des comédiens italiens et français ,
des nouveaux spectacles s’ouvrent à Paris. Ils y présentent des acrobates, des
jongleurs et des pièces plus ou moins mimées, plus ou moins dialoguées, c’est à
dire des imitations de scènes plus ou moins connues avec des interprètes
parodiant des types appartenant à toutes les conditions sociales.
Quand, au début de la révolution, les spectacles se multiplièrent sous
le régime d’une éphémère liberté des théâtres, les acrobates et les bouffons
qui n’avaient plus s’établirent dans une salle gardèrent les yeux fixés sur
ceux d’entre eux qui, partis des spectacles de la foire, avaient gravi tous les
échelons du succès.
Pour tous les faiseurs de tours, jouer la farce et la comédie, imiter,
parodier, mimer, c’est s’élever dans la hiérarchie des amuseurs populaires.
Mais les pouvoirs publics veillent et ce n’est pas toujours possible. En
frimaire, an 11 , une farce de Romagnesi, Samson, tragédie comique en cinq
actes et en vers, terminée par la destruction du Dragon qui n’est qu’un feu
d’artifice, est interdite par le préfet, au théâtre des arts de Rouen, parce
que sa place est sur les tréteaux du boulevard.
17ème et 18ème siècle, le lieu d’élection des
forains est le pont neuf.
Les saltimbanques participent à toutes les fêtes. Après le sacre de
Louis 15, parmi les divertissements qui lui furent offerts à Villers - Cotterêts
figurait une foire où l’on vit un bohème attirer l’attention du roi et lui
expliquer les différentes propriétés des secrets qu’il possédait et dont il lui
remis d’ailleurs la liste. A partir de 1764, La foire St Ovide sur la place
Vendôme ouvrit un nouveau champ d’action.
Ce n’est qu’au 18ème siècle que sont réinventés les cirques
de la décadence romaine . On sait que les romains de la décadence complétaient
leurs jeux du cirque par des présentations d’animaux dressés à des exercices
d’équilibre, de sauts, et autres. De la même manière, c’est en incorporant des
sauteurs, des acrobates, des danseurs de corde, des dresseurs à un spectacle reposant
essentiellement sur les jeux équestres, puisqu’issu des tournois militaires,
que Philippe Astley inventa en 1770, à Londres, le cirque moderne.
En 1774, Astley vient donner des représentations à Paris. Il s’associe,
en 1783, avec un italien installé en France, Antonio Franconi, baladin,
montreur d’oiseaux dressés. Franconi sera le père du cirque français.
En 1768 le cirque né , avec Philip Astley. Essentiellement basé sur des
jeux équestres, il associe une compagnie de danseurs de corde, de sauteurs et
même un clown.
Héritier des bateleurs du Moyen âge, les forains, en lui offrant
certains de leurs numéros, ont apporté au cirque une partie de ses éléments
constitutifs.
Ces « banquistes » conservent intactes les traditions
héritées de nos ancêtres les saltimbanques. Suscitant notre admiration et notre
étonnement, ils cherchent à nous faire oublier pendant quelques heures nos
soucis. Cela aussi, ils l’ont légué aux gens du voyage qui promènent leurs
cirques sur les routes du monde entier.
Le cirque dont les principaux numéros au début relevait de l’équitation
et de prouesses acrobatiques à cheval, introduisit un jour un cheval savant et
de là le dressage de différents animaux commença.
Les témoignages sont hélas rares sur ce qu’était leur vie en France
tout au moins et avant le 18ème siècle. Il semble toutefois que
depuis le Moyen âge ils avaient commencé à s’organiser et c’est chez eux
également que le cirque allait trouver son deuxième élément constitutif :
les exercices de force et d ‘adresse de ceux que l’on désigne
désormais sous le nom générique d’acrobates (le mot est d’origine
grecque et signifie « celui qui marche sur la pointe des pieds »).
Non seulement la Grèce et Rome, mais la Chine et le Japon, l’Inde et l’Egypte
ancienne ont eu leurs acrobates.
En Inde, les spectacles occasionnels ou réguliers étaient annoncés une
semaine auparavant par un batteur de tambour qui parcourait la ville. Et
pendant qu’à la cour, les nobles et les dignitaires se livraient aux spectacle
raffiné des danses et des concerts, le peuple se divertissait à regarder les
acrobates, les illusionnistes, les montreurs d’animaux dressés, les danseurs et
chanteurs populaires. Les acrobates étaient des enfants de la balle ; une
longue écharpe flottante était le signe de leur profession, comme pour les
danseurs. Ils opéraient au son d’un orchestre dont les gros tambours oblongs
portés en bandoulière, les flûtes aigrelettes et les clarinettes perçantes se
mêlaient aux cris des bateleurs qui engageaient la foule à venir assister aux
prouesses de leurs camarades. Un de leurs tours consistait à former une haute
pyramide humaine, dont l’image nous a été transmise depuis le 2ème
siècle av. J.C. sur un bas relief provenant de Bhârhout et conservé au musée
d’Allahâbâd. Quatorze acrobates la composent ; sept d’entre eux, élevant
les mains au dessus de leur tête, en supportent quatre autres ; ceux-ci
tiennent à pleines mains les pieds et les chevilles de deux hommes qui
soutiennent à leur tour un jeune garçon, sommet de l’édifice. Ce bas relief
ayant orné la balustrade d’un monument bouddhique, on peut se demander s’il
s’agit d’une représentation profane ou si cette troupe, tel le jongleur de
Notre - Dame, venait distraire la personne du Boudha tout en lui faisant
l’hommage dont elle était capable. Et l’on peut évoquer à son sujet les
acrobaties encore exécutées par les comédiens populaires du Bengale actuel.
Acrobates aussi les danseurs aux javelots, jouant simultanément avec
quatre ou cinq de ces armes dangereuses, les danseurs de corde, les
équilibristes qui, retenus par des crampons fixés à leurs chaussures, se
promenaient sur une perche en forme de T.
Les illusionnistes ne pratiquaient pas seulement devant la foule
populaire mais aussi à la cour. Une crainte mêlée de respect les entourait, car
ils prétendaient posséder une science égale à celle des « saints
hommes », des ascètes (yogin). Leur tour le plus classique comme le plus
apprécié –encore de nos jours- consistait à faire d’abord apparaître un
manguier sortant d’un noyau ; l’arbuste grandissait à vue d’œil. Lorsqu’il
avait atteint la taille d’un arbre, le maître prestidigitateur lançait une
corde en l’air et elle semblait s’accrocher à l’une des plus hautes branches du
manguier. La corde demeurant roide, un de ses comparses la saisissait et
« montait dans l’arbre », disparaissant à la vue des spectateurs. Peu
après, ses membres tombaient un à un sur le sol, où le magicien les
rassemblait, leur redonnait la forme d’un corps humain qu’il aspergeait d’eau.
Ressuscité, l’aide du « Saint homme » se paraît alors de fleurs et
exécutait une danse.
Les mimes –danseurs avaient, eux aussi, autant de succès à la cour qu’à
la ville. Une de leurs spécialités était la danse du mi- jeu, où seuls
remuaient un pied, une main, un œil, un sourcil, une narine et la moitié de la
bouche, tandis que le reste du corps demeurait rigide. Ce tour avait la
réputation de provoquer le rire même chez les plus moroses.
Les montreurs d’animaux dressaient surtout des singes et des
mangoustes, ces dernières étant destinées à lutter contre les cobras. Un autre
spectacle aussi était fréquent dans les rues, généralement près d’un
carrefour : un montreur d’images plantait deux bambous en terre, tendait
entre eux une toile peinte et, armé d’une baguette, en commentait les illustrations ;
celles-ci représentaient les combats mythiques, les dieux, divers schémas
cosmologiques, des légendes.
Il y avait aussi les montreurs de marionnettes.
Non seulement le cirque n’a jamais abandonné les acrobates, mais leur
rôle n’a cessé de grandir à mesure que leurs exercices devenaient plus
spectaculaires.
L’antiquité formait déjà des sauteurs, les saltimbanques les ont
conservés, les cirques leur ont donné une place prépondérante puisque, il y a
une cinquantaine d’années, tous les artistes gymnasiarques des cirques
ambulants étaient tenus par contrat de figurer au final et d’y exécuter des
sauts périlleux désignés par les Italiens ou les Allemands sous le nom de salto
mortale. En effet un saut de cette espèce, s’il est manqué, peut être mortel. Les
banquistes d’antan s’y entraînaient dès leur plus jeune âge et très
progressivement sous la direction de leurs parents, de leurs aînés ou de leur
«père d’élève » (terme de métier par lequel on désigne un artiste qui
enseigne le métier à un plus jeune).
Les acrobates en colonnes relève aussi de l’art du tapis. Les troupes
marocaines actuelles descendent-elles des «Egyptiens » dont la tradition
veut qu’ils aient été les réalisateurs des pyramides humaines dont un tableau
de Guardi, «le doge assiste aux fêtes du jeudi gras », conservé au
musée du Louvre, nous a, entre autres, laissé l’image ?
Il est intéressant de noter qu’aux Etats Unis, l’auberge ou inn resta
longtemps un centre d’activité pour montreur d ‘automates, physiciens et
prestidigitateurs, et autres attractions foraines.
En outre il ne faut pas oublier que, pendant des siècles, même les plus
célèbres artistes – surtout des artistes ambulants – vivaient en marge de toute
vie sociale. Ces raisons firent que ce monde constitua une sorte de franc-maçonnerie,
et comme l’a d’ailleurs noté Henry Thétard, «nombre de ces banquistes furent
affiliés aux Rose – Croix et à la franc-maçonnerie ». Il est intéressant
de noter qu’en Angleterre, les music - houses et les petits théâtres, qui
accueillaient des troupes ambulantes et des forains de tout genre, sont placés,
en 1751, sous le contrôle du « Disorderly houses act », c’est à dire
la loi concernant les maisons closes.
Impossible de reconstituer intégralement les annales de ces familles
foraines : dispersion des documents à cause des longues étapes,
orthographes variées et fantaisistes, habitude de nommer l’artiste par son
prénom. Les renseignements peuvent venir de documents officiels (acte de
naissance, décès, plaintes procès, privilèges, registres de foire).
L’adoption par les danseurs - acrobates, voire les mimes, des personnages
de la comédia dell’arte profitait d’un autre atout : celui d’être
immédiatement compréhensible dans n’importe quel langage, le public
reconnaissant d’emblée chaque acteur et le mobile de ses actes.
Les hommes forts ou hercule deviennent d’importantes attractions
foraines vers la fin du 18ème ; il auront leur apogée au cirque
et dans les foires au Second empire ; ils jonglent avec des boulets de
canon, soulèvent un char supportant une dizaine de personnes et un canon, ou
bien soutiennent sur leurs muscles abdominaux un plancher où on pris place un
cheval et des personnes choisies dans l’assistance. L’hercule Laroche soulevait
sur son dos un char avec 16 soldats assis et un associé brandissant des
drapeaux au-dessus-d’eux.
Le citoyen Danton :
« Citoyens ! j’apprends qu’on veut empêcher les joueurs d’orgue de nous
faire entendre par les rues leurs airs habituels , trouvez - vous donc que les
rues de paris soient trop gaies. »
Il semble qu’au temps de la monarchie, le peuple ait voulu placer avec
constance le théâtre de ses divertissements sous les fenêtres de ses
rois : 1500, rue St Antoine (le roi est aux tournelles ) ; 16OO
place Royale, 17OO pont Neuf, 18OO Palais Royal.
Il importe de noter au passage, que pendant des siècles, les
différentes classes sociales ont été beaucoup plus mélangés qu’elles ne le
seront par la suite. Jusqu’à Louis 16, la ségrégation est verticale, magasin au
rez - de- chaussée, boutiquiers à l’entresol, gentils - hommes ou riches
bourgeois aux étages nobles et artisans et ouvriers dans les combles. Mais les
habitants d’un même immeuble peuvent se croiser dans les escaliers ou dans la
cour, et il suffit de descendre dans la rue pour s’amuser au faubourg St Antoine
ou à la Place Royale.
A la restauration, les boulevards intérieur de la Madeleine à la rue
des Filles du Calvaire, le Boulevard du Temple qu’on appelle Boulevard du Crime
à cause des mélodrames sanglants qu’on y joue, une demi-douzaine de théâtres s’y
côtoient, ont récupéré les bateleurs, illusionnistes, escamoteurs. Les foires
ayant pour la plupart périclitées. Sous des baraques de bois ou des tentes de
toile, ils vont abriter leurs animaux curieux, leurs acrobates ou leurs
phénomènes. A l’entrée des théâtres va se perpétuer la comédia dell’arte et le
succès des arlequinades, avec Bobèche, Galimafré, Gringalet et Faribole.
C’est au 19ème siècle où l’on écrit l’histoire de
l’histoire, qu’un intérêt soudain se fait jour en faveur des originaux de toute
espèce, et que s’en dressent des nomenclatures. Dès 1811, Gouriet publie
ses « Personnages célèbres dans les rues de Paris », qu’il
classe en trois catégories : les personnages imitateurs, où l’on trouve
des farceurs et des charlatans, mais aussi Cagliostro et Paracelse, sans parler
d’un certain nombre de brigands de grand chemin ; des personnages
d’imagination, qui appartiennent pour la plupart à la comédie italienne ;
des personnages vivants enfin, parmi lesquels des petits marchands ambulants et
des bateleurs, faiseurs de tours, équilibristes, etc., fort nombreux sur les
boulevards.
Cinquante ans plus tard, Charles Yriarte, écrivain, critique d’art et
dessinateur au Monde illustré, fait paraître ses célébrités de la rue, qu’il
illustre avec le portrait de ses personnages. Dans la préface il rend hommage à
son prédécesseur, dont l’œuvre, très curieuse et qui venait trop tôt, n’a pas
eu le succès qu’elle méritait, et il ajoute ses mots : « Demain, il
serait trop tard pour écrire un pareil livre : les ingénieurs sont venus,
la cour des miracles est expropriée pour cause d’utilité publique. Adieu la
gaieté de nos places, adieu les vêtements bariolés, les chansons étranges, les
dentistes en plein air, les musiciens ambulants, les philosophes, les
bâtonnistes, les maniaques, les visionnaires, les vielleuses, les bouquetières.
Je vous jure, messieurs les édiles, que Paris s’ennuie ; il a la nostalgie
du pittoresque. »
Le chariot de thepsis
Le décret de 1807 réduisant à huit le nombre des théâtres, et le
règlement de 1807 organisant leur exploitation en province et leur assignant un
genre déterminé, laissaient toute latitude aux troupes foraines de se
multiplier, mais les obligeaient à se contenir dans la branche des spectacles
dits de curiosité (funambules, danseurs de corde, illusionnistes,
marionnettistes, etc.) dans lesquels aucun personnage « visible au
public » ne devait parler. Nulle salle ne put, dès lors, ouvrir sans une
autorisation ministérielle. Les « jeux forains » dont l’appellation
s’applique aux troupes d’acrobates ambulants dépendent des autorités de police
et des préfets, et ne doivent leur séjour momentané qu’à une tolérance de fait
, révocable à merci. Tous les spectacles d’acrobates ont été supprimés.
Du temps de Napoléon
les hommes orchestres et les artistes de rue , il y a toute une tradition sur
les grands boulevards . Napoléon avait autorisé à ses soldats d’augmenter leur
solde en faisant l’homme orchestre.
Les grandes foires furent, en Europe et jusqu’au milieu du 18ème siècle, une nécessité économique sans
laquelle le commerce international aurait à peine existé. Le privilège
d’organiser une foire, de prendre possession de son emplacement, de louer des
échoppes aux marchands locaux et étrangers, aux opérateurs, charlatans et
arracheurs de dents, aux limonadiers, aux restaurateurs et aux amuseurs en tout
genre, était accordé par le roi, ou par
un grand royaume, à un ordre religieux. En France, en Angleterre, en Russie ,
beaucoup accueillaient les gens du voyage. En Italie, dans les pays scandinaves
et aux Pays Bas, les foires étaient moins importantes. Mais les théâtres
italiens comme la Scala de Milan, engageaient des troupes foraines,
particulièrement à l’époque du carnaval et du carême. Les théâtres bruxellois
ouvraient également leurs portes aux gens du voyage.
A Paris, le spectacle de la foule d’amuseurs sur le Pont Neuf et aux
alentours avait lieu toute l’année, jusqu’au moment où tout ce monde se
transporta boulevard du Temple, célèbre par les spectacles de tout genre qu’il
commença à attirer vers 1750. Mais les spectacles forains avaient à lutter
contre les grands théâtres comme en Angleterre.
De même que les acrobates, les montreurs de marionnettes et d’animaux,
les funambules, les faiseurs de numéro de force et d’adresse ainsi que les
acteurs parlants, du simple valet de parade jusqu’à la compagnie complète de
comédiens et opérateurs, les arracheurs de dent et charlatans sont
particulièrement recherchés. Ces messieurs sont l’obsession de la faculté, bien
que la médecine officielle, avant la dernière moitié du 18ème
siècle, se distingue difficilement des procédés et remèdes charlatanesques.
Dans les histoires du vieux Paris, on a relevé les noms d’innombrables curatifs
prônés par la médecine foraine : baume, huile et même des remèdes antiécliptiques
et anticométiques, contre les maladies prophétisées par les éclipses et surtout
par la comète de 1664.
Les italiens jouissent alors, en tant que médecins (vrai ou faux) d’une
grande réputation. Leurs spectacles prennent de l’importance au cours du 17ème
siècle, et en 1760, le grand chorégraphe Noverre pourra écrire :
« ……Les farceurs et les marchands d’orviétan comptent plus sur la vertu de
leurs ballets que sur celle du baume ; c’est avec des entrechats qu’ils
fascinent les yeux de la populace ». Ils prétendent avoir guéri les têtes
couronnées de lointains pays ; un singe, souvent, accompagne leurs
équipes, pour émerveiller de ses acrobaties la foule des badauds.
Le tableau de paris , de Mercier : chroniques du
18ème.
Forain : marchands et bateleurs de toute sorte qui fréquentent les
foires. La véritable étymologie c’est foras qui signifie «qui est étranger, qui
vient du dehors ». Si haut qu’on remonte dans l’histoire, on trouve en
effet, chez tous les peuples, des individus isolés ou même des groupes
d’individus, impatients de toute règle et de toute contrainte sociale, qui
usent leur vie à voyager de pays en pays, s’arrêtant à peine quelques semaines
au même endroit pour exercer une industrie primitive (forge, étamage) ou donner
des spectacles rudimentaires. Ou qu’ils aillent ils sont toujours du
dehors ; ils sont toujours des étrangers, avec leurs coutumes bizarres,
leur insouciance fataliste, leur horreur du travail régulier, leur irrespect du
bien d’autrui, leur amour du bruit, des oripeaux, du clinquant. Ils parlent
toutes les langues, s’assimilent toutes les civilisations ; ils n’ont
point de patrie, point de home. Leurs villes sont des bourgades de toiles, de
mâts, de chariots, de planches, qu’ils élèvent et qu’ils détruisent en peu d’heures.
Ils sont bien les descendants ataviques des races qui, aux premiers âges de
l’humanité, parcouraient, sans autre but que l’attrait de l’inconnu, les forêts
immenses et les steppes désolés avec leurs tentes et leurs bêtes.
Dans l’Inde, rien de plus commun, depuis des temps immémoriaux, que les
jongleurs vagabonds, les ménétriers errants faisant danser sur un rythme
étrange des fillettes lascives, les charmeurs de bêtes, les danseurs du diable,
les diseurs de bonne aventure, les thaumaturges, les vendeurs de recettes
contre toutes les maladies. Terre classique de la magie, berceau des sciences
occultes, l’Inde a produit naturellement le merveilleux comme une des fleurs
prodigieuses de son sol, dont les effluves semblent s’être répandus sur le
monde en suivant de mystérieux courants.
Il convient de remarquer qu’il n’existe pas un peuple du voyage mais
deux : Les banquistes et palquistes d’une part, les romanis d’autre part.
Les premiers précèdent les romanis pour ce qui est de l’exploitation du
spectacle ambulant. Les premières traces d’un peuple du voyage remonte à
l’antiquité. Les jongleurs, bateleurs et danseurs de corde qui se mettent à
parcourir l’Europe après la chute de l’Empire romain, sont les premiers
banquistes. Qui sont-ils ? d’après Henry Thétard, des gens extrêmement
divers : des amateurs de liberté et de vie errante sans doute –quel que
soit le prix de cette liberté- des gentilshommes ruinés- et on pense à quelques
belles légendes dont celle du Capitaine Fracasse – vraisemblablement quelques filous
en rupture de justice et qui trouvaient dans la vie du voyage la possibilité de
s’exiler tout en continuant à fréquenter la société et en étant à l’abri de la
police.
Les saltimbanques conciliaient souvent l’art et la vente :
Pradier, le bâtonniste, s’intitule le premier jongleur de cannes de
l’Europe ; c’est pourquoi les tambours majors regardent ses évolutions
avec envie ; il a à son répertoire le tour de cannes, des assiettes, des
saladiers, du petit et du gros gobelet, le paratonnerre, le fléau, la pique et
ses douze anneaux, la carte volante et enfin ses six principes pour mettre
l’argent dans sa poche, qu’il a exécuté devant Napoléon 3, lequel lui a accordé
le monopole de la place de la Madeleine. Quand il a terminé ses tours, Pradier
offre aux spectateurs pour les remercier 3 numéros de loterie.
Mangin, le marchand de crayons, apparaît à la foule dans un char
étoilé, le chef couvert d’un cimier scintillant au soleil, cependant que son
acolyte vert de gris, taquine l’orgue de Barbarie. Avec des façons de
charlatans, il harangue l’assistance, la subjugue, prépare ses effets, fait
durer les silences. Son boniment terminé et ses crayons vendus, Mangin ôte sa
cuirasse, sa robe d’or et de brocart, son casque, et, descendant de sa voiture,
vêtu cette fois comme un notaire, se dirige vers le marchand de vin voisin.(19ème
)
En avançant dans ce travail, nous ne pouvons oublier que bateleur a de
nombreux synonymes, qui ne remplacent pas il est vrai ce mot, mais qui en
sont comme autant de rameaux vivaces,
ayant chacun une existence reconnue, et que faire ici de l’histoire du groupe
tout entier, ce serait empiéter sur certains mots qui réclament de nous une
mention spéciale. Renvoyons à baladin, charlatan, farceur, opérateur,
parodiste, etc…..l’ensemble de ces articles formera réellement l’histoire du
batelage, complétée encore par la biographie particulière de tous ces joyeux
compères qui ont conservé parmi nous la tradition du rire et de l’esprit
gaulois, tel que Bruscambille, Gauthier garguille, Gros guillaume, Turlupin,
sans oublier les Barry, Les Bobèche, Les Galimafré, les Mondor, Les Tabarin,
Les Taconnet et autres pitres, saltimbanques, grimaciers, diseurs de sornettes,
grands hommes du ruisseau et de la place publique, passés maître en l’art de la
bouffonnerie, de la parodie, de la hâblerie, dont la liste immense débute avec
le monde et se terminera avec lui, si toutefois les règlements de police ne s’y
opposent. Hélas ! et d’un mot nous voilà triste, quels temps peu propices
aux comédiens de la place publique sont les nôtres ! Aujourd’hui que tout
est réglementé, administré, patenté, les libres paroles n’éclatent plus, salées
et pimentées, comme jadis, sur la place publique ou sur les champs de foire.
Ombres de Grattelard, de Gilles le niais, de Padelle, de Jean Farine, de
Gringalet, de Guillot-goriu, de Goguelu et de tant d’autres, voilez-vous la
face, vous ne pourriez plus aujourd’hui grâce au progrès, rien trouver à dire
de spirituel sur nos modes, nos préjugés et le reste. On a fait de nous des demi-dieux,
alignés au cordeau, dont vous ne trouveriez rien à dire ; nous sommes
parfaits et vos épigrammes s’émousseraient
sur le tricorne des agents de la force publique , qui n’entendent
plus raillerie. D’ailleurs, on a exproprié pour cause d’utilité publique, tous
ces bons endroits où vous faisiez merveilles ; on a macadamisé le pont
neuf et jeté bas les halles- les halles où Herpinot brillait devant la populace
grouillante. Où sont maintenant les foires St Germain, St Ovide, St
Laurent ? La foire du St Esprit, qui se renouvelait tous les lundis sur la
place de la Grève, et la foire de Bezons, où l’on allait en partie
fine ;la foire St Clair, qui s’échelonnait le long de la rue St Victor,
celle que ramenait le 24 août devant les galeries du palais de justice, et tant
d’autres où toute la confrérie de bohème, que l’on écoutait à gueule bée,
déployait ses plus fiers oripeaux, ses plus éclatantes fanfares et ses coq à
l’âne à tout rompre, dites, où les
retrouverez-vous ?et ces pages, clercs, écoliers, laquais, archers, filous
, bourgeois, tireurs de laine, chambrières,
gentil - hommes, grisettes, poètes crottés et académiciens, toujours
prêts à vous ouïr, toujours avides de vos grimaces et de vos saillies, Où sont-ils ?…..Le dernier des vôtres a
risqué une dernière allusion qui vous en dira bien sûr assez : « Les
rassemblements au nombre de plus d’un sont interdits. » Et puis , si vous
reveniez , ô farceurs de génie, dont le vent dispersait chaque jour les
étincelles, il vous faudrait faire viser votre esprit huit jours d’avance par
la commission d’examen, et vous munir d’une médaille frappée à la rue de
Jérusalem……..Un siècle chasse au loin ce
que le siècle précédent admirait.
Les mœurs changent, le langage s’épure, dit-on parce ce que la verve
s’en va : l’argot s’étale, il est vrai, comme un chancre rongeur sur
l’idiome sensé et coloré des ancêtres ; mais le mot gras, le mot salé, le
mot concis, plein et robuste, qui va droit au but et dit ce qu’il veut, ce mot
de la farce, engendré d’un jet au pays de batelage ; ce mot plantureux,
qui renferme toute la sève nationale, ce mot atteint d’atrophie et de chlorose, s’est mis en
quarantaine. Nos pères ont vu et applaudi les derniers bateleurs dignes de ce
nom, en la personne du père Rousseau, de Louis le Borgne, de Gringalet, 2ème
du nom, de Faribole, de Bobèche et de Galimafré lesquels furent plus
particulièrement des parodistes, variété du genre bateleur. Nous avons vu, nous
par grâce dernière, quelques charlatans, le marchand de crayons Mengin et le
dentiste Duchesne ; mais c’est la menue monnaie des célébrités du Pont
Neuf. L’inventeur de la poudre personne, le grand Miette a été de nos jours, le
seul héritier de toute cette joyeuse bande dont Tabarin est l’aïeul :
l’ombre de Brioché lui avait souri.
Donc l’art du batelage est tellement dégénéré, qu’on est presque tenté
d’affirmer qu’il a disparu. Quelques rejetons de cette végétation sauvage qui a
préparé notre théâtre et vécu ensuite à son ombre se montrent encore, les jours
de fête sur la place publique de nos petites villes; ces jours là quelques
familles de saltimbanques font avec la permission de M. le Maire, sonner le
porte voix et grincer les cymbales ; ces saltimbanques nomades , derniers
et obscurs vestiges d’une race curieuse et forte, forment encore une classe
nombreuse, qui comprend toutes les variétés autrefois désignées sous le nom
générique de bateleur tels que : bouffons, pitres, paillasses, faiseurs de
tours, écuyers, jongleurs, escamoteurs, danseurs de corde, charlatans, monteurs
d’animaux etc…Ordinairement très malheureux nos modernes bateleurs vivent au
jour le jour, travaillant isolément ou réunis en troupe sous la direction d’un
entrepreneur……
Autrefois le saltimbanque était le propriétaire le plus riche de la
capitale ; toute les places de la grande ville lui appartenaient ; il
y campait, il y installait ses pénates, il y dormait et la nuit si l’envie lui
en prenait, il pouvait se livrer à des rêves sardanapalesques et se croire
transformé en marquis de Carabas. Quand il voyageait, plus heureux que Danton,
il emportait sa patrie à la semelle de
ses brodequins. Depuis 10 ans les choses ont changé les places publiques ont
été transformées en squares où la population respire le soir un air purifié. Y
avons- nous gagné ? Hippocrate dit
oui, mais Galien dit non. Et le grand dictionnaire quoi qu’il est dit plus haut
dans un accès de sentimentalité, est de l’avis d’Hippocrate.
Nos anciens saltimbanques
seraient à l’origine de biens des choses le théâtre, l’opéra, le music-hall, le
cirque.
En somme, depuis l’origine jusqu’à nos jours, les forains n’ont guère
varié leurs exercices, et c’est toujours la même énumération monotone qu’il
nous faut reproduire, comme si la foule de tous les temps était identique et
s’amusait des mêmes spectacles simples et enfantins.
Et cela est vrai des pays les plus différents comme mœurs et comme
climat. Ainsi au Japon et en Chine, on retrouve tout comme en Europe les
hercules qui jonglent avec des balles de riz au lieu de poids, ou forment des
pyramides humaines, les lutteurs, les jongleurs, les prestidigitateurs, les
équilibristes, les diseurs de bonne aventure, les astronomes populaires, comme
aussi les marchands de mort aux rats, de beignets, de glaces frites, de
confiseries.
C’est toujours l’attrait de l’inconnu qui nous pousse, le désir de
contempler une chose rare, l’ambition de dérober au destin son secret, et les
multiples déconvenues ne nous découragent point. « Enferme 20 pieds carrés
d’un rouleau de toile et publie seulement que tu caches une merveille, tout le
monde la voudra voir. » (E. Ourliac.) C’est sur ce sentiment bien humain
que spéculent beaucoup de forains, et ils en profitent pour ne nous rien
montrer.
Le cinéma remplaça les grandes foires foraines, les numéros qui
s’effectuent dans les baraques du boulevard ou au music hall peuvent être vu
sur l’écran.
Au début du 20ème siècle fourmillait tout un tas de pauvres
gens qui exerçaient des métiers de misère. Ces gens là vivaient de la rue et
peuvent être admis dans la grande famille des bateleurs.
Chaque génération a eu son homme orchestre, avec sa flûte de pan fixée
au menton, son chapeau chinois à grelots sur la tête, sa grosse caisse sur
l’abdomen, sa mandoline dans les mains et ses cymbales entre les genoux ;
suivant les époques, le costume connaît des variantes : le pipeau ou le
double flageolet remplacent la flûte, une petite harpe se substitue à la
mandoline ; parfois aussi une cantatrice compose la partie vocale du
concert. Quant à l’homme à la clarinette, tout son art consistant à faire en sorte
qu’on l’en dispense ; on raconte ainsi l’histoire de cet industriel du
macadam qui a l’habitude de
s’arrêter devant un café plein de monde et fait mine de porter à ses lèvres le
bec d’une énorme clarinette, aussitôt, les consommateurs épouvantés se hâtent
de lui jeter quelques monnaies.
Faisons un petit tour du monde et du temps :
Les adeptes de la confrérie des ‘Aïssaoua en Algérie, dans une
cérémonie pour la fête patronale, les spectateurs assistent à la séance qui se
déroule en deux parties. La récitation de l’office et les exercices, séparés
par une pause.
Nous parlerons de la seconde partie, la danse extatique. Quatre hommes
se lèvent et se mettent à danser en se balançant de droite et de gauche, le
torse et la tête penchés en avant. Ils évoluent d’abord lentement, puis avec
une rapidité plus grande, entre l’orchestre composé de flûtistes et de joueurs
de tambourin et un brasero sur lequel ont été placés des sabres à double
tranchant, des tiges de fer pointues et de longues épingles d’acier.
A un certain moment, les spectateurs, plus ou moins impressionnés,
remarquent un homme qui saisit un sabre rougi au feu, le fait tournoyer, puis
se le passe sur le ventre, sur la gorge, tandis que d’autres initiés se
laissent enfoncer des épingles dans les muscles des épaules, des bras, du
ventre, dans les lèvres, les joues et les oreilles. Au bout d’un instant, le
chef de la confrérie qui assisté de quelques desservants, dirige la cérémonie
retire les fers, passe le doigt sur la blessure instantanément cicatrisée. Ils
voient également d’autres danseurs se précipiter vers le brasero, en retirer un
charbon ardent et le porter à leurs lèvres, danser ainsi pendant quelques
secondes, puis s’abattre, secoués de frisson, la tête contre terre.
Brusquement, les tambourins qui ont accompagné tous ces exercices, cesse de
battre. Les danseurs restent couchés ou s’assoient. Alors ils entonnent un
chant grave et confiant qui ressemble à un hymne de délivrance, de triomphe.
En Birmanie, au Cambodge et au Laos excitait des troupes ambulantes.
Jongleurs, acrobates, funambules, montreur d’animaux, conteurs, acteurs nomades
divertissaient au Japon. Les Japonais en étaient très friands et le sont
encore.
A Rome, les jeux scéniques se confondaient avec les jeux de
l’amphithéâtre, exhibitions de funambules ou de prestidigitateurs.
Au Moyen Age, la représentation qui se déroulait primitivement devant
l’autel lui même, puis s’est transporté sur le parvis, devant le portail ou le
narthex, ou encore sur la place publique, exigeait une participation de
l’auditoire en ce sens qu’on s’adressait à son imagination.
Les automates et la prestidigitations se combinent souvent, avant qu’au
18ème siècle s’ajoutent aux répertoires les découvertes de
l’électricité et les expériences des physiciens. Les automates sont déjà bien
connus en 1722 : le jugement universel mêle androïdes et figures peintes
sur le boulevard du temple et le Turc mécanique sert des épiceries au comptoir,
à la foire St Germain.
La physionomie de la ville jusqu’à la moitié du 19ème siècle
sera consacrée à ces plaisirs de plein air, jusqu’à ce que le prix du terrain
nécessite d’autre rentabilité. Au milieu de ces jardins, s’élevait un café. Le
Tivoli, dans un décor de treuillages, propose des funambules, acrobates,
charlatans, écuyers, danseurs tandis que les spectateurs consomment. Au centre il y avait une piste de danse.
Les ancêtres des jongleurs ? les mimes et les histrions que la
chute du théâtre vers le 5ème siècle, avait privés de leur emploi,
et les bardes ou « harpeurs » germaniques attachés aux armées ou à la
personne des princes.
Les jongleurs chantaient, en s’accompagnant d’un instrument de musique
(surtout la vielle), des poésies lyriques ou épiques (chansons de geste). Plus
tard, ils récitèrent des poésies badines (fabliaux). Ils étaient aussi
acrobates, montreurs de bêtes savantes, etc. Ils animaient les tournois.
( Les saltimbanques célèbres du
18ème et 19ème voir le livre de Jacquin)
Les funambules existaient déjà du temps des romains. L’art des danseurs
de corde remonterait même à l’an 1345 avant Jésus-Christ. On cite des
funambules qui sont restés célèbres. Le fameux Archange Zuccaro, qui a donné
des règles à la funambulie sous le règne de Henri 3 et Henri 4. Blondin,
traversant les chutes du Niagara.( Jacquin p. 76 à 81)
Le mime : On suppose que l’inventeur de cette forme théâtrale fut
le poète grec Sophron, de Syracuse (environ 5ème siècle).
Littérairement le genre ne se distinguait de la comédie que par la familiarité
du style et de la langue, le nombre des personnages réduit à l’essentiel, deux
ou trois, qui reprenaient en les amplifiant, en les ridiculisant, les travers
de leurs contemporains.
A Rome le mime changea de formes et de contenu. La peinture de mœurs y
prit plus d’importance.
En parlant peu, ou pas du tout, les mimes échappaient à des sanctions
qui les eussent empêchés d’exercer leur profession
Acrobate : 18ème, emprunté du grec akrobatos, dérivé de
akrobatein, «marcher sur la pointe des pieds. »
comme on pourra en juger par le spécimen suivant : « Otez vos
chaperons, tendez les oreilles, regardez mes herbes que madame envoie en ce
pays et en cette terre ; et pour ce qu’elle veut que le pauvre en puisse
avoir aussi bien que le riche, elle me dit d’en faire bon marché, car tel a un
denier en sa bourse qui n’a pas cinq livres. Et elle me commanda de prendre un
denier de la monnaie qui aurait cours dans la contrée où je viendrais. Je les
donne aussi pour du pain, pour du vin à moi, pour du foin, pour de l’avoine à
mon cheval, car qui sert l’autel doit vivre de l’autel. – Et j’ajoute que s’il
y avait quelqu’un de si pauvre, homme ou femme qu’il ne pût rien donner, qu’il
vienne à moi, je lui prêterai l’une de mes mains pour Dieu, l’autre pour sa
mère, à condition que d’ici à un an il fasse chanter une messe pour l’âme de ma
dame. Ces herbes, vous ne les mangerez pas, car il n’y a si gros bœuf, ni si
vigoureux destrier qui ne mourût de mâle mort, s’il en avait seulement gros
comme un pois sur la langue, tant elles sont fortes et amères ; mais ce
qui est amer à la bouche est doux au cœur. Vous les mettrez dormir trois jours
dans du bon vin blanc ; si vous n’avez pas de vin blanc, prenez du
vermeil, et, si vous n’avez pas de vermeil, prenez de la belle eau claire, car
tel a un puits devant sa porte qui n’a pas un bon tonneau dans son cellier.
Vous en déjeunerez pendant treize matins. C’est en cette manière que je vends
mes herbes et mes onguent ; celui qui en voudra qu’il en prenne, et celui
qui n’en voudra pas qu’il les laisse. » (Rutebeuf). Nous avons supprimé à
dessein les quolibets énormes et les obscénités qui agrémentent ce discours.
Enfin il y avait les menestrandies, véritables bandes organisées, comprenant
des poètes, des musiciens, des saltimbanques, des farceurs, des chanteurs, qui
faisaient des tournées sur tout le territoire et à l’étranger.
Un jongleur n’était-il pas ou poète, ou saltimbanque, ou
musicien ? et encore « Pour quelle époque la définition
vaut-elle ? Convient-elle à tout le Moyen _ âge ? Ou bien faut-il la
réserver à un instant particulier de l’histoire ? »
Nous adopterons comme définition provisoire jongleurs tous ceux qui
faisaient profession de divertir les hommes.
Les jongleurs naissent quand commence le moyen âge vers le 9ème
siècle et les mots joculares
et joculatores apparaissent dans le latin des clercs. Mais est-ce à
dire que la chose naissant seulement avec le nom, les jongleurs n’ont pas
existé antérieurement ? Ces jongleurs n’ont pas paru un beau jour à
l’improviste. Si le soin de pouvoir à des intérêts immédiats et urgents leur avait
parfois laissé le loisir de songer à leurs ancêtres, ils auraient pu, autant
que marquis, comte ou duc, en citer de fort anciens et de fort prisés.
L’abbé de la Rue prétendait que les jongleurs étaient en gaule les
successeurs des bardes, transformés par le christianisme et continués sous une
autre dénomination. D ‘autres théories mieux fondés, mettent ces mêmes
jongleurs en rapport tantôt avec les anciens chanteurs germaniques, tantôt avec
les anciens mimes latins.
Parlant de l’agrément que les gens de guerre trouvaient à la poésie
épique, G. Paris écrit : « A l’origine, plus d’un de ces hommes
d’armes composait sans doute lui-même et chantait ces chants épiques ;
mais de bonne heure il y eut une classe spéciale de poètes et d’éxécutants. Ces
hommes, héritiers en partie des scopas francs, s’appelèrent en français
joglers….comme les musiciens ambulants et faiseurs de tours légués à la société
nouvelle par la société gréco-romaine. »
Les jongleurs sont héritiers des scôps en tant qu’ils sont des poètes et
des chanteurs épiques. « Les poèmes plus longs et plus exactement
narratifs, écrit G. Paris, étaient faits et chantés par des hommes dont c’était
la profession. Cette profession existait chez les Germains ; nous en
connaissons au moins le nom anglo-saxon (scôp). En Gaule, ce furent les
joculares ou joculatores qui prirent la place de ces chanteurs d’épopées. Les
jongleurs étant, pour une des parts les plus brillantes de leur activité, les
auteurs et les propagateurs des chansons de geste, le problème de leur
naissance n’est pas autre que celui de la naissance des épopées. Nées dans les
combats, échos des antiques conquêtes, elles ont eu leur berceau au milieu des
armées. Les soldats chantaient des cantilènes, où ils célébraient les exploits
des chefs et la gloire des batailles : plus tard , assemblées, organisées,
ces cantilènes formèrent les premiers récits épiques.
Ainsi pour faire des jongleurs les successeurs des scôps, il ne suffit
pas de dire que les uns et les autres chantaient des épopées. Il reste à se
demander si, indépendamment des rapports extérieurs, des rapprochements
généraux, théoriques et littéraires, on peut alléguer des faits, qui prouvent
des scôps aux jongleurs une filiation, une succession réelle. C’est à quoi il
faut répondre par la négative, étant donné ce que nous savons des anciens
scôps.
C’était un usage très ancien parmi les peuples germaniques de célébrer
par des poèmes la vaillance des héros : mais ces poèmes, dont la forme est
tout à fait inconnue, étaient chantés par des chanteurs guerriers et non par
des chanteurs de profession. Ces derniers paraissent pour la première fois chez
les Goths, à une date où ils sont encore ignorés des francs. Mais aux environs
du 6ème siècle, l’institution quelle qu’en soit l’origine, s’est
propagée dans toute l’Europe occidentale. A partir de ce moment, des poètes,
qui exécutaient eux-mêmes en s’accompagnant d’une sorte de harpe, se mettent à
voyager de cour en cour en offrant leur service. Les anglo saxons les
appelaient des scôps.
Donc qu’ils chantaient en s’accompagnant d’un instrument de
musique ; qu’ils le faisaient pour un public et qu’ils s’employaient
volontiers auprès des grands, qu’ils menaient une vie voyageuse, qu’ils étaient
l’ornement des fêtes, qu’ils célébraient ordinairement dans des poèmes la
bravoure des hommes de guerre, voilà les traits par lesquels les scôps et les
jongleurs se ressemblent. Mais à condition d’affirmer qu ‘au même titre
ils sont les parents des aèdes de la Grèce homérique et des griots de l’Afrique
nègre.
Si le jongleur a un passé c’est en regardant vers Rome, vers les pays
de mœurs latines.
Forains : bateleurs de la foire. Nom donné spécialement aux
acteurs des théâtres de la foire, par opposition aux acteurs de la comédie
française qu’on appelait les romains, à cause des sujets des tragédies
empruntés en grande partie à l’histoire humaine.
Tauromachie ou les
premiers acrobates : 18 siècles avant l’ère chrétienne, en Crète, le vase
de stéatite découvert à Haghia Triada, les fresques des palais de Cnossos et de
Phaïstos, les pierres gravées et les coupes exhumées par les archéologues
offrent de nombreuses représentations d’adolescents qui feintent, sautent ou
renversent des taureaux sauvages. (Peuple de l’époque égéenne).
1968 : devant les difficultés incroyables rencontrées par les
artistes de toutes expressions pour travailler librement, la rue redevient le
lieu de théâtre idéal, où le contact avec le public est direct. Elle retrouve
ses lettres de noblesse. Le populo voit renaître sous ses fenêtres, à sa porte,
sur ses pavés usés, dans ses cours et ses jardins, ses squares et ses places,
le spectacle vivant.
Les spectacles ne
s’introduisent que fort tard dans les foires où ils vont prendre le relais des
soties médiévales.
Les historiens les
font remonter au 1er siècle de la monarchie à une époque où le commerce ne se
faisait que par caravane. Les marchands méprisés par les gens de l’église et
souvent pillés par les seigneurs sur les terres desquels ils passaient ,
avaient à leur suite pour se concilier les habitants des villes, des bateleurs
, des musiciens et des farceurs.
1595 les premiers
comédiens s’établissent dans les foires où ils se placent sous la protection
d’anciennes franchises .
Les romanichels
précurseurs de nos modernes banquistes car ils fournirent en partie nos
premiers saltimbanques .
Le forain est avant
tout un commerçant , à moins qu’il ne soit un artiste . Acrobate et jongleur
sont des artistes chacun dans son genre . Soit mais en ce cas encore alors même
qu’il ne vend rien , les talents de celui ci sont en quelque sorte une
marchandise et cette marchandise là plutôt que de la produire dans un
établissement stable , il préfère à l’aventure l’exploiter à ses risques et
périls en gagne petit .
Recherche de ma fille Nathalie
Les artistes de la rue; un combat pour la liberté
d'expression. Le "pavé" comme outil de communication. |
Ils ont débarqué comme ça, avec leurs roulottes, investissant les vieux
quartiers avec une seule idée en tête: offrir aux spectateurs une part de rêve
et permettent aujourd'hui aux gens de renouer avec le plaisir du
spectacle. Mais à l'origine était-ce
leur seul but?
Déjà, à partir du XVè siècle et jusqu'à la Révolution, les
comédiens forains se battaient contre les autorités.
A cette époque, qui, mieux
qu'un chanteur de rue, peut colporter des idées nouvelles grâce à de simples
ritournelles? Mais quel mal
faisaient-ils? On les accueillait avec
joie. Ils apportaient un peu de gaieté
dans la monotonie des longues journées de labeur... L'artiste de rue avait son
petit rôle social.
Qui sont-ils ces artistes sur le chemin de la marginalité? Quel est leur combat pour la liberté
d'expression? Le public est-il prêt à
manifester pour maintenir la survivance des saltimbanques?
L'art de la rue contient-il une détermination politique? Comment arrive-t-on au métier de pitre de
rue? Quelles joies et quelle vie secrète
rencontrent-ils? Quel est leur rôle au
sein de la société?
Sont-ils des clochards ou mendiants?
Peut-être moins que vous et moi...
C'est donc animée d'un souci
d'éclaircir toutes ces questions, que j'aimerais tant réaliser mon T.F.E. sur
ce sujet bien souvent obscure et quelques fois tabou !
TABLE
DES MATIERES
Introduction
Ë Levons
un coin du pavé...
Ë Méthode de travail
Chapitre premier
1. Un après-midi sur le parvis
2. Que veut dire "Saltimbanque" ?
2.1 la formation de l'artiste de rue
2.2 le statut du saltimbanque
3. Histoire
d'un préjugé
4. Les
saltimbanque à travers les âges...
4.1 le spectacle est dans la rue !
4.1.1 les Entrées Solennelles
4.1.2 les Processions
4.1.3 le Carnaval
4.2 la confiscation du spectacle de rue
4.3 1968
4.4 de nos jours...
Chapitre 2 : les différentes formes du spectacle de
rue...
1. Le théâtre de la foire
2. La Commedia dell'arte
3. Le "peuple du voyage"
4. Le théâtre radical
Chapitre 3 : Les lieux de travail
1. Le quartier
Beaubourg
2. Autres
endroits de Paris
3. Le métro
3.1 les artistes taxés comme des ambulants
4. La rue
4.1 la rue de "survie"
Chapitre 4 : le bateleur et son environnement...
1. Le public du spectacle de rue
1.1 l'argent
2. Les voisins
3. L'attention de la presse
4. Mais que fait la police ?
5. Les saltimbanques jugés par les saltimbanques
5.1 leurs accords...
Chapitre 5 : de la scène à la rue...
1. Avantages et inconvénients
2. Les caractéristiques du spectacle de rue
3. L'espace public
4. Le spectacle de la rue et la fête...
Chapitre 6 : La législation...
1. En France
2. En Belgique
Chapitre 7 : le rôle des festivals...
Conclusion
Bibliographie
Annexes
Introduction
Levons un coin du pavé...
On assiste depuis plusieurs années à une multiplication
d'artistes se produisant dans l'espace public, en marge des institutions.
Bien que la vitalité et le dynamisme du spectacle de rue soient
incontestables, cet art reste une forme
d'expression méconnue et sujette à plus d'une polémique.
A
l'heure actuelle, beaucoup de gens le considèrent comme un spectacle
d'amateurs, comme un sous-genre ne méritant guère que l'on y porte une grande
attention.
Pourtant le spectacle de rue est en vogue : les
festivals qui lui sont consacrés prolifèrent[1],
les médias commencent à s'y intéresser de près et le public le découvre avec
eux.
Le spectacle de rue n'est pas un phénomène
récent. Depuis le 15e siècle,
il est présent dans la vie des collectivités.
La curiosité, l'étonnement et la surprise ont fait le plaisir de
plusieurs générations de spectateurs.
On oublie bien souvent, qu'il est l'une des formes d'expression des
plus anciennes et des plus populaires.
Une constante se profile au cours des siècles : la difficulté du
spectacle de rue à s'imposer. Les autorités
d'hier (ecclésiastiques) et d'aujourd'hui (politiques) lui ont toujours mis des
bâtons dans les roues.
Tout comme le milieu du cirque, il est difficile
d'approcher celui des artistes de rue.
J'ai eu des conversations avec des dizaines de saltimbanques. Si leurs
motivations à exercer ce métier restent difficiles à cerner, nous tenterons de
nous renseigner sur les facteurs intervenant dans la variation des modes et des
conditions de travail.
J'ai fait superficiellement connaissance avec quelques
bateleurs[2].
Assez pour ne pas les gêner par ma présence, mais pas suffisamment pour devenir
leur confidente.
Certaines de mes questions sont restées sans réponses,
quand celles-ci n'étaient pas inventées ou mensongères. Malgré la difficulté à juger de la sincérité
des réponses, il est possible de se faire une idée des moeurs en vigueur. C'est la raison pour laquelle j'ai laissé
telles quelles dans le texte des affirmations dont la véracité me semble
douteuse.
Hormis les saltimbanques, les acteurs de la rue sont :
le public, la police et les riverains.
Cette étude se propose d'analyser la vie quotidienne,
les conditions de travail, les rythmes de vie et les relations entre les
groupes précités.
Ce texte abordera également de façon accessoire les origines, le train
de vie ou la situation des saltimbanques dans la société contemporaine.
Une partie de ce travail de fin d'étude
s'attachera à retracer l'histoire du
spectacle en espace public. Mais elle ne
s'en tiendra pas à décrire une esthétique : le spectacle de rue est avant tout
une forme d'expression, c'est -à- dire de communication, ce qui implique
de se pencher aussi sur le rapport qu'il entretient avec son public et sur
l'évolution de cette relation.
Enfin, je tenterai de donner un aperçu de la vie des
artistes de rue, des difficultés qu'ils rencontrent. Je me
pencherai sur le rôle que jouent les festivals dans l'existence et la
reconnaissance de la pratique de la rue.
Ce que nous avons de mieux à faire, c'est de nous
plonger dans son univers et de tenter de le cerner par différentes approches,
de l'observer sous tous ses angles. Ces
divers points de vue seront : l'espace, le jeu et le public du spectacle de
rue.
J'ai choisi d'étayer ces chapitres par des spectacles que j'ai eu
l'occasion d'apprécier récemment et dont les photos pourront éclairer le
lecteur.
Méthode de travail
Toute étude de ce type commence d'abord par le
dépouillement de la bibliographie concernant le sujet traité. Celle-ci s'est révélée tout-à-fait
insuffisante. En effet, bien que les
ouvrages traitant du spectacle en général restent toujours d'actualité, ceux
consacrés au spectacle de rue en particulier datent. Il n'existe que très peu
de littérature sur les bateleurs de nos jours, voire de notre siècle. Ce qui surprend
à côté de la relative abondance aux siècles précédents, mais (surtout fin du 19e siècle).
Dans mon étude, la littérature a servi essentiellement
à l'aperçu historique des saltimbanques.
Les saltimbanques étant encore nombreux sur le
bitume. Il était par conséquent
indispensable d'aborder cette question par une observation sur le terrain.
Tout d'abord, il s'agissait d'assister à un certain
nombre de spectacles de rue afin d'en avoir une image précise, de rencontrer de
nombreux artistes de rue et de réaliser leurs interviews.
Afin de mener à bien ce travail de fin d'étude, je me rendis dans les
lieux publics et les espaces libres (Beaubourg, Montmartre,
Saint-Germain-des-Prés, métros bruxellois, festivals divers).
Le texte est basé sur des informations recueillies au
cours de plusieurs visites à Paris, variant entre 15 minutes et une journée
entière, entre avril et mi-mai 1998.
Au cours de ces visites j'ai interrogé des saltimbanques, des visiteurs
et des agents de police.
A ces entretiens s'ajoute ma propre observation de la vie d'artiste de
rue.
Mes conversations avec les saltimbanques se sont
déroulées sur leur lieu de travail ou dans les cafés du quartier, souvent
durant la pause entre deux spectacles.
En dehors de l'éventuelle méfiance des bateleurs à mon égard, il est
vraisemblable que leurs réponses aient varié suivant la présence, l'arrivée ou
l'intervention d'autres personnes dans la conversation. Le climat des entretiens a aussi été
influencé par la plus ou moins grande hâte des saltimbanques de recommencer
leurs spectacles.
Le nombre réduit d'interrogés ne permet pas d'établir
des conclusions générales. les personnes interviewées ne sont pas un groupe
homogène, mais présentent une grande variété quant aux métiers, quant à leur
expérience, etc...
Il s'agit ici plutôt d'explorer cette variété.
J'ai interrogé X visiteurs du parvis.
Un échantillon si limité ne permet naturellement ni quantification des
comportements, ni conclusions sérieuses. Mais, il a le mérite d'exister et de
donner une idée.
Partant d'un nombre de questions préparées à l'avance,
les entretiens avec les spectateurs ont surtout eu le caractère de
conversations spontanées, de longueur variable.
Malgré l'échantillon réduit, j'ai rendu les résultats
de mon enquête en pour-cent, ce qui, sans prétention de précision statistique,
facilite la lecture.
Mes contacts avec la police se composent d'interviews
succinctes avec les agents en service.
Je n'ai pas rencontré de riverains. La nécessité de questionner un nombre
important de riverains avant de pouvoir formuler une idée sur les attitudes des
habitants et des commerçants du quartier m'a incité à renoncer à la méthode de
l'enquête.
La presse m'a bien entendu apporté des informations sur la vie des
artistes de rue.
Pour terminer, il est important de préciser que
certains chapitres seront illustrés par des photos de spectacles observés. Le
lecteur pourra, de la sorte, se faire une image plus claire des spectacles
proposés.
Chapitre premier |
"—Et
de quel instrument jouez-vous Monsieur,
Qui vous taisez et qui ne dites rien ?
_Moi je joue de l'orgue de Barbarie
Et je joue
du couteau aussi,
Dit l'homme qui jusqu'ici
N'avait
absolument rien dit."
Monsieur Jacques Prévert
1. Un
après-midi sur le parvis
Le flâneur qui ne connaît pas l'attraction de
Beaubourg est vite attiré par des grappes humaines, bouchant presque
entièrement l'entrée de la place en pente.
Nous le suivons à la découverte du spectacle...
Au milieu du cercle avance d'un pas raide et saccadé
un robot habillé de rouge. Arrivés plus
près, nous découvrons que le robot est vêtu d'une queue de pie et qu'il a
quelque chose d'humain. Il s'avance
droit sur le public comme s'il voulait briser le cercle de spectateurs et
s'échapper. Des spectateurs peu rassurés
s'écartent pour le laisser passer, mais
il se ravise et continue son tour à l'intérieur du cercle. Revenu au point de départ, il s'arrête et
monte sur son petit podium. Levant lentement l'avant-bras, il porte la main
droite à la hauteur de son visage et salue d'un geste bref ses
spectateurs. Le public reste curieux de
voir comment il va opérer la transformation du robot à l'être humain. Il fouille dans sa poche, trouve une pièce et
la tient entre le pouce et l'index. Il
la montre bien à son public et la pose dans le chapeau claque qu'il a ôté de sa
tête, faisant ainsi comprendre qu'il veut être payé. A chaque pièce qui tombe ensuite dans son
chapeau, il s'incline rapidement.
Lorsque des spectateurs malicieux déposent deux pièces à la fois, il se
courbe rapidement deux fois.
D'autres spectateurs rusés envoient leurs enfants avec la pièce. L'automate baisse alors sa main tenant le
chapeau, qui oscille comme un levier suspendu à un ressort, remercie et remonte
ensuite le chapeau à sa hauteur initiale.
Cette quête, qui fait partie du spectacle, dure aussi longtemps que le
public trouve amusant de mettre l'automate à l'épreuve.
Nous partons avant que le public se disperse et
frayons un chemin dans l'étroit passage qui reste ouvert pour descendre sur la
place. Sur notre gauche, une foule
entoure un groupe de musiciens latino-américains. Le cercle est large car au milieu se sont
assis de nombreux amateurs, ceux qui restent longtemps pour apprécier.
Regardons ce qui se passe à côté de ce cercle. Le torse nu, un foulard autour de la tête,
quatre jeunes préparent leur prochaine séance.
Devant eux sont disposés une planche à clous et un tapis sur lequel l'un
d'eux casse des bouteilles avec un marteau.
"Bon,
alors, tu cloches," dit l'un d'eux.
L'autre agite une cloche et crie ensuite "ho, ho, ho,
ho!". Une foule se constitue
vite. Beaucoup d'entre eux s'assoient
par terre. Ils demandent quatre-vingts
francs pour montrer leur spectacle.
"Agressez-nous de pièces de cinq balles, on vous dira rien... Je vous précise que les pièces jaunes ne
comptent pas... Les cinquante centimes
ne comptent que quand il y en a deux", disent-ils en attendant que les
pièces tombent dans leur chapeau!
Les fakirs ont parfois du mal à couvrir de leurs voix
les rythmes de percussion venant de plus bas sur la place. Nous nous dirigeons vers cette source de
bruit, un groupe est composé d'une majorité de Maghrébins. Au milieu, résonnent les tam-tams. La communion avec le public est
frappante. Nombreux tapent des mains,
entamant un refrain connu. Nous sommes
loin des soucis du quotidien!
Nous quittons ces refrains nostalgiques pour regarder
un couple de mimes. Le spectacle semble
peu construit et les spectateurs restent moins longtemps.
Juste à côté, s'est installé un hypnotiseur. Il se tient debout entre deux tréteaux,
expliquant comment procéder pour endormir une personne de l'assemblée.
Plus haut, un jeune homme maquillé comme un Pierrot
ondule doucement aux sons d'un lecteur de cassettes posé par terre à côté de
lui.
En haut de la place un homme arrive avec une
bicyclette. Il s'arrête. Après avoir jeté quelques poignées de graines
aux pigeons, qui l'ont reconnu de loin, il les chasse. Perché sur un podium il proclame : "La
société caca - pipi - tata -capitaliste".
Et il continue : "Prenez pas le métro à Paris! Prenez le pouvoir!... Aimez-vous les uns sur les autres... Les Français sont bien con-ditionnés... Nous sommes tous des con- damnés à
mort... Europe 1 c'est
naturel-ment!... Mais vous vous êtes
contents, cons - tant mieux." Il
vend son journal et une fois terminé, il enfourche sa bicyclette et disparaît.
Tous ces spectacles ont véritablement eu lieu, mais
pas dans la même journée, ni tous aux mêmes endroits. Cette description n'est qu'une sélection
restreinte de la variété des numéros auxquels j'ai assisté.
Il m'a semblé utile, avant d'analyser plus en détail ce
"phénomène", de donner un aperçu global de ce que sont les
saltimbanques.
2. Que veut
dire "Saltimbanque" ?
Il est utile d'expliquer quelques termes qui
apparaissent fréquemment dans la presse, car ces termes sont parfois assimilés
ou différenciés de façon vague. Les
définitions sont tirées pour la plupart
du dictionnaire Larousse.
Baladin
: (1545) danseur ou danseuse de théâtre.
Au 17e
siècle, désigne des bouffons comme Arlequin et Scaramouche.
Farceur de
place publique, il "exerce ainsi la balade."[3]
Bateleur : (13e siècle baastel = marionnette. Eventuellement du bas-latin :
bastaxius
= crocheteur,
jongleur ou de basteau = petit bâton, baguette). Faiseurs
de tours de force
et d'escamotage sur les places publiques.
Au 16e
siècle, basteler
voulait dire, faire le sot.
Forain :
(12e siècle) Le marchand
ambulant fut appelé marchand forain au 18e
siècle. Par une confusion, les gens de la foire, en
passant par la forme de
transition
"foirain" ont reçu le nom de forains.
Les forains sont des
acteurs ou bateleurs
qui se produisent dans les foires et les fêtes
publiques.
Jongleur : (12e siècle jongler = jouer, 16e siècle
jongler = faire des tours).
Au Moyen-Age le
jongleur était un ménéstrel qui chantait des chansons
de geste en
s'accompagnant d'un instrument. Il
devient par une
extension
péjorative, un joueur de tours de passe-passe, un bateleur qui
lance en l'air
des boules et des cercles.
Ménestrel : (1827) Poète musicien
médiéval, de basse condition, particulièrement
joueur
d'instrument.
Ménétrier : (1272 comme ménestrel du latin minister = serviteur). Homme qui
joue du violon
pour faire danser.
Mime
: (16e siècle). Acteur de
pièces familières et bouffonnes, chez les Grecs et
les Romains. Le sens du mot mime est imitateur.
Saltimbanque : (1560). Le
nom vient de l'italien "saltimbanco", celui qui saute sur
un
banc. Les saltimbanques étaient au début
des vendeurs de
drogues et
de médicaments, qui montaient sur des tréteaux pour
faire des
tours afin d'attirer le public, pour ensuite vendre leurs
produits. Ils sont définis comme
des bateleurs faisant des
exercices
sur les places publiques. Utilisé
péjorativement, le terme
veut dire
aussi "bouffon de société", "mauvais orateur dont les
gestes
sont outrés et ridicules".
La valeur du mot saltimbanque a subi des variations et
a souvent été une expression de mépris.
L'auteur de "Les Charlatans Célèbres", prend la défense des
saltimbanques en 1819 : "Leurs talents ne sont pas seuls traités avec
cette injustice, il en est de même pour
le génie, auquel on a donné le nom burlesque de "farce"; et voici
qu'un auteur encyclopédiste ose prétendre que la "farce" n'est autre
qu'un comique grossier, absolument indigne de plaire à la bonne
compagnie".[4]
C'est ainsi que le maire
de Paris s'enthousiasmait dans les années 70 à l'évocation des spectacles
improvisés dans la rue : "Je demande que l'animation culturelle devienne
une habitude, que la poésie dans les rues de Paris soit réanimée car la poésie
ne doit pas, en effet, se cantonner dans les salles de théâtre ou sur les coins
des rues".[5]
Le clown Pipo a son idée
sur l'origine du mot saltimbanque : "Le mot Saltimbanque, paraît-il à ce
que mon père m'a dit... d'après lui, le mot BANQUE, viendrait d'un type qui
voyageait avec les forains et qui prêtait de l'argent aux forains. Mais le type était un peu sale, si vous
voulez. Alors, on l'appelait le SALE
-t-BANQUE. Je ne sais pas si c'est
officiel, mais je vous le vends comme je l'ai acheté".[6]
L'art des saltimbanques a
marqué et reflété la vie de la cité depuis l'Antiquité jusqu'au début de notre
siècle. Il est l'une des formes
principales du spectacle populaire, à l'origine de plusieurs genres, la
Commedia dell'arte, l'opéra comique, le cirque, ...
On retrouve, dès le 11e
siècle, des bateleurs dans toutes les grandes villes d'Europe. Ils offraient des divertissements quotidiens
en dehors des réjouissances qui marquaient les grands moments de l'année. Ils exerçaient aux carrefours et sur les
places les plus fréquentées, comme le Pont-Neuf à Paris, installés sur des
tréteaux ou à même la rue et donnaient toutes sortes de spectacles basés en
grande partie sur l'improvisation et accordant une large place à la
musique. Ils accompagnaient les médecins
ambulants, les vendeurs de tisanes, les arracheurs de dents et autres... et par leurs boniments incitaient le public à
acheter les produits qu'ils proposaient à la fin de la représentation :
médicaments, poudres magiques, pommades,...
Ces spectacles
constituaient une des premières formes de publicité et connaissaient une grande
popularité auprès des foules. Les
bateleurs étaient associés aux charlatans.
La coutume était de faire précéder la vente de chansons, d'acrobaties,
de tours de singes et d'un dialogue comique entre l'opérateur et un compère qui
prenait le public à partie.
La tradition des
saltimbanques s'est maintenue jusqu'à nos jours, même si ceux-ci ne sont plus
attachés au service des charlatans.
2.1 La
formation de l'artiste de la rue...
Certains pensent que le
spectacle de rue est un spectacle d'amateurs, la salle étant réservée aux
professionnels. Cette idée préconçue
s'est révélée fausse au cours de ce travail : de nombreux artistes de rue sont
issus des conservatoires, ont été formés, maîtrisent les techniques du
cirque,... (mais le cirque n'est-il pas considéré lui aussi comme un art mineur
?).
S'il est vrai que dans la
rue on rencontre plus qu'ailleurs des autodidactes, des comédiens formés
"sur le tas", la meilleure école du spectacle n'est-elle pas celle
qui pousse les artistes devant le public, qui lui fait prendre conscience de la
difficulté de jouer, du travail à effectuer et de ses propres capacités ?
Les spectacles accordent une place primordiale à l'improvisation car
ils ne peuvent pas ignoré les "accidents" de la rue (une voiture qui
passe, un chien qui aboie, un enfant qui crie,...) ni les comportements du public. De ce fait, ils ne sont jamais identiques,
ils se transforment selon les situations qu'ils rencontrent. Ce sont des spectacles plus intimistes et qui
reposent entièrement sur les comédiens.
La rue est une excellente
formation où le "premier prix" à décrocher serait les rires et les
applaudissements du public.
Pour entrer dans une
troupe de rue, aucun diplôme n'est exigé.
Par contre, les qualités demandées sont nombreuses : outre le fait qu'il
doit être bon, il doit être polyvalent (monter un décor, coudre son costume,
clouer ou souder, négocier un contrat éventuellement).
Nous voyons qu'il est
hors de question de considérer les artistes de rue comme des amateurs. Ce sont des professionnels à part entière!
2.2 Le
statut du saltimbanque...
Le vedettariat existe
rarement au sein des saltimbanques. Les
artistes de rue n'ont jamais la mentalité de "star".
Chacun est polyvalent. Les artistes de rue sont aussi bien comédiens
que soudeurs, déménageurs ou cascadeurs.
Ces artistes s'appellent, non sans quelque fierté, les "artistes
aux mains sales".
Bien plus qu'un style de
vie, il s'agit avant tout d'un choix de vie.
Les artistes de rue restent toujours considérés comme des
marginaux. Le manque de moyens
financiers les maintient en marge de la société. Bien qu'ils fournissent un travail considérable,
ils ont ainsi un statut social peu valorisant.
Aussi succombent-ils parfois aux tentations pécuniaires.
Les villes, elles aussi
se mettent à passer commande pour des spectacles de rue. Entre l'argent et la liberté artistique, le
choix peut devenir douloureux pour ces artistes dont beaucoup se méfient de
l'institutionnalisation et des administrations.
3. Histoire d'un préjugé
En 1585, invoquant des raisons d'ordre moral, le pape Sixte V bannit
les comédiens de ses Etats. Nombre de
princes imitent son exemple, certains tolérant toutefois les troupes mixtes,
mais les castrats unanimement préférés aux dames. A l'autre bout du monde, la société
traditionnelle orientale relègue dans la plus basse classe les bouchers, les
prostituées, les chamans et les acteurs.
La licence notoire, avérée, des paillasses de foire et autres gugusses,
a rejailli sur l'ensemble des exhibitionnistes du tréteau, ces saltimbanques au
sens de "saltimbanco : qui saute au-dessus d'un banc". L'emprise religieuse ressortit du libellé des
règlements de la police civile; ainsi un document de 1560, reprécisé en 1588,
toujours en vigueur au XVIIIe siècle, défend-il aux "bateleurs" de
"jouer les dimanches et les jours de festes, aux heures du service divin,
de se vestir d'habits ecclésiastiques et de jouer des choses dissolues ou de
mauvais exemple, à peine de prison et de punition corporelle."
Edicté le 22 février 1635, l'article Ier des statuts de l'Académie
française stipule : "Personne ne sera reçu dans l'Académie qui ne soit
agréable à Mgr le protecteur et qui ne soit de bonnes moeurs, de bonne réputation,
de bon esprit et propre aux fonctions académiques." Voilà qui, "bonnes moeurs" et
"bonne réputation" mises en avant, exclut les comédiens.
Le rituel du diocèse de Paris, en usage au même moment, rejette, en
effet, de la vaste famille des chrétiens, les "personnes publiquement
indignes, tels que ceux qui sont notoirement excommuniés, interdits et
manifestement infâmes, comme les prostituées, les concubinaires, les comédiens,
les usuriers, les magiciens, les sorciers, les blasphémateurs et autres semblables
pêcheurs".
Le 16 avril 1641, signant une Ordonnance généreuse et très en avance
sur l'opinion, sa main guidée par un cardinal de Richelieu friand de théâtre,
Louis XIII relève les amuseurs de la déchéance sociale qui les frappe. Voeu :
"En cas que les
dits comédiens règlent tellement les actions du théâtre qu'elles soient, du
tout, exemptes d'impuretés, nous voulons que leur exercice, qui peut
innocemment divertir nos peuples de diverses occupations mauvaises, ne puisse
leur être imputé à blâme, ni préjudice à leur réputation dans le commerce
public".[7]
"Le
Diable joue. C'est à cela qu'on le
reconnaît.
C'est
le grand Acteur. Et c'est pourquoi
l'Eglise a maudit les comédiens."
Jean Genet, Le Balcon
4. Les
saltimbanques à travers les âges...
Si les montreurs de
marionnettes ont la réputation d'être les plus anciens présentateurs de
spectacle populaire[8], c'est aux mimes de
l'Antiquité que l'on attribue le rôle d'ancêtre des saltimbanques du Moyen-Age[9]. Ils deviennent des artistes ambulants, allant
de fête en fête, civiles et religieuses, et de foire en foire. Ils se transformèrent en illusionnistes
sillonnant les pays dès le 4e et 5è siècles[10].
Le Moyen-Age est le véritable héritier des animations
de rue. L'Eglise va influencer
considérablement ce "phénomène".[11]
Les églises, et surtout les cathédrales, seront pendant des siècles les
seuls lieux de représentation (puisque les cirques ont disparu du paysage
urbain). Les cathédrales vont prendre
une place considérable dans les villes. Une place hors de proportion avec le
strict rôle de service du culte : elles vont devenir haut lieu de la vie
sociale et lieu de fêtes.
Le clergé encourageait
les représentations. Il visait à
fidéliser les croyants. Ces jours de
spectacles représentaient pour le peuple un divertissement gratuit, un jour
hors de la routine.
Mais le recueillement et le respect dûs au Saint-Lieu ne
caractérisaient pas ces foules turbulentes et indisciplinées.[12]
Jugeant que les
irruptions du profane dans le sacré sont fréquentes, les autorités
ecclésiastiques finissent par tenter de ramener l'ordre et la paix dans la
maison du Seigneur!
Les condamnations des
évêques se feront de plus en plus fréquentes.
On rappellera que l'église est un lieu saint et que les représentations
ne doivent pas tourner en fêtes joyeuses et oublier leur raison d'être.
Chassés du choeur de l'église, ils vont émigrer sur le parvis puis sur
la place publique.
4.1 Le spectacle est dans la
rue...
Le spectacle rejeté dans
la rue, va dès lors connaître son plus grand développement et s'adresser à
l'ensemble de la population. Alors
qu'ils se donnaient en latin, les spectacles vont se donner en langue
"vulgaire". Ils toucheront
alors un public beaucoup plus large. Dès lors, le lieu et la langue perdant leur
caractère religieux, les sujets eux aussi deviennent profanes.
Les artistes seront condamnés par le clergé ainsi que par les
autorités.
Depuis toujours, les
saltimbanques se sont battus contre les autorités.
Ces autorités réussirent à faire interdire les dialogues dont se
régalait le public au cours des saynètes qui se jouaient sur les tréteaux. Qu'à cela ne tienne! Les comédiens chantèrent. On supprima le chant. Ils mimèrent.
Chaque fois qu' une interdiction tombait, ils trouvaient de nouveaux moyens
d'expression. La foule se pressait pour
les voir!
Bientôt les tréteaux furent interdits...Ils devinrent acrobates. Sous la pression des autorités qui croyaient
détenir la vérité, il y eut ainsi des siècles et des siècles de combats. Mais la raison fondamentale de ces combats
n'était pas la gêne que pouvait occasionner un spectacle sur la voie
publique. Il faut plutôt regarder du
côté des idées et des rumeurs colportées par ces voyageurs de l'art. Ils étaient considérés comme dangereux, donc
intolérable. A proscrire!
On ne se contente plus d'illustrer ou de représenter
un événement; on cherche désormais à plaire, à divertir et à faire rire. Ces
spectacles humoristiques n'ont absolument plus rien de sacré.
Installées dans l'espace
urbain, les représentations prirent une ampleur telle que toute la ville fut
rapidement investie, pour accueillir davantage de spectateurs. Le spectacle est ainsi un art qui s'adresse à
l'ensemble de la population.
De nombreuses fêtes rompent la routine des jours et des
travaux. Fêtes religieuses mais aussi
célébrations politiques et civiles : jeux, compétitions, processions, cortèges,
Carnavals,... occupaient le haut du pavé.
Nombreuses étaient les occasions de réjouissances
publiques en plein air. Réjouissances grandioses qui duraient souvent plusieurs
jours et naissaient parfois de circonstances inattendues ou d'événements
particuliers.
4.1.1
Les Entrées Solennelles.
La visite d'un souverain ou d'un ambassadeur dans une
ville permettait en effet de se réjouir à grands frais et donnait lieu à des
cortèges magnifiques.
Toute la ville se trouvait alors transformée et
décorée : les rues étaient nettoyées de leur fumier et jonchées de fleurs. Des chars y circulaient, des fontaines et des
arcs de triomphe étaient dressés sur les places,... Aux carrefours des rues se déroulaient des
spectacles de tous genres : clowns, mimes, saynètes,...[13]
4.1.2
Les Processions.
Les grandes fêtes des Saints étaient aussi l'occasion
de véritables spectacles.
Ces divertissements populaires mobilisaient une vaste
audience : des milliers de personnes envahissaient alors la cité pour admirer
les fastes déployés. Beaucoup venaient
dès l'aube pour se réserver la meilleure place et ne rien rater du
spectacle. Toute la ville collaborait à
ces fêtes.
Ces grands rassemblements provoquaient de nombreux
désagréments: l'ivresse, l'excitation, le nombre accru d'étrangers, de
maraudeurs étaient des risques d'effusion de sang.
Les jours de fête entraînaient un dérèglement de
l'ordre social, une anarchie inhabituelle : "C'est un bouleversement
complet de la cité; les portes de la ville sont fermées comme pour un siège et
les gardes des temps troubles sont à leurs postes".[14]
4.1.3
Le Carnaval.
Le Carnaval prendra vite
les formes les plus variées et les plus extravagantes selon les régions. Aussi vaut-il mieux parler "des"
Carnavals.
Malgré leur diversité,
ils célébraient partout le printemps, le renouveau de la nature. On fêtait dans l'abondance les derniers jours
avant l'abstinence du Carême et on expulse l'hiver.
Le Carnaval était le type
même de la fête populaire, la fête de tous, sans conditions d'âge, de rang ou
de fortune. Par ces quelques jours de
défoulement, les habitants prenaient véritablement possession de leur cité. Ici plus que jamais, la ville toute entière
vivait au rythme de la fête.
Le carnaval avait aussi
une dimension sociale et politique.
C'était le seul jour de l'année où les "grands" (aristocrates,
bourgeois, princes,...) perdaient leur titre au profit du petit peuple. Par leurs spectacles, les saltimbanques
stigmatisaient cet état de fait.
Même si les spectacles du Carnaval restent
essentiellement des divertissements, il en émane souvent une critique de la
société, une satire des moeurs. Ils font
preuve d'une grande fantaisie et imagination.
La faveur dont ils
jouirent auprès du public prit fin lorsque l'Eglise se dressa contre eux en
partie parce qu'ils n'hésitaient pas à la critiquer. Victimes de la dénonciation de l'Eglise, de
la misère et des calamités publiques, les bateleurs disparurent presque
entièrement aux 9e et 10e siècles[15]. Ce ne fut que grâce aux troubadours du 12e
siècle qu'ils reconquirent l'estime du public[16].
A cause de la crainte qu'inspiraient les
saltimbanques, il leur fut impossible de rester sédentaires. Dès lors, ils devinrent des errants. Malgré son instabilité et son isolement, la
vie ambulante, attirait les esprits aventuriers. Ainsi écartés de la vie sociale, les artistes
errants transmettaient leurs secrets à travers les siècles. La peur des populations sédentaires leur
valut jusqu'au 18e siècle d'être considérés dans les campagnes comme
des sorciers.
Cependant, les royautés
ont souvent demandé la présence des saltimbanques pour accentuer le faste de
cérémonies comme les entrées triomphales.
Parmi les amateurs royaux de bateleurs, citons Charles VIII, Louis XIII
et Marie d'Angleterre[17].
"Peu à peu, on
voyait apparaître : les chanteurs, ensuite les jongleurs, puis vinrent les
joueurs et enfin, les bateleurs"[18].
Sur le répertoire d'une
troupe familiale honnête devait se trouver les numéros suivants : marche sur
une corde raide, jonglage, tours d'équilibre, contorsionniste et toutes les
variétés d'exercices sur le tapis et tremplin.[19]
On distinguait entre la
"grande banque" et la "petite banque", les exécutants
s'appelant des "banquistes".
C'est par ce terme, ou encore "circassien", que se désignent
les artistes de cirque de nos jours.
A la petite banque appartenaient les artistes modestes travaillant en
plein air ou dans des loges très humbles, animant seuls leurs spectacles. Dans cette catégorie était aussi inclus
"l'entresort", une baraque à spectacle permanent, sans commencement
ni fin, tel que l'exposition de monstres, voir Barnum « The
Freaks ». On entre, on sort!
Tandis que la petite
banque reste presque inchangée à travers les siècles, la grande banque est
celle de la grande acrobatie toujours plus audacieuse et plus
perfectionnée. Les artistes de la grande
banque sont les acrobates des cirques de nos jours. Ce fut à la fin du 18e siècle
qu'arriva la grande nouveauté dans la représentation du spectacle. Reprenant les démonstrations de dressage de
chevaux, l'Anglais Astley inventa de les représenter à un grand public, dans un
espace fermé et couvert d'un toit en toile avec, pour les spectateurs, une
tribune qui n'allait pas tarder à devenir le gradin du cirque
contemporain. Les dimensions de la piste
étaient dues aux nécessités des manifestations équestres.
Paris vit son premier cirque Astley inauguré le 9 juillet 1782.[20]
Astley inclut aussi à son
spectacle ce qui devait devenir les clowns, les "colons" (= paysans
en anglais du 18e siècle). Le
premier Auguste de l'histoire du cirque apparut dans la personne de Tom
Beeling, en 1870.[21]
Une des attractions les
plus importantes des fêtes foraines de la fin du 18e siècle fut les
Hercules, souleveurs de poids. Les
lutteurs de foire suscitèrent un grand intérêt.
Fidèles aux traditions, les saltimbanques du 19e siècle
suivirent le calendrier des foires et kermesses.
Les
saltimbanques de jadis sont évoqués en termes nostalgiques comme des artistes
de qualité qui aimaient leur métier, qui aimaient ce qu'ils appellent "le
feu sacré", contrairement à ceux de nos jours, qualifiés par les vétérans
de "ramasseurs" et "faux saltimbanques".
En conclusion le spectacle médiéval, nous l'avons vu,
recouvre de très nombreuses formes de spectacles urbains. Assister à des spectacles dans la rue était à
cette époque tout-à-fait naturel et courant.
Ces représentations étaient, plus qu'à toute autre époque, marquées par
la spontanéité. Elles étaient alors
réellement assimilées à une fête, à un jour hors du commun.
L'assimilation du
spectacle à la fête est une notion qui a complètement disparu avec
l'officialisation des cabarets et théâtres, pour réapparaître au 20e
siècle dans la recherche d'une nouvelle communication avec le public (recherche
dans laquelle s'inscrit bien sûr le spectacle de rue).
Nous avons vu combien le
spectacle à l'époque médiévale était un spectacle "ouvert",
accessible au public le plus varié. En
quittant les églises, il a pu réellement s'épanouir et s'élargir à des genres
très différents. Il nous faut observer
maintenant le processus par lequel il a été peu à peu "confisqué" par
la bourgeoisie.
4.2 La
confiscation du spectacle de rue...
Au 17e siècle,
l'idée se forme de déplacer le spectacle dans un édifice autonome, idée qui
mènera à l'avènement de la scène. Des
architectes comme Serlio, Palladio ou Sabattini font une découverte
fondamentale : la perspective.
Le décor classique fait alors son apparition.
Plus tard, lorsque la
salle sera plongée dans l'obscurité pour focaliser l'attention sur la scène, le
public se repliera alors tout-à-fait sur lui-même et tout contact avec les
artistes sera exclu.
L'apport indéniable du 18e
siècle est d'avoir enfin considéré le spectacle comme un art véritable et de
lui avoir donné sa place dans la culture officielle. Les formes populaires comme le théâtre forain
ou la Commedia dell'arte disparaissent.
Nous comprenons dès lors
à quel point est fondamentale la remise en question de l'expression au début de
notre siècle. En effet, au 20e
siècle, des metteurs en scène vont s'élever contre la mainmise de la
bourgeoisie sur les spectacles et contre son conformisme exagéré. Si ces tentatives ne mènent pas directement à
la renaissance des arts de la rue, elles l'ont tout de même favorisé. Elles vont en effet permettre de reconsidérer
le rapport entre les artistes et le public et redécouvrir que le spectacle
n'est pas forcément lié à un bâtiment conventionnel mais qu'il peut investir
d'autres lieux, et même qu'il y est obligé s'il ne veut pas mourir asphyxié.[22]
4.3
1968
Les événements de mai 68
accélèrent l'émergence du spectacle de rue.
L'heure est à la marginalité, au refus du système et l'attitude à
l'égard de la culture est remise en question.
De plus en plus de troupes s'expriment et descendent dans la rue qui
redevient pendant cette période un lieu de discussion et de réunion. L'idée est de redonner au spectacle sa valeur
de fête populaire, qu'il redevienne l'occasion de se réunir pour faire la fête.
Le Magic Circus joue
souvent ses parades dans la rue. Ce sont
des spectacles bariolés, provocateurs, chahuteurs, qui déclenchent des émeutes
sur leur passage.[23]
Ce sera surtout pendant
les années 80 que le spectacle de rue commencera vraiment à s'épanouir. C'est en effet à cette époque qu'il passe
d'une situation marginale à une fonction culturelle reconnue. Les festivals se mettent en place...
4.4
Jusqu'à nos jours...
A la fin du 19e
siècle, se développe un courant populaire de "spectacle pour le
peuple" c'est-à-dire, qui permettrait l'expression des masses. Il s'agit de conquérir un public qui ne se
rend habituellement pas au spectacle et de l'initier.
Depuis le début des années 80, les arts de la rue sont
en plein essor. Les troupes de rue se
multiplient chaque année et des festivals comme celui d'Aurillac ou de
Chalon-sur-Saône réunissent des milliers de spectateurs. Tout permet de croire que le spectacle de rue
à encore de très longues années devant
lui!
On revendique un "théâtre pour tous", qui
rassemble le plus grand nombre et rejette les discriminations sociales.
"Rien n'empêche plus la roulotte des
saltimbanques
d'emporter très loin
son théâtre éphémère..."
Pierre Moinot[24]
Chapitre 2 : Les différentes formes du spectacle de rue... |
1. Le théâtre
de la Foire
Dès le début du 17e
siècle, on trouve sur ces foires des faiseurs de tours de passe-passe, puis des
funambules, des acrobates sur échasses, des montreurs d'animaux savants et de
marionnettes.
Il a dès le début les
faveurs du public. En effet, les Forains
se heurtent au monopole de la Comédie-Française désertée par le public à force
de vouloir respecter la tradition. La
Foire offre au public ce qu'il ne peut pas trouver à la Comédie-Française : la
fantaisie, la liberté d'imagination et la critique burlesque de la
société. Tout y est prétexte à faire
rire. La noblesse et l'autorité royale
sont ridiculisées. Aussi le pouvoir
royal, à mesure qu'il devient autoritaire, renforcera les interdictions. Mais celui-ci réussira chaque fois à
détourner la loi. A l'interdiction de
l'usage du dialogue, il répond par le monologue. Le public ravi se presse pour découvrir les
dernières parades aux interdictions.
Il faut souligner combien
les luttes pour sa survie ont marqué son caractère, fait son originalité et
instauré une complicité exceptionnelle avec les spectateurs.
Au 18e siècle,
les Forains seront enfin tolérés. On
leur reconnaît le droit de jouer mais cette considération marquera aussi la fin
de leur pouvoir. La Foire va lentement
disparaître.
2. La Commedia
dell'arte
Au 16e siècle
éclôt en Italie l'art de la Commedia dell'arte qui connaîtra rapidement le
succès dans toute l'Europe. Ce genre
accorde un rôle fondamental à la spontanéité.
L'improvisation est si caractéristique de la Commedia dell'arte qu'elle
fut également appelée "Commedia all' Improviso".
L'acteur est ici
prédominant. Tout est basé sur son
expression corporelle, ses mimiques, son jeu de masque, son pouvoir de
répartie. Les personnes imitées sont des
personnages populaires caricaturés (le Docteur, la Servante, l'Amoureux,
l'Avare,...) facilement reconnaissables.
En effet, la Commedia dell'arte reflète la vie sociale. D'emblée elle instaure un rapport de
connivence avec le public (qui reconnaît dans ces personnages ses propres
voisins, son entourage) et emploie un langage accessible à tous, quelque soit
leur nationalité ou leur classe sociale.
Grâce à la simplicité de
ses effets comiques et à la prééminence du geste sur le texte, la Commedia
dell'arte peut franchir toutes les frontières.
A l'origine, la plupart des troupes sont itinérantes. Elles jouent dans des salles de spectacle
mais souvent en plein air. Ces nombreux
déplacements l'empêchent de s'encombrer d'un lourd matériel, aussi le décor
n'aura-t-il qu'une importance secondaire.
Les artistes sont déterminants. Eux seuls, avec leurs costumes et leurs
masques, suffirent à son succès.[25]
3. Le
"peuple du voyage"
Le cirque se développe
vers le milieu du 18e siècle, alors que les fêtes traditionnelles
s'éteignent. Grâce au cirque, les
saltimbanques, les "gens du voyage", vont pouvoir se retrouver en un
lieu qui leur est propre.
Les premières formes du
cirque furent probablement ces cercles de troubadours qui se formaient autour
d'un équilibriste ou d'un jongleur sur les places publiques.
Dès ses balbutiements, le
cirque a défini son implantation : il a besoin d'un espace rond permettant la
mise en valeur du travail de chaque artiste.
Tous les spectateurs doivent pouvoir apprécier le spectacle, quelque
soit la place qu'ils occupent. On
retrouve souvent ce principe d'implantation en rond dans la rue actuellement.
Les saltimbanques, après
avoir exposé leur art au sein des cirques du 19e et du 20e
siècle, sont redescendus dans la rue. La
plupart des artistes de rue d'aujourd'hui ont conservé le meilleur : le rapport
au public, la magie, le spectaculaire et les prouesses physiques. Mais ils ont aussi gardé ce fameux esprit de
famille hérité du cirque.
Il y a de nombreux
transferts entre les troupes de rue et le cirque. Beaucoup de spectacles de rue sont en fait
des performances de cirque adaptées à la rue (la jonglerie, le monocycle,
l'acrobatie, les numéros de clowns,...).[26]
4. Le théâtre
radical
L'objectif des fondateurs
du "living théâtre", Julian Beck et Judith Malina, était de :
"(...) face à un théâtre qui a toujours soutenu la société aristocratique
et bourgeoise, créer de nouvelles formes sociales en créant de nouvelles formes
d'art, faire exploser le théâtre afin que tout le monde puisse faire des expérimentations".[27]
C'est un théâtre qui, tout en prônant la non-violence, incite à
transformer la société. Il essayera
d'occuper la rue mais ses tentatives échoueront.
Ronnie Davis, en créant
la San Francisco Mime Troupe, troupe ambulante, cherche lui aussi à sortir de
l'institution théâtrale. Ce théâtre de
guérilla s'inspire de la Commedia dell'arte et participe à des mouvements
sociaux et politiques. L'artiste ne peut
pas vivre dans un microcosme mais doit s'engager activement dans la rue pour
montrer la "voie du changement".
Le Bread and Puppet
theatre est probablement la troupe de rue la plus célèbre à cette époque. Elle fut un modèle. Si en 1963, elle est la seule à jouer dans la
rue, d'autres la suivront rapidement.
Son objectif est que
l'art s'introduise dans la vie quotidienne : "pour moi, un poète n'est pas
seulement quelqu'un qui écrit des poèmes, mais quelqu'un qui sort pour aller
les lire aux gens, ou bien les imprime et va les distribuer".[28]
L'art doit devenir aussi indispensable que le pain. Et pas seulement pour le public averti mais
pour tout le monde. Aussi est-il nécessaire de parler un langage simple et
intense, compris par les enfants comme les adultes : le langage des
marionnettes.
Les marionnettes et la
musique (ou plutôt les sons tirés d'instruments étranges) servent également à
surprendre les promeneurs et à créer l'espace scénique, c'est un moyen
fréquemment utilisé par le spectacle de rue pour installer une aire de jeu.
Si ce genre de spectacle
est au service de causes particulières, ce n'est pas, selon Peter Schumann, un
théâtre politique. Pour lui, le
sentiment l'emporte sur la raison. Il ne
faut pas heurter le public, mais le toucher, l'émouvoir. Grâce à la clarté du langage et du
déroulement de l'action, les spectacles du Bread and Puppet sont accessibles à
tous. Ils sont populaires dans l'exact
sens du terme.
Il faut ainsi remarquer
que ce nouveau genre de spectacle, qui débuta en s'opposant à la tradition,
retrouve dès lors les plus anciennes formes de spectacles populaires : les
marionnettes, la Commedia dell'arte, le spectacle de tréteaux,...
Ce nouveau style, prend
conscience qu'il faut jouer là où les gens vivent, travaillent, se rassemblent
et non plus les faire venir dans une salle de spectacle.
" Paris flon flon
T'as l'âme en fête
Et des millions
Pour tes poètes
Quelques centimes
A ma chanson
Ca fait la rime
Et c'est si bon".
Léo Ferré
Chapitre 3 : Les lieux de travail |
Stressés, pressés, soucieux,...s'engouffrant dans un
bureau, un bus, une bouche de métro...les gens ont le nez baissé vers le sol,
seuls, courbés par le fardeau de la vie de tous les jours!
La rue, cela fait longtemps que l'on ne s'y attarde plus...
Heureusement, un jour, des saltimbanques sont apparus pour nous faire prendre
conscience que la rue pouvait être synonyme de rencontre, de plaisir, de
fête! Ils sont là, ces poètes et
chanteurs de rue, authentiques artistes qui font la joie des passants!
1. Le quartier
Beaubourg
Le Centre national d'art contemporain (CNAC), ou
Centre Georges Pompidou, situé sur le plateau Beaubourg a ouvert ses portes au
public en janvier 1977.
L'édifice est vite devenu la première attraction touristique de Paris,
dépassant la Tour Eiffel.
Cette affluence de visiteurs a attiré vers le parvis
du Centre les saltimbanques de Paris. A
tel point que ce parvis est devenu lui-même une attraction touristique. Le parvis est le seul endroit de Paris où le
travail des saltimbanques est toléré.
Les saltimbanques n'ont pas attendu l'ouverture du Centre Georges
Pompidou pour offrir du spectacle dans les rues de Paris. Depuis 1977, voulant
aller au-delà de la tolérance que leur montre la police à Beaubourg, ils
continuent d'offrir leurs numéros à travers Paris.
Les saltimbanques et l'animation qu'ils engendrent sont, en effet,
devenus un ingrédient important de vie dans la rue.
Le parvis du Centre Georges Pompidou a été conçu par
ses créateurs pour favoriser la communication entre les hommes. Une partie de cette communication est prise
en charge par les saltimbanques, pour qui la place est devenue un lieu de
travail.
Un centre culturel ayant pour vocation de proposer la
Culture à tous et la présence d'hommes
de tous continents, sur un espace dévolu
à la communication font de de Beaubourg un havre de liberté et de tolérance.
2. Autres
endroits de Paris
En dehors de Beaubourg, les saltimbanques se
produisent à d'autres endroits, peut-être plus spontanés, moins
"récupérés", mais où ils risquent aussi d'être davantage dérangés par
la police. Cependant, certains endroits
à grande fréquentation, comme la tour Eiffel et le plateau du Trocadéro, ne s'y
prêtent pas du tout. La police y est
alerte et le public indifférent.
Les attroupements sont également dispersés avec promptitude aux
Champs-Elysées, à l'Opéra et à la Madeleine.
D'autres endroits apparaissent aux bateleurs plus
propices aux spectacles. Pigalle jouit
d'une certaine renommée parmi les cracheurs de feu. Un d'entre eux prétend y gagner 1000 FF en
une soirée entre 20 et 24 heures. Un
autre cracheur aurait gagné 1500 FF entre midi et minuit.
Le public peut aussi rencontrer les saltimbanques à
Saint-Michel, Montparnasse et au Forum des Halles. L'animation dans le métro sera décrite plus
loin. A côté des endroits institutionnalisés,
reconnus, existent bien entendu, les terrasses des cafés des grandes artères.
L'endroit le plus recherché est
Saint-Germain-des-Prés. Ce quartier
étant surtout un espace de vie nocturne, c'est le soir que s'y produisent les
bateleurs. Ils affluent, dès que les
soirées de printemps sont assez chaudes, à la tombée de la nuit, devant le café
des Deux Magots.
Depuis 1981, la police tolère les spectacles à ces endroits.
Les saltimbanques affirment à l'unanimité que le
spectacle produit à Saint-Germain est de meilleure qualité que celui de
Beaubourg. Pour Claude Reboul,
"c'est le truc culturel" comparé à l'ambiance "davantage
prolo" de Beaubourg.
Tous sont d'accord sur un point : ce public est plus généreux, mais il
réclame du bon spectacle en échange du billet offert. Dans la mesure du possible, on cherche à
maintenir le haut niveau du spectacle par la non-approbation des artistes de
qualité inférieure.
3. Le Métro
Un dernier cadre important de spectacles est le métro,
utilisé essentiellement par des musiciens.
Pour les musiciens du métro, il existe trois secteurs : ouest, centre et
sud-ouest, qui ont pour noyaux les stations Concorde, Châtelet et Montparnasse[29].
Les stations sont jugées en fonction de l'acoustique, la propreté,
l'aération, la présence plus moins régulière de la police et de la
concurrence. Il existe des lignes et
stations "chaudes", où les incidents sont plus fréquents qu'ailleurs
(bagarres).
La règle veut qu'un musicien n'occupe pas une place
plus de deux heures et demie.
"Ceux qu'on supporte pas, ce sont les types qui, au nom de la
liberté, s'installent n'importe où, font n'importe quoi et restent autant de
temps qu'ils le désirent, quand bien même cela porte préjudice à l'ensemble de
la communauté"[30].
La police du métro est généralement appelée la "mafia", car
certains agents recevraient de l'argent des mancheurs et des sauvettes".[31]
A Bruxelles, les musiciens peuvent obtenir depuis peu, une autorisation pour
jouer de leur instrument à certains endroits;
Ceci malgré la circulaire ministérielle du 10 juin 1997 qui interdit aux
artistes de se produire dans les stations de métro ou de prémétro.
Des pancartes présentant des clefs de sol invitent les
artistes à jouer. Ces emplacements leur
sont spécialement réservés.
Une centaine ont été prévus par la Stib sur l'ensemble du réseau. Joueurs de flûte, de guitare ou d'harmonica,
ils sont nombreux à arpenter couloirs et rames de métro bruxellois en quête de
quelques francs.
Cette autorisation est valable trois mois durant. Elle est renouvelable, sauf s'il y a eu plainte contre le demandeur. Précision importante, cette autorisation est
gratuite.
Deux photos, pas d'antécédents malencontreux connus du
service de sécurité et une demande d'accréditation sont les seules conditions à
réunir pour recevoir la précieuse autorisation de la Stib. Un badge leur permet ainsi, à certaines
heures, d'égayer l'accès au métro. Bravo
la Stib!
Christelle est une des personnes a avoir demandé une autorisation
officielle.
"Je me suis rendu au service commercial de la Stib et j'ai reçu
mon badge. On m'a dit où et quand je
pouvais jouer. Les endroits proposés ne
sont pas toujours bien situés. Je ne
vois pas qui jouerait là : c'est en plein milieu d'un escalier! En plus, il y a un courant d'air et on n'entend
rien. Mais c'est toujours mieux qu'avant
où on ne pouvait aller nulle part..."[32]
3.1 Des
artistes taxés comme les ambulants...
Le plus souvent, on peut rencontrer quelques musiciens
dans le couloir qui relie le métro à la Gare centrale. Les joueurs s'y relayent toutes les deux
heures. Certains y sont en possession
d'un autre type d'autorisation. Celle
octroyée par la ville de Bruxelles, qui n'est pas gratuite...
Cette carte coûte 450 francs belge. Elle est valable un mois. Il s'agit en fait d'une taxe sur les
commerçants ambulants.
4. La rue
Tout d'abord, il faut
savoir ce que l'on entend par "la rue".
Nous savons qu'il y a une différence entre la rue (lieu de passage) et
la place (lieu de rassemblement). Mais
il nous fait aussi distinguer la rue commerçante (où les gens entrent et
sortent des magasins, ont le regard attiré par les vitrines et sont moins
attentifs) de la rue piétonne des quartiers anciens (fréquentés par les
touristes, par les flâneurs, généralement plus disposés à s'arrêter pour
regarder un spectacle).
De même, il faut dissocier les espaces des banlieues et des cités
surpeuplées des espaces des quartiers aisés, ceux des zones de trafic, ceux des
parcs,...
Le choix du lieu n'est
pas indifférent et certains sont bien plus accueillants que d'autres : la place
de Beaubourg est par exemple un endroit spécifique, où l'on se rend pour
"voir" quelque chose. Les
artistes y ont leurs emplacements et le public y est disponible. Mais les endroits comme celui-ci sont rares.
Les artistes qui se
produisent pour la première fois dans la rue y rencontrent d'abord de
nombreuses difficultés : le public n'est pas là d'office, ou alors il est trop
mouvant ou trop proche.
Leur première tâche sera donc de délimiter un espace dans lequel pourra
venir s'inscrire l'activité et de créer l'espace de la représentation.[33]
4.1 La rue de "survie"...
Certains artistes de rue
vivent de leur art au jour le jour.
Situés en dehors des circuits culturels, ils ne vendent pas leurs
spectacles sur contrat, ne décrochent pas de place dans la programmation des
festivals. Pour gagner leur vie, ils
passent le chapeau à la fin de la représentation. On appelle cette pratique la rue "de
survie".
La rue de survie connaît
de nombreuses lois, une sorte de règlement intérieur. Une de ces lois, par exemple, est d'attendre
son tour pour jouer lorsqu'il n'y a pas assez de place pour tous.
Ce milieu est hiérarchisé. Les cracheurs de feu sont ainsi considérés
comme les plus endurcis et sont en général très respectés. Ils n'hésitent parfois ^pas à
"casser" le cercle des autres artistes et à racoler leur public. Il s'agit par conséquent d'un milieu assez
fermé, dans lequel il faut savoir se faire accepter.
La dépendance financière
pousse ces artistes à attirer toujours plus de spectateurs.
"...Ils ont des poids, ronds ou
carrés
Des
tambours, des cerceaux dorés.
L'Ours
et le Chien, animaux sages
Quêtent
des sous sur leur passage."
Apollinaire.
Chapitre 4 : Le bateleur et son environnement... |
1. Le public du
spectacle de rue...
Il se caractérise par le
mode de relation qu'il entretient avec son public. Il a déjà été évoqué à quel point cette
notion de "rapport au public" est importante.
En effet, pour qu'il y
ait activité, il faut des "regardés" mais aussi des
"regardants". Un personnage
clef, quoiqu'il n'apparaisse pas sur scène et semble ne rien produire, c'est
pourtant bien le spectateur!
Selon l'expression de
Michel Crespin[34]: " à la différence
d'une salle de spectacle où le spectateur est prédéterminé, les acteurs sont
face à tout le monde".
L'intellectuel comme celui qui n'est pas allé à l'école, voire celui qui
a une autre culture, il s'agit d'intéresser tout le monde, l'ingénieur comme la
ménagère, les enfants comme les personnes âgées,... sans discrimination. Tous ces gens différents, aux demandes
différentes, forment le public potentiel du
spectacle de rue.
Contrairement au
spectacle en salle qui vit l'angoisse constante de la trouver vide, le
spectacle de rue rencontre toujours son public.
Sauf à de rares exceptions ( un temps pluvieux ou froid, un événement
unique à la télévision,... les passants
s'arrêtent quasi toujours devant un spectacle de rue. Qu'ils choisissent de rester ou de partir est
un autre problème, qui dépend bien souvent de la qualité du tour ou de leurs
goûts personnels.
C'est un véritable dialogue que l'artiste entretient avec son public!
Dans "Paris la fête" Claude Jacquin évoque
les relations entre les bateleurs et le public de la rue.
"Quand un bateleur
arrive quelque part, c'est la fête. Ce
sont des rapports qui s'installent, des dialogues qui se nouent entre l'artiste
et le public. Ce dernier n'est pas dupe,
il sait faire la part du vrai et du faux, mais dans la rue il a envie de jouer
le jeu, de se laisser bercer... Sans la
harangue le bateleur perdrait de son charme.
Point trop n'en faut, mais lorsqu'elle est subtilement incorporée au
tour, celui-ci devient un instant magique, unique. Il dit qu'il y a un climat qui
s'installe".[35]
Jacquin sait qu'il n'en
est pas toujours ainsi, et laisse la parole à un saltimbanque :
"Il faut arracher le fric au public ! Les agresser pour qu'ils se manifestent
! Les violer pour qu'ils donnent cent
balles ! Leur tirer le porte-monnaie de
la poche ! En un mot, se servir ! Comme des voleurs. Ce sont eux les voleurs, lorsqu'ils se
sauvent avant la fin et que le travail présenté était honnête"[36].
Le contact avec le public
est un élément très important pour ceux qui travaillent dans la rue. C'est un sentiment de se retrouver en
famille.
Selon Jacquin,
"l'homme de la rue est le spectateur le plus exigeant qui soit car il n'a
rien payé. Il a tendance à mettre dans
le même sac gratuité et médiocrité"[37].
Un saltimbanque en
donnant sa vision du rapport entre bateleur et public a dit :
"Nous les saltimbanques on est comme des chefs d'états. On nous aime ou on nous haït".
Les enfants jouent
également un rôle important au sein du
public. Les avis des saltimbanques
divergent. Certains artistes ne les
aiment pas car ils dérangent le numéro en traversant le cercle. D'autres observent que les parents envoient
facilement leur enfant payer une pièce.
Un artiste constate que les enfants ne donnent pas beaucoup d'argent,
mais qu'ils attirent les adultes qui, eux, en donnent.
1.1
L'argent...
A en croire certains
articles de presse, le métier de saltimbanque est une véritable mine d'or.
Une partie des
saltimbanques font payer le public après le spectacle, confiants que la qualité
de leur numéro incitera le public à la générosité ou bien conscients du risque
à prendre pour faire respecter le sérieux de leur art. D'autres ne peuvent pas se permettre ce
risque et font par conséquent une quête avant de commencer. D'une manière générale c'est le cas des
cracheurs de feu et des bateleurs qui exécutent des numéros avec un élément de
danger ou de réussite incertaine. La
somme demandée au début est la plupart du temps relative au nombre de
spectateurs rassemblés autour de lui.
D'habitude celui-ci demande en francs la moitié du nombre de
spectateurs. Si ce n'est pas un jour de
grande affluence, où l'on peut compter sur un public nombreux, il est prudent
de ne pas demander une somme trop élevée, car les pièces "tombent"
relativement lentement et le public a le temps de s'ennuyer et de partir avant
que le spectacle commence.
Un saltimbanque avec
quelque expérience a, en général, décidé de ce que vaut son spectacle. S'il ne reçoit pas ce qu'il demande, il peut
renoncer a exécuter son numéro, surtout si celui-ci comporte un danger.
Il n'est pas toujours
suffisant d'insister pour recevoir l'argent du public. Celui qui trouve une astuce comique ou
aimable a plus de chance de l'attendrir.
Par exemple, les
illusionnistes prennent volontiers recours à la magie pour faire tomber les
pièces, tel celui qui place un petit bol devant lui après le spectacle en
disant attendre qu'il se remplisse miraculeusement.
Autre variante : le jeu de l'humilité. Une fois terminé le numéro, le bateleur dit
: "si ce numéro n'a pas manqué de
vous plaire, mettez dans le chapeau ! J'accepte
les billets". Des cracheurs de feu
conciliants demandent leur somme fixe mais ajoutent que ceux qui ne veulent pas
ou ne peuvent pas payer sont quand même invités à regarder leur spectacle.
Nous avons vu dans la
première partie de ce travail, comment l'automate incorpore la quête à son
spectacle et la transforme en attraction.
Il est évident que quand les gens ne se sentent pas arnaqués, ils
donnent plus volontiers une pièce de monnaie.
Certains engagent une
personne pour faire leur quête. Un
musicien, a remarqué que lorsqu'il joue un morceau de Chopin ou Mozart, les
gens lui donnent plus d'argent. Comme si
le nom d'un compositeur célèbre augmentait la valeur de l'exécution.
Il arrive que les
spectateurs ont aimé ce qu'ils ont vu et qu'ils veulent le montrer, mais qu'ils
n'aient pas d'argent à donner aux bateleurs.
Au lieu d'argent ils donnent souvent des chewing-gum, des cigarettes,
des tickets de métro, des raisins, de la bière,... De l'autre côté, il y a ceux qui tiennent à
monter qu'ils donnent et qui en réalité s'avère n'avoir donné que des cailloux,
des boutons de culottes, etc. ... Dans
la catégorie sont aussi incluses les petites pièces de monnaies
étrangères. Les pièces françaises de
valeur inférieur à un franc, sont méprisées.
2. Les voisins.
Dès le début, les
riverains ont manifesté leur mécontentement contre l'animation dans la
rue. Pour un des habitant de la place
Beaubourg, après cinq ans de nuits blanches pendant la construction de
l'édifice, les bruits des saltimbanques et du cirque sur la place ne peuvent
que les exaspérer encore plus. Des riverains
ouvrent leurs fenêtres pour jeter des seaux d'eau, des cailloux, des œufs
pourris ou des pots de chambre sur les saltimbanques. Selon les témoignages de ceux-ci. Mais ce geste n'a rien d'innovant, il s'est
plutôt répété à travers les siècles.
3. L'attention
de la presse.
C'est surtout en été que
l'attention de la presse se dirige vers l'animation de la rue. En effet, la moitié des articles publiés
chaque année sur les bateleurs ont paru durant la saison touristique.
La presse décrit très
souvent les moments passés avec les saltimbanques, en utilisant les termes de
"fête foraine" ou "fête populaire" et établissent de
nombreuses comparaisons avec les jongleurs du Moyen-Age. Mais ils ne sont pas toujours bien considérés
par cette dernière : "Ceux qui
attirent l'attention des foules et les font même s'arrêter un moment sont des
parias, des repris de justice, mi clochards, mi vagabonds,..."[38].
Certains saltimbanques
sont nommés, photographiés et prennent la parole plus souvent que
d'autres. Les divers courants de la
presse réagissent différemment aux actions de la police : la presse de gauche dénonce, souvent avec
virulence, les manières expéditives de celle-ci, surtout lorsqu'elle se trompe
de cible en intervenant contre les saltimbanques. La presse de droite approuve l'assainissement
du racket, mais oublie ou ignore les passages
à l'acte contre les bateleurs.
En juillet 1979 la presse
de droite se déchaîne contre "la cour des miracles" et passe sous
silence les violences policières signalées par le Nouvel Observateur[39].
3. Mais que fait la police ?
Claude Reboul, se voit attribuer un P.V.
Le scandal de Philippe Petit 1969
5. Les
saltimbanques jugés par les saltimbanques.
Les rapports se bornent la plupart du temps, à
des relations collégiales. On juge ses
collègues par le spectacle. Mais
l'argent sert aussi d'indicateur. Dans
la logique du métier on ne peut pas gagner beaucoup en faisant un mauvais
spectacle. Par conséquent, bonne recette
égale bon spectacle.
Certains artistes ne cherchent qu'à gagner un maximum
d'argent pour pouvoir quitter la rue.
D'autres, au contraire, veulent vivre dans la rue, quitte à ne pas
gagner d'argent.
La plupart des artistes
évoquent les cracheurs de feu en termes négatifs. Ils s'offusquent de leurs tenues et les
qualifient de "clodos" et "chiffons" alors qu'eux
s'habillent correctement et font une
recherche de costumes.
Les cracheurs de feu doivent faire attention à ne pas
se présenter avec les clous de sa planche pointant dans tous les sens, de
couvrir ses bouteilles cassées pour éviter que des enfants se fassent mal, et
de cracher vers le ciel plutôt que de cracher horizontalement vers le
public. De plus, la saleté et le style
"loubard" effrayent le public.
Une autre source d'irritations est leurs cercles très
large (nécessaire pour éviter les accidents de flammes).
Gilbert crachent du feu 2006
Comme tout saltimbanque,
les cracheurs de feu sont fiers de leur numéros et vantent leurs exploits, en
même temps qu'ils jalousent et dévalorisent ceux des autres.
Le jugement des saltimbanques sur les cracheurs de feu
est très sévère. Le métier de cracheur
de feu n'est pas sans danger et il convient de bien l'apprendre, même si les
éléments de base restent les mêmes :
avaler du feu , en cracher, passer les flammes sur son corps, s'évader
des chaînes, se poser dans du verre cassé et sur des planches à clous.
Celui qui ne maîtrise pas l'art de cracher risque de se brûler
gravement.
5.1
Accords entre saltimbanques...
Les artistes de la rue se
sont organisés pour faciliter leurs rapports professionnels. Dans la réalité, le partage n'est pas si
facile. Des gens s'installent où ils
veulent. Les cracheurs de feu et autres
qui ont besoin de leur voix pour leur spectacle se plaignent des Arabes qui
noient tout avec leur musique de tam-tam.
Les musiciens d'instruments à faible portée sont mécontents des
musiciens avec cuivres et amplificateur électriques, qui s'installent à côté
d'eux, couvrant entièrement leur musique.
En dehors du problème de la répartition de l'espace,
se pose aussi la question des spectacles simultanés. Pour être solidaires, les saltimbanques
doivent se relayer avec leurs spectacles, et ainsi se passer l'un et l'autre le
public.
Il
arrive que les artistes présentent des numéros ensembles. Il arrive également que des musiciens
accompagnent un artiste travaillant avec son corps (par exemple le mime).
On constatera malheureusement, que bien souvent les relations, purement
professionnelle, sont souvent empreintes de jalousie et de rivalité.
On peut se poser la
question de la contradiction entre le souci de certains baladins de se
qualifier de marginaux et leur difficulté de se passer d'un minimum
d'organisation pour travailler dans des conditions acceptables.
Chapitre 5 : de la scène à la rue... |
La scène, avec sa structure cubique et close, boîte
d'illusion, dont les images en trompe l'œil reproduisent les fantasmes du
spectateur changé en voyeur; la salle, avec son ensemble de structures
compartimentées et hiérarchisées en loges et balcons, emprisonne et sépare le
public selon les normes d'une société de classes conçue comme inchangeable.[40]
La salle et la scène sont des univers repliés sur eux-mêmes.
Dans cette perspective,
Brecht préconisera la disparition de la scène qui endort l'esprit
critique. Il veut un espace neutre, un
lieu vierge, non canoté à l'avance. Ce
lieu idéal serait l'espace de la rue. La
rue n'est-elle pas justement un lieu fortement chargé de signification?
"cela d'abord parce
que, outre qu'elle est par excellence un lieu social, la rue est lieu de
passage. Elle refuse la distinction
entre l'ici et l'ailleurs. La coupure de
la scène ne l'isole pas du reste du monde.
Elle ne la privilégie pas non plus : ce qui se passe sur la scène de la
rue pourrait se passer ailleurs, hors des limites de cette scène. Ce lieu est fait pour être parcouru."[41]
1. Avantages et
inconvénients...
Les bateleurs viennent d'horizons différent
: de familles pauvres ou riches,
diplômés ou non. Tous les artistes ne
vivent pas des seules recettes de la rue.
Certains se produisent en salle, d'autres ont une activité
professionnelle sur le coté.
Les musiciens jouent souvent pour le plaisir ou pour
s'entraîner à jouer devant un public. Un
rêve qui revient chez la plupart des saltimbanques est d'avoir son propre
établissement. Beaucoup travaillent dur
dans le souci de prouver qu'ils ne sont pas des "clochards". D'autres vivent de ce qu'ils gagnent et ne
cherche pas à tout prix à gagner de l'argent.
Quelques uns désirent vraiment vivre dans la rue et se soucient peu que
leur travail rapporte des recettes maigres.
Avant que l'animation soit tolérée dans toute les
zones piétonnes, la police intervenait fréquemment, mais ces interventions,
aussi gênantes fusent-elles, rompaient l'impression de travailler dans un
bocal.
Les saltimbanques oscillent entre les deux pôles que
constituent la rue et l'engagement dans un établissement. Tout en vantant les contacts de la rue, ils
s'enorgueillissent de trouver des engagements qui confirment leur talent. On retrouve ceux qui ont quitté les salles et
chapiteaux, ceux qui alternent entre les contrats de la rue et ceux qui
espèrent être découverts.
Les bateleurs ayant travaillé en salle évoquent
souvent les rapports anonymes avec le public et le prix que celui-ci doit
payer. Dans la rue, contrairement à la
salle, ce sont ceux qui aiment qui restent.
Dans les salles, il y a un fossé
entre le public et l'artiste.
L'idéal pour eux, est de travailler dans la rue l'été
et essayer de décrocher des engagements en salle lorsque arrivent les jours
plus froids. Certains artistes de rue,
considèrent les contrats comme une atteinte à leur liberté. A quoi bon signer un contrat qui aura lieu
deux mois plus tard... Il ne sait pas
dire où il sera à ce moment là !
En opposition à la rue,
au cabaret le public a payé sa place et est installé. Dans la rue, il faut aller le chercher
soi-même. Même si le public de la rue
est plus éprouvant, il est également plus instructif. Lorsqu'ils entrent sur scène, tout est
préparé. Dans la rue, il doit tout
préparer lui-même, voire même renoncer à certains spectacles à cause du vent.
Pour ceux qui travaillent
en salle et qui redescendent dans la rue, dès que l'opportunité se présente diront toujours :"La rue, c'est comme à
la maison !".
Si les saltimbanques sont
mentionnées avec sympathie dans les guides touristiques, les auteurs ne leur
consacrent que quelques lignes de leurs chapitres. Quelques exemples :
·
"Devant
le centre, une piazza en pente douce - matérialisation de l'idée d'accueil -
est le théâtre d'animations diverses"[42].
·
"L'on
n'est pas loin de penser que les amuseurs publics, les joueurs de guitare, les
cracheurs de feu sont les frères lointains des bateleurs et des jongleurs du
Moyen-Age"[43].
·
"Les
fins de semaine ou pendant les vacances il suffit d'observer de là-haut, la
terrasse, la foule qui se presse aux portes, sur le parvis, qui entoure les
bateleurs, musiciens et cracheurs de feu, pour comprendre que le centre historique
de Paris, en quelques année, est aussi redevenu le centre de sa vie
moderne."[44].
·
"En
sortant du Centre Pompidou, tu auras une agréable surprise. Certains jours, il y a une animation
intense. Ecoute le boniment des camelots
et les musiques improvisées; ne t'approche pas trop près du cracheur de feu et
regarde où tu mets les pieds, au cas ou la mascotte du charmeur de serpents se
serait échappée. Spectacles surprenants
et souvent renouvelés".
2. Les
caractéristiques du spectacle de rue...
La première
caractéristique du spectacle de rue est d'être un art populaire.
Populaire, car il est réellement ouvert au
public. Il se "mêle au peuple"
et sa nature très visuelle lui permet ainsi de toucher des publics d'origines
sociales et culturelles très différentes et même de passer les frontières.
Populaire car il investit
l'environnement des gens, s'insère dans leur décor quotidien, dans leurs
habitudes, dans leurs vies de tous les jours et leur présente souvent des
personnages proches d'eux-mêmes.
Populaire enfin, car le
spectateur y est interpellé : qu'il devient comédien malgré lui et tout d'un
coup se retrouve dans le cercle et participe à l'événement.
Le spectacle de rue
s'attache à réaliser ce grand rêve de "l'art au quotidien.
Un spectacle qui se
produit gratuitement dans l'espace public, s'adresse à tous sans
discrimination, permet au public d'intervenir, est par définition est art
populaire.
3. L'espace
public.
Nous avons vu
qu'autrefois la ville s'offrait naturellement aux spectacles. Les représentations animaient spontanément la
cité, lui apportaient une aire de liberté.
Les espaces publics
étaient alors considérés comme à la disposition des citadins. La rue, par exemple, n'était pas seulement un
lieu de circulation comme elle l'est devenue depuis le 19e et
surtout le 20e siècle, mais elle était également un espace
d'échange, de réunion, de fête qui connaissait ses marchés, ses saltimbanques,
ses cortèges,... Ce qui nous semblerait aujourd'hui désordre et confusion était
à l'époque considéré comme normal.
A l'heure actuelle, la
plupart des espaces publics ont perdu leurs fonctions premières. Les fêtes et les spectacles populaires ont
peu à peu disparu du paysage urbain.
Tout se contraint à l'ordre de la société urbaine.[45]
Aujourd'hui, le théâtre
de rue cherche à redonner une autre dimension aux espaces publics. Le quartier de la Défense à Paris, est le
type même d'un espace fonctionnel ( bureaux, peu de commerces, de bars et
restaurants). Composé d'une immense
esplanade entourée de buildings, il ne favorise pas les échanges ou la
convivialité.
Le spectacle de rue a
également pour but de montrer une image de la ville que les habitants ne
connaissent pas. En effet, le décor dans
lequel on vit a trop souvent tendance à être considéré comme banal, sans
intérêt. Ce genre de démarche incite à
l'observer, à le percevoir différemment.
L'enjeu est d'animer la ville, c'est-à-dire de lui donner une âme...
4. Spectacle de
rue ou spectacle de plein air...
Le spectacle de plein air
est celui qui se produit dans les lieux non couverts, tels que les sites
historiques, les parcs,... Il se
différencie totalement du spectacle de rue.
Il requiert un aménagement préalable de l'espace, demande une
infrastructure importante et entretient avec le public le rapport classique
scène/salle, l'improvisation n'y joue pas un rôle important!
La démarche des artistes
de rue est fondamentalement différente.
Ceux-ci ne se produisent qu'exceptionnellement en salle. Leurs spectacles se donnent dans des lieux
chaque fois différents et s'adaptent à ces lieux nouveaux tandis que les
spectacles de plein air sont conçus pour un endroit déterminé et exigent d'être
entièrement retravaillés lorsqu'ils doivent se déplacer. De plus, le spectacle de rue se produit dans
l'univers quotidien et familier de son public alors que le spectacle de plein
air est joué dans des endroits spécifiques, réservés aux représentations. La relation que le spectacle de rue
entretient avec son public s'oppose ainsi à la conception du spectacle en plein
air.
En effet, s'il veut assister à un spectacle "de plein air",
le spectateur doit décider de se déplacer.
Le spectacle de rue, nous l'avons vu, vient chercher son public à
l'improviste, dans ses occupations journalières et se produit gratuitement.[46]
Conclusion : les artistes
de rue s'opposent à l'ordre de la ville qui exige "une place pour chaque
chose et chaque chose à sa place".
Ils cherchent à transfigurer les espaces de la ville en quelque chose de
merveilleux ou de surprenant. Il s'agit
ainsi de donner au public un regard différent, de lui permettre une relation
nouvelle avec son environnement, de montrer que la ville n'a pas seulement une
fonction utilitaire mais qu'elle peut
redevenir un espace de contacts, de convivialité.
4.1 La
surprise...
Provoquer la surprise du
passant afin de le transformer en spectateur est l'axiome du théâtre de rue :
"choper le passant", le séduire, l'intéresser, l'étonner... Le principe fondamental du jeu dans la rue
est que l'artiste qui n'étonne pas, n'existe pas. L'important est de déclencher l'inattendu.[47]
Quels que soient les
moyens employés, le but reste toujours le même : produire une étrangeté, une
anomalie, afin de donner aux spectateurs potentiels l'envie de s'arrêter pour
contempler le spectacle.
5. Le spectacle
de la rue et la fête...
Pour certains artistes de
rue, le spectacle organisé ne peut être le lieu de la fête. Mais en quoi est-il plus que le spectacle en
salle générateur de fête ?
Dans une salle, les gens
sont également réunis, rassemblés dans un même espace, partagent le plaisir
d'un même spectacle. Mais dans ce cas
précis, le public est contraint à un certain rituel : applaudissements,
rires,... Isolés, contraints de garder
le silence et de respecter un certain nombre de conventions, ils se côtoient
sans réellement partager la joie d'être réunis.
La force du spectacle de
rue est justement de mêler tous les publics, sans barrières culturelles. Dans la rue, les spectateurs ont une totale
liberté de mouvement et d'expression qui leur permet de s'extérioriser comme
ils l'entendent.
Dans notre société, les
occasions de s'arrêter ensemble sur le même trottoir, d'adresser la parole à
des inconnus, de jouir de plaisirs gratuits, sont devenus trop rares. La rue suscite cette joie d'être ensemble,
elle engendre la complicité. Elle pousse
les gens à se parler, à se rencontrer, à communiquer.
Comme le dit Jérôme
Savary : "Le spectacle devrait toujours permettre aux gens de se
réconcilier avec leur propre corps, c'est-à-dire de bouger, de parler, de rire,
de chanter en groupe et de faire du bruit s'ils en ont envie. Trop souvent aujourd'hui, la culture, se
reçoit dans le silence absolu, dans l'ennui".[48]
Certains artistes de rue
rejettent complètement la salle parce que le répertoire ne change jamais. Dans la rue c'est toujours très différent; il
n'y a jamais deux représentations qui se ressemblent.
On peut également voir des troupes présentant des spectacles en salle
aussi bien qu'en rue. Ces deux genres
peuvent s'enrichir mutuellement. Ainsi,
le spectacle en salle a donné aux artistes d'espaces libres, le sens du
professionnalisme; tandis que la pratique de la rue était bénéfique à la salle
puisqu'elle lui a rappelé l'importance du dialogue avec le public et lui a
montré que le théâtre ne devait pas craindre d'expérimenter de nouvelles
démarches.
Toutefois, on ne peut
affirmer à l'heure actuelle que le combat dehors-dedans soit terminé! En effet, le spectacle de rue n'est pas
encore reconnu comme une activité artistique et culturelle à part entière et il
est toujours bien plus pauvre que le spectacle en salle.
Et pourtant, lui aussi à
grand besoin de moyens financiers, d'autant plus qu'il milite pour un "art
social" dont l'accès doit rester entièrement gratuit.
Chapitre 6 : La législation... |
1. La
législation en France...
Les autorités ont tôt
ressenti la nécessité de régler l'activité des artistes de rues. En 1395, le prévôt de Paris intime dans une
ordonnance de ne "rien dire, rien représenter ou chanter sur les places
publiques ou ailleurs, qui puisse causer scandale à peine d'une amende de deux
mois de prison au pain et à l'eau".
L'Eglise redoutait aussi que les saltimbanques détournent les chrétiens
de la foi.[49]
En 1560, il fut interdit
"à tous les joueurs de farce, bateleurs et autres semblables gens, de
jouer les jours de dimanche et fêtes aux heures de service divin, de se vêtir
d'habit ecclésiastique, de jouer des choses dissolues ou de mauvais exemple à
peine de prison et de punition corporelle".[50]
Une ordonnance du
lieutenant de Police, 1609, stipule que "toute farce devrait, avant que
d'être représentée en quelque lieu clos ou non, être communiquée au procureur
du roi".[51]
Jusqu'au début du 19e
siècle, il n'existait pas de législation précise concernant les saltimbanques,
mais au cours de ce siècle sont prises toute une série de mesures. Une circulaire de 1829 préconise une
surveillance accrue des saltimbanques qui, dit-on, cherche à exploiter la
crédulité publique. Les saltimbanques
propriétaires de loges doivent remettre aux autorités locales le programme ou
la description détaillée de leur spectacle.
Aucune atteinte à la religion, aux bonnes moeurs, au gouvernement ou aux
convenances sociales n'est tolérée. Ce
sera la loi de 1830.[52]
La société des
saltimbanques a toujours été considérée avec méfiance, perçue comme dangereuse,
"composée que d'éléments douteux, étiquetés sous les appellations plus ou
moins péjoratives de saltimbanque, bateleurs, escamoteurs.[53]
Pour raffermir le contrôle
des artistes ambulants une circulaire institue en 1853 que les bateleurs qui
veulent exercer devront obtenir la permission du préfet de leur lieu de
domiciliation. Leur demande devra
s'accompagner d'un certificat de bonnes moeurs, délivré par la mairie ou la
police de leur domicile.[54]
Cela aboutit à l'instauration en 1863, du carnet de saltimbanque.[55]
Ces carnets furent utilisés jusqu'en 1975.
Aujourd'hui, aucune
législation n'est en vigueur. Les
saltimbanques se battent pour avoir un statut et être reconnu au même titre que
les autres artistes.
2. La
législation en Belgique...
Chapitre 7 : Le rôle des festivals... |
Il y a quelques années, les festivals de spectacles de
rue étaient encore peu fréquentés. Ce
genre étant encore considéré comme peu sérieux et non professionnel, ne
méritait pas qu'on s'y attarde et ne possédait pas encore son propre festival.
Les saltimbanques veulent
être considérés comme des professionnels.
Un sentiment de ras-le-bol se précise : "on en a marre de faire les
clowns ou de faire de la soupe sur les parvis des maisons de la culture"
protestent-ils alors.
Des festivals spécifiques
de spectacle de rue s'organisèrent enfin.
Leur nombre s'est rapidement multiplié et aujourd'hui, ils s'étendent à
des villes de plus en plus petites qui comptent sur ce type de manifestations pour témoigner de leur vie
culturelle.
En Belgique, depuis
quelques années, les festivals n'hésitent plus à se produire et réussissent à
attirer les foules. Dès lors, on
retrouve le "Festival de spectacles de rue de Bruxelles",les
"Fêtes de Gand" qui ont adopté la formule bisannuelle, le festival
"Les Unes Fois d'Un Soir" organisé à Ath. Mais le plus ancien festival est la "Fête
des Artistes et Artisans".
Conclusion
Nous pouvons au terme de ce travail, avancer les
éléments d'une définition du spectacle de rue en nous basant sur ses
caractéristiques les plus fréquentes et en écartant les différences les moins
significatives.
Tout d'abord, il s'agit bien d'un genre à part
entière. Il s'est hissé au niveau du
professionnalisme et demande un travail aussi intensif que le spectacle en
salle. Ce n'est donc pas un
sous-genre. Le spectacle de rue demande
un profond investissement de la part des artistes.
C' est avant tout un art social, un art
populaire. Au cœur de sa démarche,
réside la volonté de toucher des spectateurs qui ne viennent pas dans les
salles de spectacle et de les rencontrer dans leur environnement quotidien.
Malgré son manque de moyens financiers, il tient à rester entièrement
gratuit et ne considère jamais son public sous l'angle de la rentabilité.
Il cherche à établir avec le public, un rapport de
complicité : il abolit ainsi le traditionnel monologue qui s'installe dans une
salle et le remplace par un véritable dialogue ou chacun, public et artistes,
peut s'exprimer librement. Grâce à lui,
le spectateur n'est plus un quelconque consommateur de divertissement culturel
mais bien un partenaire à part entière.
Lié à la fête, il est générateur de désordre. Il perturbe nos habitudes, bouleverse les
idées reçues. Le spectacle de rue se
permet certaines choses envers son public que celui-ci n'accepterait pas
toujours en salle.
Ce spectacle indépendant peut, dans une certaine
mesure, se permettre de tourner le dos aux institutions. Son histoire est parsemée de querelles avec
l'autorité.
Autrefois, les villes et places fortes accueillaient
les marchés. Les visiteurs des foires
venaient pour acheter et vendre des marchandises. Les saltimbanques et leur succession de
numéros égayaient les foires mais la vision de leur spectacle n'était pas
l'objectif majeur des visiteurs.
Que ce soit à Beaubourg ou ailleurs en Europe, les
saltimbanques d'aujourd'hui ne sont pas "LA" cible principale des
visiteurs et touristes. Leur renommée ne
leur permet pas de concurrencer les sites officiels. Que l'on ne s'y trompe pas, c'est plus pour
le Centre Culturel de Beaubourg que pour les artistes de rue, que la majorité
se déplace.
Il en résulte que les bateleurs sont obligés de suivre
les heures d'ouverture des magasins, musées ou monuments. Ils précèdent les flux de visiteurs et attendent les heures
chaudes.
Bien souvent, la loi du plus ancien voire du plus
fort, l'emporte pour s'attribuer les meilleures places. Ces dernières varient aussi en fonction du
spectacle présenté.
Les saltimbanques sont trop nombreux et ont des
motivations trop variées pour former un groupe homogène. A l'intérieur de la communauté saltimbanque, règne une hiérarchie officieuse. L'expérience, la qualité du spectacle et les
recettes en délimitent les contours.
Si les rapports entre saltimbanques sont distants, les
rapports avec les musiciens sont presque inexistants. En effet, la présence des musiciens et leurs
répertoires bruyants nuisent aux spectacles des saltimbanques.
Les aspirations des saltimbanques oscillent entre la
liberté dans la rue, le contact direct du public et le prestige que confère les
contrats d'animations organisées ou les représentations sur scène. En dehors de
leurs préoccupations pour la qualité des spectacles, les bateleurs se soucient
de leurs rapports avec le public.
Malgré leurs attitudes parfois méprisantes, la plupart d'entre eux
s'efforce de montrer un bon spectacle, car de l'appréciation du public dépend
leur subsistance. En même temps, ils
essayent de favoriser la communication.
Ce désir de provoquer des rencontres, quoi que sincère, reste mal défini
et il leur est difficile de démontrer des résultats tangibles.
Les rapports entre saltimbanques et public restent
empreints d'une compréhension relative. Le public a la sensation de communiquer
et de communier davantage avec les musiciens.
La communication dont les bateleurs se veulent les promoteurs ne semble
pas être celle que cherchent le public.
Malgré le manque de communication, les visiteurs continuent à trouver
agréable de passer des après-midi entiers sur ces lieux animés par les artistes
de rue.
L'appui des médias, la faveur et la ferveur du public
ont naturellement pesé dans l'attitude de la police vis-à-vis des spectacles. Les interdictions ont été converties en autorisations, limitées
certes, de se produire à des endroits nommés.
De plus, les relations avec l'autorité sont
meilleures. Les reproches envers la
police sont rares. Les bateleurs
trouvent qu'elle devrait davantage les protéger contre les perturbateurs. Sinon, le calme plat...
Cette bienveillance policière n'est pas étrangère à une volonté
politique d'humaniser la ville. La
création de rues piétonnières et la tolérance vis-à-vis des bateleurs, vont dans
ce sens, voulant par là même confirmer les bonnes habitudes prises au
Moyen-Age.
Hier comme aujourd'hui, le spectacle de rue envahit un
espace pour y introduire le sien et ainsi laisse un souvenir dans les mémoires.
Il nous permet de nous réapproprier notre environnement, d'y retrouver un
espace de contacts...
Interviews de quelques Saltimbanques et Avocat.
L’Avocat Bernard Jouanneau
Et
c’est là qu’il m’a dit mon Ca a été pour moi une aventure personnelle qui a
duré plusieurs années et qui a marqué un peu ma vie d’avocat parce que je suis
un grand amateur de curiosité de la ville et de Paris en particulier où je vis
depuis toujours et la création de cet espace autour de beaubourg m’a attiré dès
l’origine , dès l’inauguration de Beaubourg en 1977 . Et celui que j’ai défendu
plus particulièrement qui s’appelle John Guez a commencé là en 1977 près de
l’église St Merri et je l’ai repéré tout de suite et ce qu’il faisait me
fascinait , je dois préciser même que je l’avais rencontrer dans un cabaret
parisien où il faisait un numéro d’artiste , de saltimbanque mais sur une scène
et le soir où je suis alleé dans ce cabaret nous étions ma femme et moi les
deux seuls spectateurs dans une petite salle de cabaret où il y a des
spectacles qui se renouvellent toutes les 20 minutes et il m’avait fasciné ,
j’avais même éprouvé une sorte de frisson artistique assez rare d’ailleurs
quand on va au spectacle et après le spectacle j’avais demander à le métier
c’est d’etre artiste , je voudrai faire du theatre , du cinéma mais pour
l’instant je vis dans la rue , je travaille dans la rue , et c’est là que j’ai
suivi pas à pas ce qu’il faisais et donc sur un plan personnel à la fois
artistique et urbanistique j’ai éprouvé un très vif interet pour ce que faisait
John Guez.
Et puis j’ai
contasté que c’était très difficile pour lui de le faire en ce sens qu’il était
constamment en but aux avanies de la police et là j’ai ressenti une violence
urbaine , qui m’a paru inadmissible même une violation des libertés
fondamentales et pas seulement la sienne mais aussi la mienne et la notre en
quelque sorte .
Et
je me suis commis d’office pour le défendre . Je suis d’abord aller l’écouter
souvent , longtemps et puis j’ai regardé ce qui se passait autour de lui,
c’était la magie du spectacle car il arrivait à réunir un public autour de lui
et à faire jouer le théatre sur le pavé à n’importe qui , aux enfants , aux
étrangers , aux parisiens , aux malades mentaux , aux blancs , aux noirs , à
tout le monde avec rien avec des mots . Et ça me paraissait à la fois
correspondre à la vocation de l’endroit , à la notion de liberté d’aller et de
venir que j’avais pour les relations des citoyens dans la ville et à l’exigence
de défense des libertés publiques que j’éprouvais comme avocat . C’était du
pain béni . Et donc je n’ai pas eu beaucoup de difficulté à me mobiliser pour
lui , indépendamment du fait que sa personne m’inspirait une très vive
sympathie . Donc je lui ai proposé mes services quand j’ai vu qu’il était
verbalisé tous les jours , plusieurs fois par jour même par la police . Et j’ai
essayé de mettre mon imagination juridique et mon ardeur de citoyen au service
de la défense de son art et des libertés . Et puis les autres sont arrivés ,
les autres artistes comme Reboul et d’autres qui étaient victimes eux-meme à
différents degrés des persécutions de la police et donc à chaque fois qu’il y
avait des audiences au tribunal de police j’allais au tribunal de police pour
défendre John . J’ai eu quelques bonnes fortunes puisque je l’ai fait relaxer
plusieurs fois de suite , j’ai plaider pour lui des dizaines de fois et à la
cour d’appel . Et le préfet de police a commencé à trouver que cette résistance
etait agaçante et ils ont perdu les pédales. Ils ont pris des mesures exésives
notamment les arrétés municipaux qui dépassait le pouvoir d’intervention du
Préfet de police .
Et
nous avons décidés d’attaquer les arrétés du prefet de police en justice ,
devant les juridictions administratives et j’ai mobilisé facilement des avocats
au conseil d’état sur la question et nous avons obtenu un grand succès puisque
il y a un célèbre arret du conseil d’état concernant John qui est maintenant un
exemple donné aux étudiants en faculté pour apprendre les limites du pouvoir de
police des autorités préfectorales qui dit qu’en matière de réglementation
c’est LA LIBERTE QUI DOIT ETRE LE PRINCIPE
ET
LA RESTRICTION L’ EXCEPTION .
Alors
qu’on avait posé le principe dans ses arretés que les activités artistiques
ambulantes sur la voie publiques n’étaient autorisés qu’à certaine heures et à
certains endroits de la capitale .
Le conseil d’état a considéré que cette formulation était
contraire aux libertés , en disant que si le prefet pouvait réglementer pour
certaines raisons et dans certains endroits les activités de saltimbanques ,
ils ne pouvaient que les restreindre et pas les organiser parce que le principe
est que ces activités sont libres . Et donc on a fait annuler les arretés du
préfet de police . Ca a rendu le préfet encore plus furieux et là il a perdu
toute contenance et on est passé de la guerilla juridique à la rebellion
administrative et aux voies de faits. Et j’ai assisté de mes yeux à ces voies
de faits qui consistait pour les forces de police du quartier à entourer le
public qui se massait autour de l’artiste avec des camions qui en marche
arrière dégageaient des gazs d’ échappement concentrés en un endroit qui
faisait que les gens s’en allaient . Ils pouvaient plus respirer c’était pas
vraiment des chambres à gaz mais c’était l’utilisation du gaz d’échappement pour
empecher les gens de stationner et ça c’est ce qu’on appelle en droit une voie
de fait . C’est à dire l’utilisation de la force et des moyens contraires à la
loi pour parvenir à un but légale de manière détourner . Et on a eu la chance
de tomber sur un juge qui a compris ça . Il a fait condamner le préfet de
police pour voie de fait donc la police a du cesser et même le préfet a été
condamner à payer à John un franc de dommage et interet et j’ai le souvenir de
ce chèque libellé , signé par le préfet de police de un franc à John qui l’a
encadré et non pas encaissé .
Donc vous voyez ce combat au
bout du compte a eu des résultats mais c’est d’abord John qui a eu le courage
de résister parce que c’était tous les jours la persécution et c’était tous les
jours l’obligation de déguerpir , de circuler , de ne pas pouvoir faire son
spectacle . Jusqu’au jour où le comissaire de police du 4ème arrondissement qui
d’un autre coté était sujet à toutes sortes d’intervention de la part de la
population du quartier mais aussi surtout de la part des commercants a essayé
d’organiser des rencontres , et là j’ai le souvenir d’une rencontre à la mairie
du 4ème arrondissement où je suis allé à l’invitation du commissaire de police
rencontrer les gens du quartier parce que ils avaient créer un syndicat . Et
comme j’avais acquis une certaine notoriété à cause de ma présence constante
dans toutes les affaires de Beaubourg , j’étais allé à leur rencontre et j’ai
ressenti là l’impossibilité du dialogue , la haine que provoquait l’artiste ,
le mépris , la cupidité , l’hypocrisie , c’était un peu l’essor et le triomphe
du front national avant la lettre et on est parti presque sous les quolibets et
les crachats de cette salle de réunion de la mairie du 4 ème arrondissement
avec cette espèce de sentiment
de saleté de honte de salissures de la part de citoyen qui ne
voulaient même pas entendre les raisons tenant à la liberté , le mot n’avait
aucun sens pour eux .
Ca les dérangeaient pourquoi
parce que il y avait 100, 200 , 300 personnes autour de John et pendant que les
gens baquenaudaient autour de l’artiste , ils allaient pas acheter les cartes
postales ou les affiches ......dans les boutiques autour de Beaubourg et c’est
tout .
Parce que franchement les désordres , le bruit
bien sur il faut préserver ces espaces mais encore on l’a créer pour ça pour
qu’il y est une animation . Et franchement John était très attentif à tout ça
et il ne se manisfestait pas le matin de bonne heure le soir tard et son
activité n’était pas bruyante du tout au contraire . Elle ne faisait que créer
un attrouppement de gens autour de lui , à quoi bon créer des grandes places si
c’est pas pour que les gens s’y rencontrent , s’y parlent , se regardent , se
contemplent , s’arretent , pour moi la liberté d’aller et de venir c’est
d’abord la liberté de s’arréter où on veut , quand on veut , comme on veut ,
avec qui on veut . Et encore mieux si c’est avec des gens de rencontres
occasionnels . On vient pas forcément avec ses amis , sa famille , ses copains
, sa bande mais au contraire avec ceux qui sont là pour établir une rencontre .
Faire comprendre tout ça , ça a pris près de 10 ans jusqu’au jour où il a
fallut , on a essayé de toutes les manières possibles moi je croyait pas du
tout à l’intervention politique en ce domaine mais on peut dire qu’aucun des
politiques n’a compris la chose ni Françoise Giroud pour commencer parce que
c’était elle qui était Ministre à l’époque , ni les ministres successifs ni
Jack Lang n’ont plus sauf quand John est allé faire le festival d’Avignon alors
là évidemment il lui à serrer la main devant les caméras . Mais Mitterrand ,
Chiracq Maire de Paris rien , toutes les pétitions , toutes les lettres , John
avait édité une carte postale représentant le petit chaperon rouge à sa façon
puisque il mimait le petit chaperon rouge et il y avait des dessins le
représentant entrain de le faire et il distribuait cette carte postale et il
demandait aux gens de l’envoyer au Maire de Paris pour revendiquer la liberté
et sur le dos de cette carte postale il y avait le fac similé des
contraventions qu’il avait reçu .EH ben j’ai assisté un jour aux fetes du pont
neuf et cette fois ci la mairie de Paris avait proposer à John un cachet pour
venir faire un spectacle d’animation sur le pont neuf venir faire son spectacle
sur le pont neuf pour le temps où cet espace était rendu à la circulation
piétonne . Et il avait compris le profit qu’il pouvait en tirer mais il avait
rien compris à la décision prise par John à l’origine et par les autres
saltimbanques de profiter de cet extraordinaire occasion de création d’un
espace libre grand permettant à la population d’une ville de se meler elle-meme
et de rencontrer des gens qui sont par ailleurs attiré aussi par l’espace
culturel et par la source culturel que représente le Centre Pompidou . Je
contaste après 20 ans que on lui a a peu près accorder la paix mais c’est
extraordinaire de contaster dans ce pays où on est si pron à inventer les
libertés , les droits de l’homme et à donner des leçons au monde entier que il
aura fallut si longtemps pour faire reconnaitre une liberté aussi simple que
celle d’aller et de venir et celle de la liberté d’expression en public .
- Encore maintenant les
saltimbanques se font éjectés encore maintenant .
- oui je pense pas que la question soit tout à
fait régler et en plus le problème n’est pas strictement parisien on créer
beaucoup de lieux piétonniers dans les villes , je ne sais pas comment ça se
passe à Bordeaux , à Lille , à Lyon .............Tout ça dépend forcément de
l’autorité locale et du rapport des policiers avec la population .
- Mais avant il y avait des
lois qui interdisait des attrouppements
sur la voie publique .
- Non il y avait des
réglements qui à Paris notamment réglementait les ventes d’objets sur la voie
publique ou les quétes ou les collectes sur la voie publique . Et dans les
débuts de la persécution dont les saltimbanques ont été la victime , ils ont
essayé de verbaliser sur le fondement de ces textes là , on a pas eu de mal à
démontrer qu’ils ne vendaient rien et que si il y avait un chapeau par terre
dans lequel les gens voulaient bien mettre une obole , ce n’était pas une quete
sur la voie publique . Mais il n’y avait pas de textes qui interdisait à
proprement parler jusqu’à ces fameux arrétés municipaux , l’exercice d’activité
culturel , d’animation sur la voie publique .
C’est arrivé seulement en
1981, en 81 c’est déjà la gauche .
- Avant Beaubourg je sais pas
si il avait des P.V. à St Germain
- C’est justement là qu’on
touche du doigt le problème parce que le préfet de police sachant qu’il peut
quand même pas tout interdire c’était dit je vais figer une situation acquise ,
alors on va prendre la rue Mouffetard , la parvis de l’église St Germain des
Prés , le parvis Beaubourg et on va dire ben dans ces lieux là qui sont une
sorte de ghettos culturels on va autorisé à certaine heures du jour et à
condition qu’elles ne soient pas trop bruyantes des activités d’animation
artistiques . C’est cette façon de réglementer que le conseil d’état a
sanctionner en disant le Prefet de police doit assurer l’ordre , la tranquilité
de la population mais pour le faire il doit interdire quelque chose , il ne
doit pas réglementer une liberté . Et donc poser en principe que les activités
artistiques ne sont autorisés que dans ces endroits désignés par le préfet ,
c’est porter atteinte à la liberté fondamentale de toute personne de s’exprimer
librement sur la voie publique et si il veut le faire sur la place de l’alma il
n’y a pas de raison qu’on le lui interdise sauf si l’attroupement qu’il créer
pertube la circulation des voitures ou met les piétons eux memes en danger .
Mais dans les espaces piétonniers il n’y a pas ce genre de danger alors on nous a chanter quelques fariboles de
temps en temps en nous disant que l’attrouppement autour des artistes risquait
d’empecher la circulation des véhicules de secours . Effectivement lorsque les
pompiers ou une ambulance ont à intervenir à la demande d’un riverain , il faut
même dans les espaces piétonniers que ceux-ci puissent circuler comme si il
était sur la voie publique , la rue . Et ça avait un petit coté dérisoire de
dire que parce que du coté des arbres qui sont près de l’église St Merri il y
avait un attroupement de 150 à 200 personnes on pouvait pas passer à coté , je
veux dire il n’y avait pas une telle foule sur la place que l’on ne puisse
circuler . Et si vous prenez l’exemple des voies sur berges ou même des voies
rives droite ou rives gauche sur le long de la seine quand en plein moi de mai
la circulation est intense au point qu’on met trois quart d’heure pour aller de
l’Alma au Chatelet si la police ou des véhicules de secours ont à passer il
leur faut utiliser leur sirènes et elles sont souvent bloquer. Vous pensez bien
que c’est pas plus compliquer de faire bouger des gens qui sont debout autour
d’un artiste pour faire passer une ambulance . C’était de l’hypocrisie totale .
- Et c’est du à quoi ce fait
d’etre complètement opposer
- Je crois que c’est du
contrairement à ce qu’on croit à une tradition française qui fait que la liberté
fait peur aux autorités et même à la population . On est pris de frisson quand
on se dit quelles sont les conséquences d’une liberté ,
Les libertés elles sont en
France enfermés dans un tabernacle comme si c’était des principes ou des
valeurs que l’on célèbre , que l’on exporte mais pas que l’on pratique et si on
les pratique c’est encore avec parcimonie parce que on risque de se bruler , la
liberté a de ses souffles ou de ses emballements que l’autorité ne peut pas
controler et moi j’ai senti que Beaubourg constituait un tel lieu potentiel de
rassemblement avec le Chatelet autour , de déclenchement de la violence que la
police a eu peut etre quelques craintes raisonné ou pas moi je suis pas le
Prefet de police j’ai plutot tendance à croire que ont a jamais assez de
liberté et le Préfet se dit que l’on ne prend jamais assez de précaution pour
éviter les affrontements , affrontement entre le public , les artistes , les
riverains franchement en dehors de quelques propos acerbes échangés d’une
fenetre sur la place publique , il n’y a jamais eu réel danger . En plus mais
ça c’est une raison à demi nèm c’est aussi une facette de la personalité de
John Guez c’est qu’il a toujours été très respectueux de l’ordre et il
l’affirme toujours , et il a jamais provoquer la moindre exitation du public
notamment à l’encontre des policiers .Même lorsque les policiers venaient le
verbaliser il s’en prenait pas à eux , il ne dénonçait pas les policiers à la
population autour de lui pour éviter leur intervention au contraire il les
plaignait d’etre obligé de faire cela et il expliquait que par ailleurs il
avait le moyen de se défendre en justice et qu’il fallait que force reste à la
loi et pas de résistance par la violence possible .
C’ ETAIT UNE ECOLE DE LA RUE
.
très importante aussi , en
plus il y a la face cachée du personnage , ça relève de sa vie privé mais aussi
de son activité artistique car cette activité d’éveil au dialogue ou à
l’expression orale en public il ne l’exerce pas seulement sur la place publique
de cette manière là mais il l’exerce aussi dans des établissements
psychiatriques pour enfant où il se rend régulièrement pour faire la même chose
auprès de jeunes austites . Je ne sais en vérité le résultat de ces initiatives
mais en tout cas c’est bien le signe que cette démarche artistique a un sens
profond d’échange , de dialogue , de représentation , de communication dans
cette société qui valorise la communication presque à légale de la liberté mais
qui abolit aussi la communication , on retombe sur le même paradoxe une valeur
qui est promut dans les médias comme
souveraine et qui est célébré par les marchands et la technologie mais qui en
réalité ne passe pas parce que on communique avec des téléphones mobiles , on
communique avec des médias , des écrans avec la technologie mais on communique
pas de vive voix en se parlant en se regardant , en s’écoutant . Bref on
s’écoute plus , on se parle plus et on ne s’écrit plus .
_ Je crois que c’est pas
typique à la France ...Finalement ça ne va pas du tout avec ce que la police
pense parce que finalement plus il y a de gens dans la rue qui font des
spectacles moins il y a des problèmes de violence ,
- Oui je le crois
profondèment mais comme c’est des choses qui échappent à l’organisation au
controle , à la réglementation c’est mystérieux donc ce qui est mystérieux ne
peut pas faire l’objet d’une reconnaissance par l’autorité . La police elle a
besoin de circulaire , d’instruction , d’ordre , de plan , de méthode de ....et
tout ça qui procède de la liberté leur est étranger .
Moi j’espère tout de même que dans les ecoles de police on apprend ces choses
là . On m’a jamais demander d’y aller mais je vois pas pourquoi j’irais pas .
Ce que je vous explique là je l’expliquerai bien sur devant 300 policiers pour
leur faire comprendre qu’il n’y a pas d’hostilités entre les artistes et les
policiers mais que l’artiste a sa place dans la cité comme le policier . Il est
pas un thérapeute mais il a une place qui doit etre respecter parce que il est
une personne humaine mais qui en plus a son utilité sociale .
Vous savez il y a une
trdition anglaise et anglo saxonne que vous devez connaitre des precheurs ou
des hommes politiques qui sur la voie publique sous la protection de la police
peuvent s’arreter et tenir un discours politique . En France je vois pas même
que ce soit possible qu’en dehors des lieux où il y a des réunions électorales
ça soit possible de tenir un discours politique et encore moins un discours
métaphysique ou philosophique où l’on croit toujours que les gens sont fous .
Une personne qui parle dans la rue est forcément un dingue .
- J’arrive pas à comprendre
avant il ya avait plein de choses sur Paris - Il n’y a pas forcément un rapport
institutionnel ou même législatif entre cet essor de la rue dont on garde le
souvenir même si il n’ai pas très vérifier dans les faits , en tout cas dans la
mémoire et cette régression qu’on contaste . Moi avant de rechercher les causes
dans les textes je pense qu’il faut le chercher dans les hommes et dans
l’inconscient collectif qui fait que se créer des réflexes de peur entre les
gens et la peur enferme chacun chez soi , ce qui abolit cet espèce de
discussion et de rencontre dans des espaces publics qui sont appelés à etre
fréquenter par un grand de personne . On représente traditionnellement c’est
surtout un coté folklorique les villages du midi de la France ou les places
publiques comme un lieu de rencontre . On peut aussi citer des exemples sur la
façon dont s’ont organisé les places de ville en Italie où il y a des espaces
où les gens viennent se parler , se rencontrer , c’est même plus encore
perceptible en Italie qu’en France mais ça reste tout de même des traditions
locales anciennes et limité en nombre et les gens qui se parlent là sont des
gens qui se connaissent .
Aujourd’hui tiens au
phénomène d’urbanisation , une extreme concentration d’inconnu dans un même
lieu et on est plus au 16ème , au 17ème même au 19ème siècle où la circulation
etant beaucoup moins fréquente ne se rencontrait dans un même lieu que les gens
qui se connaissaient déjà .
Si on essaye d’approfondir la
recherche sur le plan Franco Français en tout cas il y a chez nous une sorte de
tendance à considérer que tout doit etre réglementé , organisé , classifié et
on a dans l’idée que l’exercice d’une activité artistique ça se passe dans un
théatre où ça se passe dans un lieu de spectacle , au theatre cinématographique
et il y a une ordonnance de 1945 qui réglemente les lieux où doivent
s’organiser les spectacles et pas sur la voie publique .
Oui l’ordonnance de 1945 réglemente les lieux dans lequel s’organise les
spectacles et il faut pour ça avoir une licence . Donc voyez le mot licence
signifie en soi que c’est l’autorité publique qui autorise quelqu’un à exercer
une activité artistique en public . Licence pour vendre des boissons , licence
pour vendre des spectacles ou pour tenir une salle . Alors on considère qu’il y
a des raisons pour le faire des raisons qui tiennent à la sécurité des lieux
dans lequel on fait venir du public mais c’est une fausse raison parce que la
sécurité fait l’objet d’une réglementation à part et d’une vérification de
l’autorité sanitaire ou de police , il n’y a pas besoin que le ministère de la
culture soit chargé de délivrer une autorisation de représenter des spectacles
dans un lieu parce que ça induit l’idée qu’on va controler le contenu , comme
sous Napoléon 3 les chanteurs de rue devait d’abord aller déposer le texte de
leur chanson à la préfecture avant de les chanter et donc il y avait les
survivances d’ordonnance impériale de 1852, 53 qui rapporte le souvenir de ces
colporteurs et chanteurs de rue qui sont déjà poursuivi par la police parce
qu’ils n’ont pas soumis leur texte avant . Notre histoire de France est riche
comme ça d’aller et de retour en arrière dans le domaine des libertés . C’est
les quolibets et les chansons qui ont fait tomber Marie Antoinette et quand
l’empire revient c’est les chanteurs qui sont poursuivi dans la rue alors que
dans l’intervalle on a proclamé la liberté d’expression .
C’est ce qui me fait dire
qu’en France en tout cas il y a une certaine incohérence entre les déclarations
d’intentions , les textes constitutionnels et la pratique .
La déclaration des droits de
l’homme et des citoyens a bouleversé le monde , et on continue de l’apprendre
aux enfants des écoles comme un texte fondateur et tout le 19ème siècle a été
un long catalogue de disposition qui sont une régression de cette liberté , un
controle , un encadrement de cette liberté . Et moi je suis partisan
d’apprendre aux enfants d’abord mais peut etre aux citoyens adultes aussi que
les libertés ce n’est pas seulement pour le fronton des écoles ou des mairies ,
c’est dans la vie quotidienne . Il faut leur faire toucher du doigt ce qu’exige
la liberté et la liberté elle exige que aucun citoyen NE TOLERE L’ARBITRAIRE , j’ai la prétention
de le dire pardonnez moi cette vanité que si j’avais pas été là sur la place
Pompidou en 1978 , 79 John se serait peut etre lassé , c’est parce que j’ai eu
cette révolte citoyenne pas seulement d’avocat , honnetement je me suis porté
au secours de cette liberté , si j’avais pas eu cette révolte citoyenne qui
consistait à dire c’est toi qui va faire le rempart des libertés contre
l’autorité publique on aurait pas peut etre pu continuer . Et il faut qu’a
chaque instant en présence de l’arbitraire il y est quelqu’un qui se lève pour
protester .
Je me souviens , je vous est
raconté l épisode de ces voies de faits
avec les camions et les gazs d’échappement , quand j’ai vu cela deux fois de
suite j’ai pas laisser faire trois fois je suis allé sur le pavé à Beaubourg et
j’ai dit aux gens , j’ai pris la parole avec john , j’ai dit aux gens qui était
là voulez vous faire une attestation , un certificat disant que vous avez vu ça
, il fallait bien que je le montre au juge que le juge est la preuve de ce qui
se passait et il y a une douzaine , une quinzaine de personnes qui ont accepté
et qui ont envoyé les attestations , qui ont permis d’établir et bien il
fallait le courage de faire cela .
Il y en a un que vous devriez
peut etre entendre , je me souviens parce que il a une grande gueule c’est un
avocat qui s’appelle Nito Jean louis qui était l’avocat de l’association des
riverains et c’est interressant d’entendre aussi leur point de vue , parce que
moi je les présente sous un jour plutot défavorable . En quoi était-il dérangé
par la présence de ces gens et de ces artistes , quelle était la véritable
raison de leur intolérance . Je cherche toujours à comprendre .
J’ai entendu cet argument du
bruit , du désordre .... je trouvais cela très hypocrite de la part de ces gens
qui ont tout de même d’une certaine manière bénéficier par la ville de
Paris d’avantage pour avoir des
appartements si bien placés , mais si bien placés avec un espace piétonnier on ne
peut pas imaginer tout de même que on va parquer les gens derrière des
barrières , je veux dire on doit s’attendre à ceux qui est des gens dans des
zones piétonnières . Hors c’est une inconséquence , les gens voulaient bien
avoir le soleil , l’espace , pas de vis à vis mais aussi personne , personne
ils n’étaient pas près à accepter les
servitudes que représentaient la
présence ........
Pour parler très précisement
de ces attractions là cracheurs de feu .....Je ne les ai jamais vu ailleurs que
carrément sur le parvis , le plan incliné et jamais en dehors près des
immeubles , là ou lui John se tenait , on voulait d’ailleurs l’obliger à aller
avec les cracheurs de feu et John m’a toujours dit je ne peux pas y aller parce
que leur cri couvre ma voix et il pouvait pas faire son spectacle de dialogue à
coté des gueulards qui était là . Mais c’était quand même assez loin des
habitations ce genre de spectacle et si ça fait peur , ça attire aussi . Moi je
déteste ce genre de spectacle mais je reconnais qu’il y en a qui peuve les
aimer . Ce qui est extraordinaire en ce lieu c’est qu’il y a place pour toutes
sortes de choses , toutes sortes de rencontres et donc d’enrichissement .
Et je sais pas trop
d’ailleurs ce que les travaux fait autour de Beaubourg vont changer , j’y suis
encore aller récemment , j’ai vu qu’il y avait Reboul et son orgue et puis
Banana . Je pris le ciel qu’on le fasse pas déménager sous prétexte qu’il fait
du bruit avec des boites de conserve .
- oui les autres sont partis
sur des galas ......
- Il faut comprendre , c’est
peut etre aussi leur désir parce que j’imagine que ça doit pas etre marrant
tous les jours de faire cette activité . Et moi en ce moment je suis plutot en
délicatesse avec john ...............
Livre de Cabu .
- ils ont tous des passé
particulier , c’est particulier le fait d’etre passé dans la rue .
- Il reve d’entrer dans des
castings , d’etre engagé et quand ça lui est arrivé il était heureux comme tout
et il croyait en tout cas il disait que c’était la consécration qui allait
enfin arriver . Moi j’avais une autre vision des choses mais c’était la mienne
, surtout ne quitte pas le parvis mais bon c’était la galère aussi , pas
seulement à cause de la police , c’est qu’il fait souvent froid et il faut y
etre tous les jours .
Je crois qu’il gagnait bien
leur vie .[F1]
Je me monte des petits numéros tout seul puisque j’étais bon
équilibriste , je pouvais travailler tout seul , à trois ou à quatre , j’ai
travailler en trio deux garçons et une fille , après je monte des petits
numéros tout seul puisque à Paris il y avait beaucoup de cinémas qui faisait
des attractions , et puis faire des galas de temps en temps . Après le cirque
commençait à mourir et c’est là que j’ai rencontré ma compagne ; j’ai dit j’en
ai marre je vais monter un numéro avec une copine qui est comme moi bohème tout
; j’ai attendu longtemps pour la rencontrer et je l’ai rencontrer , on a
partager une cerise à deux mais on l ’a manger en état d’amour . On a fait
des cabarets des casinos c’était extraordinaire . Et puis après c’est mort
c’est là que je suis arrivé à Beaubourg et comme j’avais perdu tout la
partenaire le matériel tout le standing . A zéro et Pompidou ouvrait le centre
Beaubourg en 1977 je faisais la manche dans le métro pour subsister , et il
y a un type dans le métro il me dit
comment vous faites la manche vous etes pas un poivrot vous fumer pas vous etes
pauvre mais propre , je lui dit ouais j’ai perdu ma partenaire ..........j’ai
eu un coup de barre c’est la vie d’artiste , je suis à zéro .......Mais allez
donc à Beaubourg on ouvre le plateau , vous pouvez faire un numéro . Je vais voir il y avait déjà quelques numéros
le lendemain je retourne , j’habitais à Créteil sous une tente et alors je me
dis je vais me monter un matériel bidon avec des caisses , une boite de petit
pois je faisais l’équilibre de tete dessus , et me voilà , je faisais des
sommes mirobolantes parce que les parisiens il avait jamais vu ça , il avait
jamais vu une zone piétonne tranquille où on pouvait se balader les mains dans
les poches en sifflotant c’était bien. Il y a eu du spectacles de rue il y a
très longtemps et ça avait été interdit par De Gaulle qui voulait virer tous
les petits métiers et moi j’ai travailler avec un dernier des saltimbanques
Place Blanche il s’appelait Jo le Breton ( j’ai une photo de lui ) pendant
trois ans il m’avait initier , et donc comme j’avais été initier un petit peu à
la rue vingt ans avant , arriver à Beaubourg et travailler sur la place
publique , j’avais eu la joie d’etre avec un vieux professionnel au temps des gars qui avalaient les
grenouilles , qui avalaient des sabres et qui levaient des poids , des gros megs
avec des poids boules là . Et donc me voilà à Beaubourg et là ça a été vite à
remonter puisque je faisais des sommes importantes et je travaillait tous les
jours , je faisais douze à treize fois mon numéro , je me souviens je faisais
des croix et je faisais un numéro difficile d ’équilibre avec le sabre
sous la gorge et le jonglage avec le feu , équilibre sur la tete , un numéro de
professionnel quoi et là tout le monde arrivait , il ya Gilbert , John l’homme
à la poule , plein de numéros qui venaient attirer par on ne sait quoi , quel
échec ou quel réussite ; après bien après il y a Mike qui est arriver je me
souviens il savait pas bien cracher le feu il se mettait en indien , on
commencait à sympathiser un petit peu tous les numéros . On connaissait pas
notre avenir .
et puis il y avait des bons artistes ce qui fait que tous
Paris commençait à venir sur ce plateau de Beaubourg parce que ce n'était pas
que des débutants , il y avait des anciens professionnels qui était tombé à
zéro qui présentaient un travail de classe internationalle mais malheureusement
avec ce beau travail il y a des clodos qui se sont infiltrés là dedans et qui ont montés des numéros
minables alors il y avait le minable le bien et le mauvais mais enfin ça
passait et puis après tous les clodos tous les megs qui faisait la manche , la
drogue qui est venu ça a tué Beaubourg .
Tous les bons sont partis Gilbert , Thérèse ils sont partis parce que comme ils
étaient bons ils pouvaient aller autre part et moi aussi comme j'ai fait dix
années c'est bien , je regrette pas c'était une belle époque il y eu des belles
amitiées entre nous il y a eu aussi des jalousies comme dans tout les trucs
mais il y a eu des belles amitiées qui sont restées comme par exemple moi avec
mike on est resté toujours un peu copain meme si on se voit pas , quelques uns
comme ça peut- etre lier par cette euphorie qui y avait . Et puis après moi
j'ai dit je vais commencer ma vie de saltimbanque que j'avais louper trente
années avant et là entre temps je faisais du yoga j'étudiais d'etre moins
violent , le détachement des etres et des choses , aimer les etres mais sans
vouloir les dominer donc par le yoga je suis arriver à ça et donc ça a été pour
moi aucune difficulté de partir toute seul , je me souviens mon copain qui
était yogi dis ouais le vrai yogi c'est celui qui s'en va tout seul dans la
nuit et qui s'endort tout seul dans sa roulotte dans la nuit , comme je fais
souvent , je vais dans des petits coins , je m'endort tout seul dans la nuit ,
je me réveille tout seul vachement heureux . Il y a pas d'angoisses et j'ai
appris à vivre comme ça depuis quinze ans , à vivre très bien et à avoir des
instants formidables avec les gens qui vous revoit après un an ou deux ou trois
, ils disent hé vos petites souris vous les avez toujours , ha on se demandait
si on allait vous voir cette année ( quand je vais au lavandou ) on vient tous
les ans pour vous voir on vous a pas vu l'année dernière bien oui mais li
faisait chaud je suis parti .............. Alors les gens ils viennent pour me
revoir . Je m'aperçoit qu'il y a des gens qui aiment les artistes et d'autres
qui les haissent . Un artiste c'est comme un homme d'état il est aimer ou hait
, surtout en France pas dans des pays comme l'Allemagne ou la Suéde parce que
ces des pays qui sont organisés , les gens ils s'aiment mieux nous on est
divisés en France , notre politique elle nous divise donc cette division crée
des jalousies qui fait que l'autre est jaloux parce que il gagne plus d'argent
qu'en Allemagne tout le monde est bien loger a sa voiture donc il n'y a pas de
jalousie l'amitié peu passer , dès qu'il il a la haine et la jalousie l'amitié
ne passe pas . Les allemands ils sont disciplinés dans la rue mais chez eux
alors là ..............Ils sont généreux les allemands . Je me souviens d'une
fois je sais plus où on était tous attablés là et après les allemands ils ont
pour coutume de se prendre par les bras comme ça et puis tout le monde rit et
celui qui était à coté de vous ou l'autre en face c'était un grand avocat , un
grand chirurgien une personnalité on le sait pas mais dans ce coté amicale il
n'était plus ça . Que nous en France on reste je suis le directeur , il y a
encore ça ça reste , ha c'est un pays malade la France . De toute façon un
artiste il doit bouger . Il faut etre détacher il faut etre très fort devant
les coups durs qui peuvent arriver ; D' abord un saltimbanque il a toujours un
peu d'argent parce qu'il aime son métier
donc il le pratique tout le temps il peut le pratiquer autant qu'il veut c'est
ça la différence avec le professionnel il attend un gala mais ce gala ce sera
dans un mois , entre la date du gala il ose pas aller dans la rue , il voudra
pas parce qu'il veut que l'on annonce il veut des projecteurs il veut unne
musique il veut tout un coté sophistiquer , il sait pas travailler avec rien ,
des fois il crève la dalle parce que le saltimbanque il peut avoir beaucoup
plus d'argent que lui , parce que il peut travailler le matin l'après midi le
soir et tous les jours . Moi je me suis vu gagner des sommes collossales à
beaubourg oui meme là moi j'ai fait une bonne saison j'ai travailler souvent le
samedi et le dimanche et je laisse un jour de repos pour la voix et je reprends
le mercredi , des fois tous les jours des fois
un jour sur deux et comme ça tout le temps et l'hiver je vais
dans le sud parce qu'il fait moins froid et quand il y a des belles journées je
peux travailler à Cannes ou à Menton à partir de deux heures jusqu'à quatre
heures il fait beau au soleil les gens ils sortent ces des petits retraités
Parce que les anciens nomades l'hiver il montait dans le sud
et l'été ils vont dans le nord c'est ce que je fais un peu dès qu'arrive le
mois de juillet il fait trop chaud pour mes souris et mon lapin et meme moi on
est pas bien donc je vais à Annecy il fait bon ou alors en Bretagne . et en
hiver je vais dans le sud et je tourne comme ça et bientot dans un an ou deux j'essayerai
d'aller plus loin j'irai au Indes ou aux Canaries . Avec le camion pourquoi pas je mettrai le temps qu'il
faut . Donc il faut bouger parce que dans le fond c'est ça le métier d'artiste
, on m'a assez vu il faut que j'aille faire voir ma gueule ailleurs .
Oui les gens aiment bien revoir quelqu'un qu'ils ont
apprécier mais faut pas toujours etre là
non plus . A beaubourg les gens revenaient
mais il y avait aussi les gens de passage .
- Comment vous arriviez à capter les gens
- çA c'est l'impact moi je fait beaucoup d'études là dessus
et par exemple moi je suis le seul qui ose travailler le matin quand il y a pas
de monde , par exemple moi je peux dire que j'ai un impact parce que des fois
je commence avec personne , il y en a qui commence ils veulent qui y est
quelqu'un comme ................ Et rien que d'etre là et parler aux gens ils
viennent mais ça c'est moi j'ai un peu le don depuis le temps que je fais ça ,
j'accroche les gens . Alors j' ai fait à un moment donné exprès j'ai un beau
costume de clown , je vais venir d'une façon la moitié en clown , je vais faire
le blue jean mais pas les chaussures hé bien je m'aperçois que ça marche quand
meme . A un moment donné je crois que j'aurai meme plus de matériel je m'assois
et je parle ça marcherai quand meme donc c'est le magnetisme ça . Parce que
dans le fond quand on venait voir Edith Piaf on crois qu'on venait écouter ses
chansons c'est pas vrai on venait voir la femme Edith PIAF 1m 60 petite bonne femme pas tellement
appétissante physiquement mais qui attire les foules et tous les megs ils
tombaient dans les pommes à la voir C'EST L'IMPACT Elle était magnétique, sa
voix la vibration . C’est pas le tout de faire des exercices c’est secondaire.
Se connaitre soi-meme et puis il y a autre chose moi je sais que ma vie va
commencer encore plus fort sur le plan du métier parce que je fais un truc
secret personne le fait le tchikong s’est très secret c’est pas tout le monde
qui peut faire du tchikong. Parce que faire du tchi kong il faut etre
discipliné et il y a autre chose encore mais vous vous me comprenez parce que
vous etes subtil vous. Plus on veut une chose plus la chose que vous voulez
s’éloigne de vous c’est l’homme qui est volontaire aussi par malheur avec sa
volonté il y arrive il arrivera complètement délabré devant le fruit de son
travail, c’est pas la méthode et dans le tchikong ils disent un truc que j’aime
bien moi il ne faut pas , ne cherchez pas à faire du tchikong parce que si vous
voulez faire du tchikong vous arriverez jamais à faire du tchikong, laisser le
tchikong vous faire faire du tchikong c’est à dire que c’est un peu comme vous
le cinéma laisser l’esprit du cinéma vous envahir et vous croirez que c’est
vous qui faites du cinéma mais c’est l’esprit du cinéma qui vous fera faire du
cinéma. C’est un peu comme ça moi j’avais rencontréun vieux clown il me voit il
me dit c’est bien tu fais des exercices de clown mais il m’a filé une claque
dans la gueule finalement mais tu n’est pas un clown ,tu es un saltimbanque tu
es violent tu es méchant un clown c’est la naiveté c’est à la rigueur recevoir
le coup de pied dans le cu . Donc j’étais pas clown j’étais encore à Beaubourg
encore le gars on combattait encore les numéros entre nous , c’était la
promiscuité donc je ne faisais pas un numéro, je m’imposais en tant que moi meg
avec mon moi de meg je m’imposais dans un numéro que je voulais me faire voir
mais j’étais pas un artiste. L’artiste elle l’a dit Arletty qui fout son moi en
l’air, sa personalité sociale. Donc il peut faire un personnage un comédien.
Ca s’est les enfants ils sont traumatisés, ils viennent ils
apportent des dessins . Donc il y a un enfant il voit et après il prend une
feuille de papier et après il me représente , alors ça le frappe toto le lapin
dans le chapeau , les souris toutes les souris , c’est extaordinaire . A un
moment donné je dis souvent il y a 4 soleils , bon David 9 ans en 1991 il a
fait quatre soleils , et là ma patinnette il faut voir comment ils interprètent
. Christophe 10 ans Toto avec le lapin, la colombe , les souris sur mon chapeau
,et là la poele avec un billet de 10 milliards je dis toujours 10 milliards ,
vous voyez les enfants ça les frappe , merci petit garçon magique de Bruxelles
, là c’est Patricia du Lavandou ...............( à voir ) là lui il a fait
comme si il me verrait dans un cirque Florient , le lendemain ils reviennent me
les porter . ........Pour un clown réellement drole et humoriste ou humaniste
sans exès , très touchant Nicole
animateur qui a resisté à l’envie de passer de l’autre coté , chapiteau
d’ailleurs à une place , c’était super génial ça encourage drolement ça
..........ça c’est une petite fille qui venait avec sa maman et un jour elle
m’amène cette enveloppe c’était une lettre d’amour quoi , elle m’écrit qu’elle
m’aime John elle avait mis dedans un bonbon , des petits confettis . Ca donne
envie vraiment de continuer le métier , on voit que l’artiste de la rue il est
important pour les enfants , parce que moi je le vois je m’entrainais à faire
un petit numéro minable pour moi l’humilité pas faire fort parce que je fais un
numéro très trés fort et j’ai voulu faire pour les copains pour faire voir que
moi je travaille le matin à une mauvaise place et dans des mauvaises conditions
mais ils l’ont pas compris parce que eux ils veulent toute la place carrée puis
moi j’arrive ils pourrait dire tiens on va lui laisser la place il est de
passage ils y en a pas un qui l’a fait , c’est pour les voir dans le fond ce
qu’ils sont . Par exemple moi quand je vais voir un copain je met toujours un
franc il y en a aucun qu’il le fait quand je travaille alors pour moi ils sont
zéro , ils sont petits et ils le savent pas , je le fais pour voir leur degré
de karma encore , leur coté moi moi l’artiste . Je me met à zéro comme dit Tao
pour avoir la plus grande place il faut prendre la plus petite , et si on peut
faire la plus petite on pourra faire la plus grande , c’est pour ça que moi
j’aurai un cirque bientot , un très grand cirque . Je fait tout ça pour
m’amuser , il faut faire les choses en s’amusant . Là c’est des contrats quand
j’avais des contrats , je faisais du fakirisme aussi avec ma partenaire
.........ça s’est quand je travaillais avec Gilbert ......Quand je faisais
l’acrobate .......ça c’est le marlo Brando des indes , j’ai travaillé sur la
croisette et il y a plein de personne
qui passe et ce gars la il passait ,repassait et puis je voyais il me voyais et
puis il m’admirait pour l’audace que j’avais à travailler en plein sur la
croisette et avoir un moral terrible à haranguer la foule avec tout mon
matériel et lui il se sentait pas que il était une célébrité et on le regardais
pas et moi parce que je suis dans la rue on me regarde et puis il a mis pour
John qui travaille avec tout son coeur , alors pour lui faire plaisir j’avais
mis la photo par terre avec d’autres photos , alors il était content comme ça
quand il passait il venait voir si il y avait la photo ,c’était la vanité , il
jouait avec la vanité mais il était content il m ’avait donné un stylo de
la firme avec laquelle il travaillait , sa carte cinéaste et tout ça et il m’a
mis un truc en anglais là . Ho Cannes je connais bien la mentalité à cannes . (
photo prise du haut de Beaubourg ) Duval ça c’est un artiste saltimbanque , un
bon saltimbanque qui joue de l’orgue et il avait écrit ça sur un livre «
LA MANCHE EST LE REFLET DE CE QUE DEVRAIT ETRE L’ANIMATION DE RUE , ne pas
confondre avec spectacle de plein air c’est à dire que lorsque les badauds
viennent donner leur pièce cela représente avant tout la complicité avec le
saltimbanque , le saltimbanque ne doit pas venir dans la rue pour faire sa fete
, il ne suffit pas de se déguiser , de se maquiller , il faut motiver ,
l’agressivité est un peu nécessaire mais elle doit rester sympathique on ne
dérange les gens que pour mieux les amener à repartir déranger dans leur
contexte quotidien et éventuellement se remettre en cause comme le saltimbanque
doit toujours se remettre en cause aussi profiter de notre pouvoir de séduction
pour montrer ou raconter des sujets ayant trait à l’actualité ce qui peut
motiver des discussions , le saltimbanque d’aujourd’hui doit etre un peu fou
pour montrer aux gens qu’ eux même vivent dans une certaine folie existentielle
, qu’il vaut mieux donc en rire pas se prendre au sérieux , l’ athmosphère qui
doit se dégager du cercle creer par la foule et le saltimbanque doit etre
pleine de poésie , de folie et surtout d’amour , si le saltimbanque ne vient
pas apporter de l’amour dans ses récréations il ne peut motiver les passants . » C’est ça l’impact , à la
rencontre « il ne doit pas
sortir de l’ombre pour inviter les gens à repartir dans l’ombre , au
contraire le public doit se sentir heureux après le passage du bateleur donc se
tourner vers un autre soleil .
C’est un saltimbanque
authentique qui a ecris ça , Duval .
A Beaubourg je m’appelais John l’indien je ne suis plus
indien maintenant .
Photo de Robert Doisneau .
Jo le Breton le roi de Ha voilà le premier maitre que j’ai
eu c’est à place Blanche , c’est lui qui m’a initier j’ai travailler pendant
trois ans avec ce gars là , un authentique des gros poids , il avait un baratin
terrible on venait le voir juste pour son baratin et j’ai hérité un peu
saltimbanque il s’appelait la coiffe , il travaillait avec de son bla bla .
- On apprends du baratin de quelqu’un d’autre
- oui disons au départ oui , et après quand on fait le
clown, le clown c’est un personnage qui parle , on rentre dans la comédie ou
alors on fait du mime , c’est là que ça
m’a interressé le clown parce que il y avait en plus un dialogue donc déjà on
rentre dans le comédien qui parle . Et c’est vrai moi je m’aperçois que les
gens ils aiment bien qu’on leur parle parce que dans ce qu’on dit il y a
quelque chose qui ,comme des fois je dis tout ce qu’on perd en osant pas , bon
ben quand je dis une colombe sur le nez c’est possible c’est pas possible , si
c’est possible ....et tout ce qu’on perd en osant pas .....Dans les gens qui
sont autour de moi il y a des gens ils ont plein de problèmes , il y a peut
etre une femme ou un homme il voudrait oser faire ça mais il est timide donc il
entend quelqu’un qui lui dit TOUT CE QU’ON PERD EN OSANT PAS Alors dans sa tete
, je le sais , c’est vrai il dit lui tout ce qu’on perd en osant pas donc il y
a plein de trucs que je devrait faire et j’ose pas le faire lui il fait voir
qu’on peut le faire mais donc je le fais foncer mais je l’arrete , je dis après
MAIS IL FAUT OSER EN SE GARDANT . (il faut pas oser n’importe comment ) sinon
c’est l’impulsif .Donc il y a du dialogue.
Quand je suis arrivé à Beaubourg après ma rupture avec ma
copine , j’avais travailler avec cette homme là 20 ou 30 ans auparavant mais
c’est lui qui faisait le baratin et moi je faisais le travail mais je
l’écoutais pendant trois ans je l’ ai écouté , des fois je mets des trucs à lui
mais j’ai le droit puisque j’ai été trois ans avec lui et il est mort , il m’a
laissé de son fruit , je peux le mettre , comme il dit si vous donnez rien vous verrez rien
........une tirade à lui si vous donnez rien j’en aurai des larmes de sang dans
les yeux , des sanglots dans la voix , et je garderai pour l’eternité la plus
profonde des souffrances , si ti ture a das tra c’est du latin je vais vous le
traduire ça veut dire ainsi tu iras vers les astres .Ou alors quand il voyait
une femme regarde la JOHN celle là avec ses cheveux filasses ; il se mettait en
colère il prenait des coups de sang
comme ça si vous donnez rien vous verrez rien , il en manque encore
trente cinq pièces de monnaies , il en manque plus que trente deux
...............Les gens ils venaient pour écouter le baratin de ce meg là
tellement c’était un personnage . IL y avait des personnages à Paris comme ça ,
des gueules que les parisiens aimaient bien , ça veut dire que les
saltimbanques à cette époque là ils avaient des gueules que maintenant c’est
une autre forme . Il y avait du caractère à cette époque c’est peut-etre eux
qui on fait continuer le métier .
- Pas de relève alors
- Si , parce que il y en a beaucoup qui essaye le métier ,
moi je vais quand même a Aurillac tous les ans , je vois plein de jeunes qui
ont leur camion déjà et qui vivent dans une bohème un peu comme moi et qui
vivent que par ça et il monte des petits chapiteaux avec des ficelles des
cordes , ils mettent de la peinture mais c’est pas mal il y a du talent quand
même , on sent qui il y a le merveilleux qui bouillone là dedans ........
- alors il y a de la relève
- ça sera difficile parce que ce qui ennuie beaucoup c’est
les difficultés sociales qui fait que des fois toutes les villes ne sont pas
ouvertes alors le gars qui est pas stoic il va se décourager parce que il a été
viré là mais le vrai saltimbanque , comme faisait les premiers gitans qui se
baladait avec un ours , eux ils etaient toujours chassé et eux avait une devise
, je la prends un peu leur devise on me vire ici ça me fait rien je dis rien on
me vire pas la peine et il va plus loin , on le vire plus loin il va plus loin
et l’échec n’est pas permanent et dans toutes cette réussite il y avait des
échecs mais dans tous ces échecs ça faisait quand même qu’il faisait sa journée
. Je fais un peu comme ça mais on est quand même moins chassé. Puis il y avait
le coté raciste on a jamais beaucoup aimé les gitans parce qu’ils étaient
gitans . Mais je pense qu’un numéro qui est valable comme moi je suis pas
souvent viré parce que j’ amuse les enfants et il y a des villes où s’est
toléré .
Moi pour moi le saltimbanque c’est celui qui a pas d’attache
, qui a pas de maison sa maison c’est l’univers entier quoi et son numéro il
est toujours le même sauf qu’il met des variantes dans les dialogues mais c’est
l’environnement et le public qui change . Comme moi je suis content d’aller
travailler dans un autre endroit , je vais me faire voir ailleurs finalement
.Comme vous par exemple quand vous ferez votre film vous allez passer votre
film les gens vont passer dans une salle voir votre film mais c’est pareil le
travail vous l’aurez glaner, c’est un autre tissage vous etes une dentellière .
Oui quand j’étais acrobate je faisais un petit baratin ,
quand je faisais l’indien je présentais avec un dialogue et puis après j’en ai
eu marre de faire ce numéro , je voulais faire le clown , j’avais envie et puis
j’en avais marre de faire l’acrobatie parce que c’était quand même une drole de
discipline et puis c’était dur quand il fait froid ,il faut que les épaules
soient au chaud , j’avais souvent des claquages d’épaules , finalement c’est
dur etre un acrobate dans la rue . Clown avec les animaux , j’avais un succès
parce que personne le fais, et les animaux c’est formidable les gens ils aiment
les animaux c’est incroyable . Il y a des gens ils voulaient m’acheter ma
colombe ou mon lapin , ils m’offraient des prix extraordinaires mais je
vendrais jamais mon lapin un lapin qui fait tout ça , c’est des secrets.
Le saltimbanque c’est un personnage , c’est pas celui qui
fait un numéro et qui revient chez lui, c’est pas un saltimbanque c’est un
artiste qui fait un numéro dans la rue , il
a pas encore rompue des barrières . Le vrai saltimbanque c’est un etre
un peu énimagtique un peu sorcier un peu solitaire un peu philosophe un peu
chamane un peu amoureux de la nature qui a besoin de la nature pour se baigner
. MOI par exemple quand je suis à Annecy tous les matins je prends mon bain de
rosée., parce que je fais un travail d’alchimiste en même temps , je prends le magnétisme des arbres, donc je
suis pas que clown parce que on peut etre saltimbanque aussi et faire autre
chose , parce que on dit toujours l’artiste c’est le saltimbanque mais
............( Notre Dame il y a un nom de saltimbanque gravé dans la pierre)
Les enfants du paradis , film à voir .....
J’ai quitter le cabaret .....pour etre libre pour pas etre
dans le système .
dans le saltimbanque il y a un désir de liberté , je veux
pas dire une révolte , mais à un moment donné il fait le show biz mais avec le
système du show biz c’est à dire il faut courtiser les agences . Il y a un
travail de bureau , vous etes piégé comme ça . Vous avez pas le temps , un
contrat le 12 dans telle ville le 14 dans une autre , vous pouvez même pas
visiter . Vous faites vos valises sans arret ça fait saltimbanque mais piégé .
Que moi si je veux pas aller travailler , je suis pas programmer , j’ai signé
avec personne et moi je veux pas signer donc le vrai saltimbanque il veut la
liberté et là je vais me mettre encore plus saltimbanque en travaillant dans la
rue , si je fais des galas ça se fera comme ça de bouche à oreille , je
viendrai . Quand vous signez vous devez du temps à quelqu’un , des horaires à
respecter c’est un autre état d’esprit .
Je suis très individualiste et je veux pas etre le clébard
.C’est un métier on peut le quitter personne vous dira rien et on peut revenir
personne vous dira rien , il y a pas besoin de références , on peut pas trouver
plus beau truc , c’est une profession libérale dans le fond .
( Arletty et Charlie Chaplin)
j’ai cette idée de faire un cirque mais il faut que je
trouve un mécène . Moi je me verrai bien dans le cirque mais c’est moi qui
supervise tout comme ça je serai le clébard de personne , ça sera les autres
qui seront mes clébards mais je veux pas dire qui seront mes clébards .....Donc
je ne perdrai pas ma liberté car quand vous avez de l’argent vous pouvez
commandez , et si vous commandez avec gentillesse les gens sont content d’etre
avec vous , on n’est pas son clébard . ( fric frac )
Pouvoir faire beaucoup avec peu là c’est le grand talent
c’est du génial . Je joue un peu avec ça , il faut imaginer beaucoup , moi je
lis beaucoup , il faut faire des plans , prendre des notes , c’est un art tout
ça , puis il faut etre un peu dingue de ça , moi je suis un dingue du show biz
c’est ma vie j’aime le show biz , je parlerai de spectacle pendant des heures .
- un comédien il joue un role , vous vous vous servez de
toute votre personnalité. ce n’est pas le même chemin . ça fait treize ans que
je vais au festival de Cannes parce que j’aimerai bien faire un role un jour
.Moi je connais la psychologie et c’est comme ça qu’on peut faire briller un
personnage. Il faut connaitre les mécanismes de l’ame humaine . Le clown c’est
l’innocence et la folie , dire des choses folles et faire des choses folles ,
la folie libre . Salvador « je suis un fou mais un fou qui n’a pas perdu
la raison . C’est un peu ça le génie , c’est imaginer des trucs fantastiques
sans tomber dans la folie , c’est à la limite de la folie . Salvador « moi
je suis qui crétinise le public mais je ne suis pas crétiniser par lui »
J’aime bien le spectacle parce que voir comment l’autre il
va vouloir m’en faire accroire , je met les oeillères puis j’essaie de rester
dedans . J’aime le cinéma . J’aurai bien aimer etre comédien parce que on peut
jouer des personnages.Une vie d’acteur c’est riche .
( un peintre qui l’a dessiné avec son lapin ) Dans les
clowns j’aime bien les Rudiliata , c’est deux petits frères et ils font les
clown mignons . Les rudiliata à trois et
puis un autre clown que j’aimais bien c’est Grog , j’ai vu ces adieux , (photo)
là c’est des vieux clowns et là je me suis mis John le clown hydraulique .
Ca c’est mon copain Jacques Irex avec qui j’ai fait mes
débuts au cirque de Bordeaux là il y a au moins trente ans de ça et j’ai été le
revoir à Menton , il est devenu un gros monsieur chauve et quand j’avais été le
voir je faisais encore le métier , tu devrai continuer je me souviens il
faisais Tarzan, en plus il avait un beau physique , il avait une certaine
nostalgie , tu aurais pas du arreter le métier si tot , parca que il s’était
laisser grossir , je lui dit mais ça se diminue une bedaine . Il faisait avec
les lions .
Le clown oui ça se faisait pas dans la rue ,oui c’était dans
le cirque .
Là c’est lui ? je les ai fait parler « je suis jaloux
, il veut un cu d’hommes «
« j’en ai
marre des cu de femme je veux celui d’un meg «
Le couple élément de très très grande bétise la cucuterie .
Parce que moi j’en veux au couple , parce que je trouve que le couple ça fait
sale non pas que j’aime pas la femme , j’aime les femmes , j’aime la sexualité l’affectivité la
tendresse et tout , parce que c’est le tchikong parce que il faut le dire il y
a un autre amour qui existe , c’est très secret il est pour très peu de gens ;
ça veut dire que l’homme et la femme qui sont destiné à une harmonie entre eux
à un amour sublime ils vivent une médiocrité ,un élément de très grande bétise
mais ils ne le savent pas c’est pour ça que les femmes sont mécontentes des
hommes et les hommes mécontentes des femmes . On est fait pour vivre autre
chose avec la femme sur le plan sexuel , affectif mais c’est pour quelques uns
. Moi j’ai des bouquins là dessus c’est le tantrisme , l’amour magique . Les
femmes sont mécontentes de l’homme parce qu’il est insuffisant , la femme elle
a 40 cartouches et l’homme il a que 2 cartouches , la femme elle sera toujours
insatisfaite avec un homme parce que elle espère dans l’homme et l’homme est
une pauvre chose l’homme est un pauvre type tant qu’il n’a pas créer à partir
de son premier homme le deuxième homme , à partir de la première femme la deuxième
femme la nouvelle ève . Le corps c’est un commencement qu’il faut finir .
Nietsche « l’homme est quelque chose qui doit etre surmonter...... pour
devenir de l’homme un surhomme et de la femme devenir une déesse mais la femme
elle reste , c’est le karma, elle reste avec une éducation religieuse erronée ,
une éducation sociale, politique erronée tout avec une erreur . Ils vitalisent
une erreur, dans le couple et la femme elle le sait elle sent qui y avait autre
chose à vivre dans le couple et elle est déçu de l’homme . Donc c’est un jeu
d’oedupe . Mais il y en a comme ils ne le savent pas ils se disent il y a que
ça et ils sont content comme ça mais ils ne sont pas épanouis .
Ouais il n’y a pas beaucoup de femmes dans les saltimbanques
il y a une femme qui faut aller voir c’est Antoinette . Alors elle c’est une
femme la première fois que je l’ai vu arriver à Beaubourg elle arrivait toute
seule avec sa valise sur un vélo à une roue , ha tous les megs c’étaient une
drole de leçon , elle sortait du cirque pour attaquer la rue . Elle jonglait ,
crachait le feu un bla bla terrible ......et hop elle repartait avec sa valoche
. C’est la seule femme qui m’a étonné au point vue saltimbanque . Elle faisait
des cercles terribles .
( le bateau passe sur la seine )
On est dans une époque comme si le fait qui est des
saltimbanques c’était un peu nécessaire parce que moi je me souviens dans
certaine zone piétonne c’est triste quand il n’y a pas d’animateurs , je vois à
Aurillac je reste toujours deux jours après ben la ville elle est triste elle
reprend son coté sociale , et puis je me disais là il y avait un gars qui
faisais rire là et puis même les gens qui reviennent on sent qu’ils sont
tristes , il y avait quelque chose , il y avait des gens qui sont venus
apporter un peu de merveilleux et puis ils sont partis . Il y a une tolérance
dans les rues piétonnes . Mais il faut l’avouer Beaubourg a fait quelque chose
de bien en créant cette zone piétonne les gens se sont mis à aimer le spectacle
dans la rue ,il le recherche , les gens qui viennent sur le pont ils savent
qu’il y a des gens et ils cherchent les attractions .
Les gens qui viennent voir le spectacle je les appelle les
saltimbanques de coeur .
Comme mon petit bonhomme en Allemagne à Vis baden je jouais
de la scie musicale et je jouais pas très bien mais comme j’étais en clown ça
fait rien et puis il y avait un vieux pépère retraité , donc il font leur petit
tour dans leur ville tous les jours et puis moi parisien j’arrivais donc
c’était nouveau . Il m’écoutait jouer j’avais un petit répertoire et il me dit
...ya faire lili marleen ......il voulait que je lui joue lili marleen
.......ya faire lili marleen et puis il écoutait il était content , lili
marleen ça représentait Marlène Diestricht ou ....et
puis hop toujours 2,3 deutsch mark ...L e lendemain il
revenait lili marleen , ya lili marleen et toujours comme ça pendant 15 jours
il était contents . C’est des trucs extraordinaires ça .
Au Lavandou la petite fille elle forçait tous les soirs ,
elle avait 4 ans et demi elle s’appelait Victoire , tous les ans on est forcé
d’aller au Lavandou ils aimaient tellement leur petite fille , ça fait trois
ans qu’ils viennent , elle a 7 ans maintenant .ET tous les soirs je leur dis
vous devez en avoir marre vous le père et la mère , mais on est devenus des
amis , de voir ma gueule tous les soirs . Ouais mais on vous aime bien c’est
amusant bien sur on aimerai bien voir autre chose mais enfin ........tous les
soirs ils venaient après manger faire la balade la petite fille elle venait
faire son numéro avec moi , je l’avais habituer à faire des trucs , elle avait
l’impression qu’elle venait dans un cirque faire son numéro . Je lui faisais
porter les colombes , après je lui faisais tirer la colombe sur un patin à
roulette , après je lui faisais tenir une boite il y a une colombe qui est
planquer là dedans , elle est tenais la colombe et moi je tirais avec un fusil
et un ballon ça crève et la colombe elle descend .Elle venait faire son numéro
elle se voyait comme une artiste c’était tout un truc et à la pensée que ces
parents viennent pas c’était un drame . A un moment donner elle aurait pu
partir avec moi elle partait avec moi . Moi j’ai vu des enfants me suivre ,
j’ai vu même quelque chose qui était assez da ngereux
c’est fou ce que le clown est aimé des enfants , il y avait un père qui venait
, il était surement séparer de sa femme et lui il avait garder sa petite fille
. Et cette petite c’est vrai elle m’aimait drolement et à un moment donné j’ai
vu que lui le père il était jaloux parce que quand la petite était avec moi ,
d’abord je veux faire un bibi au clown et donne moi tout ça , j’étais un enfant
avec elle elle était heureuse avec moi parce que le clown c’est celui qui fait
toutes les conneries que les parents interdisent et le père il était jaloux , il me haissait
parce qu’il voyait que tout l’amour de sa petite fille il existait plus , elle
reportait tout pour moi .A un moment donné j’arretais pour éviter la dualité .
Son orgueil de meg , mais j’ai appris plein de truc l’homme il est con il veut
etre aimer, un homme quand il a une femme si la femme déplace son amour il se
sent frustré, il vivait que par l’amour de cette femme donc il avait pas
d’amour . SI il avait l’amour même si elle s’en allait , il était toujours avec
l’amour , c’est le je veux etre aimer , c’est la frustation .
Il y a des femmes qui travailent dans la rue mais sur tout
en couple ; disons il faut l’avouer quand même le métier d’artiste c’est un
métier difficile , si on veut progresser ça requiert l’homme total . Il faut
créer le matériel , le matériel il faut le faire soi même . Donc il y a une
créativité de partout quoi.
ITW de CLO D’AIROLL
C’est à dire moi voyez vous
mon éducation a été le théatre , la scène , la télévision ........Et puis un
jour je me suis rendu compte qu’il y avait une désaffection du public et que
dans le fond on faisait fausse voie et qu’il fallait retourner au public . Ce
n’est pas le public qui viendra à nous , j’avais fonder beaucoup d’espoir sur
la télévision parce que je peux dire que je suis pas le premier mais l’un des
premiers à avoir fait la télévision puisque ma première émission il y avait
14000 récepteurs en France , il y avait que Paris qui recevait la télévision ,
et là il y avait de gros espoirs parce que évidemment on était des visuels , on
arrivait , on sortait de cette radio , là on allait voir malheureusement
évidemment on avait rien à vendre , ce qui fait que les firmes phonographiques
tout de suite on dit attention ceux là on n’en a pas besoin ça ne rapportera
rien , restez dans votre coin et de plus en plus les gens se sont imaginés que
le spectacle c’était la télévision . Ce qui fait qu’on a commencer à
disparaitre . Ce qui fait que j’ai VOULU REDESCENDRE DANS LA RUE et évidemment
ça a été très mal vu au départ parce que évidemment c’était vu comme quelque
chose de péjoratif . En plus c’était le travail de saltimbanque , les voleurs
de poule enfin . C’était tout à fait déshonorant de descendre dans la rue et
pourtant ON EN SORT ET NOTRE METIER EN VIENT et il continue à y rester . Et
puis tout doucement ben les gens s’y sont fait et ils sont aperçu qu’il
existait encore quelque chose et on réapprit un peu le spectacle vivant parce
que malheureusement les gens ont perdu le spectacle vivant . Les gens
s’imaginent qu’en regardant la télévision ils ont du théatre , ils ont du
cinéma mais en réalité ils n’ont rien ils ont de la télévision , c’est là où
est le problème , la télévision ça ne sera jamais le théatre, pour aller au
théatre il faut s’habiller , il faut se donner l’effort de sortir , donc il y a
une démarche que là on ouvre et puis on écoute entre le téléphone et puis la
discussion qui n’existe plus puisque ceux sont maintenant des informations
toutes digérés , on vous donne des informations , on les digère pour vous , on
les analyse pour vous , vous n’avez pas le droit de réponse bon malheureusement
d’ailleurs . C’est à dire que vous n’avez même pas la faculté d’une veillée le
soir à des gens qui étaient illétrés et qui néanmoins avaient des échanges
d’idées qui n’existent plus . Après on a commencé à applaudir pour vous puisque
dans le fond , et puis maintenant on rit pour vous puisque maintenant on met en
superposition des rires qui d’ailleurs tombent toujours à faux à mon avis donc
vous n’avez plus rien à faire vous n’avez même plus à réfléchir ce qu’il fait
qu’on va tomber sur des gens qui dans le fond vont se ressembler , on va faire
des automates , j’ai peur de cette société .
- C’est pour ça qu’il faut
revenir à la rue .
- Déjà elle a été interdite ,
moi j’ai vu des spectacles gratuits qui étaient donné dans les rues et des
commerçants qui disent ne rester pas là parce que vous génez mon magasin, donc
quand on en arrive là évidemment ça devient triste .
- surtout que l’on fait des
zones piétonnes .
- Oui , les gens commencent à
admettre , à voir qu’il y a quand même quelque chose , pas seulement chez les
jeunes vous avez des gens de 40 ans qui disent j’aurais jamais penser que le
spectacle vivant c’était ça . Les gens s’imaginent que la fete vous payez ,
vous vous amusez , c’est totalement faux ça , une fete c’est une participation
, c’est ça le problème le spectateur il doit faire au moins 40 % et même 50% du
travail , s’y il ne fait pas cette démarche il peut pas s’amuser c’est pas vrai
, ou à ce moment là ce n’est plus qu’un spectacle de voyeur . Vous vous
intallez vous etes voyeur c’est tout mais c’est pas ça la fete , la fete c’est
la participation donc c’est ce que le SPECTACLE VIVANT PEUT APPORTER et ce qu’on commence à revoir heureusement un
petit peu .
Moi, j’ai commencé mon père
était bouquiniste , j’étais l’ainé de 7 enfants et moi j’ai entendu parler d’un
magicien , J’avais 4 ou 5 ans et bon ben ma vie était tracé quoi , ça il n’y
avait pas de problème , je pouvais pas vivre autrement et donc j’ai commencé à
faire mes premiers spectacles j’avais 6 ans , donc à 6 ans j’ai commencé devant
des amis ....... C’était pas terrible et
puis j’ai eu le gros problème de voir la scène c’est à dire on m’avait invité
j’étais en Belgique chez de la famille et on m’avait invité à voir un spectacle
de patronnage avec les enfants ......et je suis tombé sur un spectacle ,les
gosses chantaient et il y avait une pièce
« il pleut , il pleut bergère « les enfants chantaient et il
y en avait qui avait des couvertures sur le dos et ils faisaient les moutons ,
et ça j’ai trouver ça formidable c’était quelque chose de merveilleux , c’était
vraiment la vie qui s’ouvrait en ce monde et le lendemain j’était en train de
jouer et une de mes cousines me dit tu vois le garçon qui est là bas hier il a
fait un mouton et ce gosse m’est apparu d’une taille épouvantable , il avait
fait le mouton et je crois que de toute ma carrière je n’ai jamais vu une aussi
grande vedette , j’aurais été incapable bien évidemment de l’approcher, de
parler avec lui il avait fait le mouton . Et c’est donc là c’est tout , j’étais
bon qu’à ça diront nous , c’était ça le problème et donc à 20 ans j’étais donc
premier prix mondial de manipulation et après je me suis mis à travailler avec
mes pieds et donc je suis devenu champion du monde des antipodistes .
J’étais premier prix mondial
de manipulation , je pouvais pas aller plus haut puis bon j’avais un peu l’esprit de
compétition pas vis à vis des autres vis à vis de moi même j’ai toujours aimer
me battre un peu contre quelque chose ce qui stimule beaucoup et donc c’est
comme ça que c’est parti après je suis tombé malade j’ai été paralysé alors
c’est ce qui m’a fait justement faire les championnats du monde et tout ça pour
me permettre ......un certain orgueil .
On est tous des farfelus dans
la famille , j’ai un frère qui est écrivain , on est tous dans les arts. Puis
on avait vécu vous savez bon maintenant vous avez l’habitude mais je me rend
compte quelqu’un qui arrive dans notre métier et qui arrive devant ces gens complètement
désaxés , on se dit qu’est ce que c’est que cette bande de fous parce que on
est toujours en dehors de la plaque et ce qu’il faut regretter c’est que de
plus en plus on est endoctriner le métier bon je sais bien que c’est quelque
chose d’obligatoire mais bon la liberté ça se paye c’est vrai ça se payera
toujours .
- mais vous avez travaillé
dans la rue
- j’ai travaillé dans la rue
, j’ai fait la manche avec des acrobates heu dirons nous j’ai jamais gagné ma
vie , d’abord j’ai jamais su faire la manche , si ce que j’adore c’est faire
une postiche , ce que le métier a appelé le coup de casque , c’est à dire le
moment où il faut faire payer les gens et ça j’ai toujours adoré mon père était
conférencier mais en même temps il aimait bien faire la postiche . Et c’était
quelque chose de formidable et justement j’ai repris tous ces gens qui vivaient
justement de ce métier en vendant du vent mais en le vendant d’une façon
tellement belle qu’on est content de se faire avoir et puis l’on paye le
spectacle . Vous aviez dans les métiers de la rue vous aviez les Circasiens ,
vous avez eu dans ce métier un circasien dompteur de lion qui a fait sa
carrière 35 ans et il n’est jamais rentré dans la cage aux lions , jamais une
seule fois . C’est à dire il avait un espèce de petit cirque qu’il montait
comme ça et il se promenait à travers la France , et il avait d’ailleurs de
pauvres lions tous édentés mais ma fois qu’on piquait un petit peu pour faire
rugir et il commençait son spectacle les gens payaient bien sur et là au moment
d’entrer dans la cage il commencait son truc en disant mesdames , messieurs je
vais rentrer aujourd’hui dans la cage c’est peut etre certainement la dernière
fois de ma carrière , je vais rentrer dans la cage aujourd’hui les lions sont
furieux n’est-ce-pas ? et je vais devant vous me battre contre ces betes
déchainés .......... Puis alors il y avait les spectateurs qui commencait et il
y avait la femme qui arrivait , je t’en supplie ne rentre pas dans la cage , tu
vas pas faire ça et il y avait 12 gosses qui arrivaient qui pleuraient , Papa
je t’en prie ne fais pas ça , tu vas pas nous laisser papa , tu avais la femme
qui disait on va rembourser ce soir , alors il y avait les spectateurs qui
étaient debout qui disaient faut pas rentrer et le gars qui disait vous avez
payer il n’y a rien à faire , vous etes là pour avoir le spectacle , c’est mon
métier , j’ai pris des risques au départ et les gens et ça durait 20 minutes et
au bout de 20 mn il disait pour vous faire plaisir ce soir je ne rentrerais pas
dans la cage et le gars faisait un triomphe , les gens étaient debout à
applaudir et ils partaient tout heureux comme ci ils avaient vu quelque chose
de formidable et jamais une fois il est rentré dans la cage , jamais c’était
tous les soirs pareils et il changeait de ville mais je trouvais cela
sensationnel .
Mais c’est ça le métier mais
c’est tellement beau je trouve .
- il y en avait un comme ça à
Paris , un hercule
- Oh oui la grosse barre je
la soulève , encore une pièce à gauche , encore une pièce à droite la grosse
barre je la soulève , ce qu’il y avait c’est qu’au dernier moment il arrivait
la police , attention la police , alors on remballait tout et il y avait le
gamin qui prenait la grosse barre et puis qui la mettait sous son bras et qui
partait avec . Ca ça faisait parti du Folklore
- Et vous avez connu tous ces
gens à Paris
- Oui bien sur , tour de
force , les cracheurs de feu alors évidemment plus ils étaient mutilés plus ils
faisaient d’argent .
- J’habitais bd wagram ce qui
faisait très bien dans une carte de visite , hélas j’étais dans une chambre de
bonne au 7ème et il fallait monter le matériel tous les jours . Ca donne
confiance . Jusqu’au jour où j’ai dit les impréssarios tout ça maintenant j’en
ai assez , laissez votre adresse on vous écrira , maintenant quand ils auront
besoin de moi ils viendront me chercher . J’ai attendu 10 ans quand même mais
ils sont venus . Et c’est à ce moment là que j’ai commencé à dire vous savez
maintenant moi ce qui m’interresse c’est la rue . Ca évidemment ça a tout
changé mais maintenant c’est tombé dans le domaine commun, d ’ailleurs des
cracheurs de feu on en voyait plus , maintenant il y a des quantités de
cracheurs de feu , ils sont revenus ...
- pas tant que ça
- oui mais il n’y en avait
plus ça n’existait plus , ce qu’on voit plus par exemple ces des avaleurs de
sabre ....
- Oui il y a Mike il le fait
mais c’est vraiment exceptionnel ils sont 2,3 en France maintenant . Et c’est
devenu quelque chose d’exceptionnel .
Il y a des métiers comme ça
qui ont disparu . Et vous aviez des attractions foraines qui dans le fond
étaient les memes et les memes participants . Il y avait les sauvages qui
arrivaient d’Afrique , cannibale .......Le bonimenteur qui disait Attention
..... et ce que j’ai toujours trouvé sensationnel c’est le fait que vous aviez
des cages blindées mais le derrière c’était une bache .
C’était tout l’art , ce que
la rue ben évidemment ceux sont les jongleurs , les acrobates , les chanteurs
de rue , justement là je suis entrain de recréer les chanteurs de rue avec les
petits formats , ce qu’on appelait les petits formats c’étaient les partitions
. evidemment il n’y avait pas de musique , il y avait que les paroles qui étaient vendues et les gens chantaient dans
les rues . Ils vendaient leur chanson , c’est comme ça qu’on diffusait toutes
les chansons , vous aviez le petit format le texte et puis vous aviez le
chanteur qui avait un accordéonniste qui la plupart du temps était aveugle mais
pour plusieurs raisons . Déjà souvent les aveugles étaient accordéonnistes ou
accordeurs de piano et d’un autre coté c’est que l’aveugle ne payait pas le
train . Il avait le transport gratuit et il avait besoin d’un accompagnateur ,
ce qui fait que les chanteurs pouvaient se permettre de se déplacer en train
gratuitement . Et donc tous les succès qui sortaient et ben aussitot était
repris et chanté dans les rues .
J’ai donc refait faire des
petits formats et maintenant dans les fetes c’est donné et les gens sont quand
même assez surpris de retrouver cette ambiance parce que en réalité les gens ne
chantent plus maintenant , ils écoutent chanter voilà encore une façon d’avoir
perdu la participation . les gens maintenant ont besoin d’un animateur alors
qu’avant tout le monde étaient animateurs .
- qu’en vous étiez
antipodique vous vous etes produit
- en music hall , télé bon
j’ai fait toutes les télévisions du monde pratiquement et puis j’ai fait de la
rue avec à Paris en province , à l’étranger . Non j’avais pas de problèmes avec
les forces de l’ordre , quelquefois avec les commerçants , on gènait ce qui m’a
paru toujours idiot parce que ça ammassait du monde devant leur boutique . Une
fois on m’a dit mais vous vous rendez compte parce que j’organisais des fetes
médiévales avec beaucoup d’artistes , les commerçants me dire mais vous vous
rendez pas compte nous on est obligés d’embaucher 11 extras pour la soirée .
A Paris dans la rue j’ai pas
travaillé à Beaubourg parce que Beaubourg n’existait pas , j’ai travaillé sur
les Champs Elysées , le métro jamais bon etant donné que déja il faut un petit
peu de place . J’ai travaillé aussi parce que bon j’étais ami avec Michel Simon
et donc Michel Simon qui lui était de St Denis et qui voulait pas bouger de St
Denis venait et c’est souvent que Michel Simon est venu avec moi dans la rue et
remballait le matériel . Ce qui est quand même assez sympa pour une vedette .
C’est à dire qu’il a toujours essayé , il a commencé dans ce métier comme aide
magicien , il a fait tout un tas de métier , d’ailleurs il a même fait de la prison
parce que c’est le seul suisse qui est fait 2 ans de service militaire , parce
que le service militaire en suisse est de 15 jours et étant donné quand il est
arrivé il a descendu le drapeau et il a dit ben ça va me faire une belle
chemise parce que c’est de l’étoffe qui ne sert à rien . Et ça ça a été son
premier contact et ça n’a pas plus et il a toujours essayé , quand il tournait
, qu’il faisait un film il n’a jamais voulu tourné un film sans connaitre le
sujet . Il a tourné des films de bateleurs ......il a toujours travaillé et
quand il a tourné la TALANTE , il a rencontré un clochard qui est devenu ami
par la suite et qui justement vivait sur un péniche sur le bord de seine . Et
il me racontait toujours la leçon qu’il avait prise qui était formidable
d’ailleurs . Il était donc sur cette péniche , dessus il y avait des chiens ,
des chats et il avait des coqs et un jour Michel lui dit tu n’as pas de sous ,
tu élève tes animaux tout ça c’est bien mais il lui dit tu as des coqs ,
t’aurait des poules tu aurait des oeufs et ce gars qui n’avait pas un rond à
commencer à regarder Michel droit dans les yeux , mais je n’élève pas des
animaux pour les exploiter . Ca c’est des leçons .
MAIS C’EST DES LECONS QU’ON NE PEUT PRENDRE QUE DANS LA RUE . parce que il y a
une logique de la rue , il y a un humour de la rue . Il y a toute une
philosophie .Moi j’ai connu un acrobate qui avait un numéro sur fil
sensationnel et ce gars faisait des choses qui étaient formidables dans le
domaine du spectacle , faisait de la corde souple , il arrivait à faire des
lancers de poignards sur corde ........Et une fois je lui dit écoute c’est pas
difficile on va reprendre , j’ai des contrats pour toi chez Bouglione et tu vas
faire de très bons cachets parce que quand même dans la rue tu gagne rien et au
dernier moment il m’a dit non , non je suis pas fait pour ça , déjà il va
falloir que je m’habille , ensuite il va falloir que je me pli à certaines
disciplines donc ça peut pas marcher c’est pas possible .
_ OUI C’EST LA LIBERTE
- Voilà , malheureusement ça
disparait de plus en plus , une autorisation pour ceux-ci , une autorisation
pour cela ........Etc et donc ça devient vraiment difficile .
- Quelque chose qui va pas ,
on dit qu’on rentre dans une ère de la communication , alors qu’en faites on
enlève cette liberté de faire ce qu’on a envie .
- Voilà , qu’en vous voyez
les grandes surfaces et les fleuristes commencer à faire la guerre pour des
gens qui vendent du muguet le 1er mai, ça commence à devenir triste parce que
justement c’était ça la liberté , c’était de faire justement ce qu’on avait
envie de faire et au moment où on en avait envie . En dehors de cette rue la
plupart des bateleurs , des animareurs travaillaient dans les cinémas ,
faisaient l’attraction de cinéma . Ce qu’il y a c’est que ben tout doucement le
cinéma c’est aperçu que c’était pas tellement interressant . Tout doucement les
directeurs de cinéma on dit mais oui mais on ne vous paye plus , alors ils ont
arretés de payer . Alors la manche dans les cinémas c’était difficile , donc on
a dit ben on va vendre des photographies , on a commencé à vendre des
photographies et puis après le cinéma a dit je vais prendre 50% sur la vente
des photographies . Et après en 1936 il y a eu une loi qui a exonéré les
cinémas des sommes versés aux artistes pendant les attractions , donc le cinéma
ça ne lui coutait plus rien de prendre un artiste mais voilà ça génait les
grands publicitaires. Ce qui fait que la publicité qui passait sur grand écran
pendant l’entracte rapportait plus que l’attraction . Sauf les cinémas de
banlieux qui voulait garder la clientèle en disant les clients ne partiront pas
à Paris . Avant il y avait des grands écarts entre les sorties de films . Et il
s’est passé la chose suivante , on a dit écoutez c’est vrai que ça nous coute
rien mais vous nous interressez plus .
- Les origines des
saltimbanques .
- Il n’y a pas d’époque où ça
n’a pas existé , évidemment les premiers ont été les jongleurs . Les jongleurs
sont apparu pratiquement à la préhistoire , puis après ça a été le feu . La
plus grande découverte de l’homme c’est le feu . Le pétrole existait depuis
déjà longtemps on s’en servait comme de
baume , c’était quand même l’eau qui brulait , on crachait le feu mais on le mangeait
aussi , ça se fait encore , vous aviez le charbon , on prenait des boulets de
charbon et donc à la main comme ça et puis on le mettait dans la bouche , les
boulets enflammés , le bois enflammés .......etc et puis alors les torches
qu’on passait sous les bras .......C’était sans risque enfin je m’entends il
n’y a pas de risque 0 , mais c’était simplement on se trempait les bras , les
mains dans une solution d’alin qui protégeait et qui faisait une pellicule qui
retirait ....... Après il y avait les numéros de force mais le feu c’est la plus
grande conquete de l’homme . C’est ce qui lui a permis sa survie , le feu
c’était quelque chose qu’on respectait , que l’on craignait et donc domestiquer
le feu c’était domestiquer le monde . et donc les jongleurs que l’on appelait
les bilbo ou bilvoreteurs exactement le terme employé . Et puis après le
jongleur comprenait tout ce qui existait dans le domaine des saltimbanques ,
tout ce qui était visuels .
Après apparut les magiciens ,
ça date de la haute Egypte , d’une façon comme d’une autre toutes les religions
se sont servis de la magie pour faire parler les statues , la ventriloquie ,
pour faire des apparitions , ça ça a toujours été de tous les temps sans
s’appeler la magie . Après il y a eu la magie et la sorcellerie ce qui fait
qu’on a commencer à bruler les gens en place publique ...........Il y a eu tout
une période où ça s’est temporiser sauf pour les alchimistes évidemment parce
qu’il devait faire la permutayion des métaux en or avec la pierre philosophale
donc ça c’était autre chose . Tous les rois , tous les puissants attendaient
toujours que les alchimistes leur ramène de l’or , donc ils étaient protégés et
ils arrivaient à éviter le bucher . Il y avait tout ce rejet par l’église de
tout ce qui était saltimbanques , déjà parce ce que c’était des gens qui
émettaient des idées qui étaient pas toujours bien pensantes parce que ils
étaient en contact avec la réalité et qu’en plus c’était des gens qui
naviguaient , qui voyageaient .
L’église s’en est servi ,
bien sur elle l’a utilisé tout en n’en faisant une sous catégorie pratiquement
déjà au départ c’est un métier qui était excommuniable , on a enterré Molière
la nuit aux flambeaux en cachette , il n’avait pas le droit de passer à
l’église , c’était un saltimbanque ; puis donc après il y avait ces gens qui se
promenaient qui volaient les poules et les enfants , je ne dis pas que ça n’a
pas exister , mais il y avait cette légende qui existe toujours chez les
manouches et chez les circassiens .
Les gitans étaient des gens
du voyage qui n’avaient pas un domicile fixe dirons nous mais avait quand même
un domicile avec leur cariole , eux étaient encore des gens du voyage que les
autres c’etait sont qu’on appelle des trimards eux s’en allaient à pieds ou
alors vraiment exceptionnellement vous aviez des compagnies théatrales qui
elles jouaient les banquistes donc c’était tout à fait différent . D’ailleurs
vous avez quand même dans le domaine historique , dans le domaine de la fete
...... Il y a quand même eu des films qui étaient très bon qui ont été fait en
suivant le maximum l’authenticité . Dans
les films d’avant guerre la coupure était déjà moins loin , parce que il s’est
fait une coupure après la guerre où vraiment c’est devenu un déshonneur que d’etre dans la rue , la
police faisait une chasse pas possible , d’ailleurs je me souviens d’amis
écossais qui venaient en France travailler et qui s’arrete dans un coin et qui
commence à faire une aubade comme ça avec les binious et nous arrétez les gars
, on se fait arréter par la police , comment ça ben il faut une autorisation ,
alors ils étaient scandalisé mais la France c’est le pays de la liberté , nous
on est en Angleterre et c’est une royauté et on peut faire de la musique , on
peut faire ce qu’on veut , quand on veut n’importe où , la seule chose qu’on n’a
pas le droit c’est dire du mal de la reine .
Oui maintenant c’est au
niveau de l’europe , dirons nous suivant le développement du pays . Si vous
prenez par exemple la méditerranée les gens sont plus ouverts , déjà il y le
soleil ......c’est déjà plus normal de voir des gens ; maintenant les gens
commencent à s’y faire quand même , alors en plus des gens qui font la manche ,
qui vivent sur la charité publique
- alors que ce n’est pas une
charité
- Il paye un spectacle mais
ça les gens ont toujours eu du mal à le comprendre . D’ailleurs vous voyez si
vous vous mettez un peu loin d’un cercle de bateleurs , vous voyez exactement
le moment où il va passer pour la quete parce que vous voyez les gens commencer
à fuir . Alors il n’y a que ceux qui sont aux premiers rangs qui ont le plus de
mal à reculer , ceux là ils sont coincés pratiquement . Où alors tout ceux qui
font semblant d’etre là et de ne pas regarder . IL y a tout une philosophie ,
il y a tout à voir dans ce domaine . Parce que dans le fond le spectacle la rue
tout ça c’est pas l’artiste , l’artiste il contribue mais c’est le tour qu’il
faut voir . C’est voir ces gens qui arrivent à tenir ce public et puis voir la
tete des gens . Moi je sais quand j’ai des vidéos de mes spectacles tout ça moi
ce que j’aime c’est de voir la tete du public . Moi déjà je sais ce que je fais
mais la tete du public , il faut lire l’étonnement , il faut lire la joie ,
l’emerveillement d’ailleurs l’émerveillement se perd de plus en plus .
Einstein disait que l’humain
qui n’a plus la faculté de s’émerveiller est déjà mort . Et c’est vrai .
Le nom banquiste arrive après
saltimbanque , banquiste l’origine est le suivant , il vient de banque , c’est
à dire que le banquiste était celui qui entrait à la bourse quand la bourse
fermait , et donc il y avait les banquistes qui arrivaient sur ces tables qui
sautaient sur les tables et qui commençaient à danser , à jongler .........et
donc qui ramassaient la pièce suivant ce que les banquiers avaient fait comme
opération .Et donc de ce mot banque et banc , sont devenues les banquistes .
le bateleur arrive au moyen
age , il prend le nom de bateleur , de bonimenteur , boniment et menteur .
Après vient le posticheur qui arrive au siècle dernier , il est vendeur de vent
qui est un métier qui fait parti de notre métier , il fait partie de l’illusion
, vendeur de montre à la sauvette qui existait avant guerre avec une valise et qui s’installaient avec
non pas avec une carente parce que les forains appelle ça une carente mais avec
un pliant , posaient le pliant ouvraient la valise , on vendait des montres
suisses 18 rubis .......A l’heure actuelle ça couterait 5 fr à peu près une
montre formidable . Et alors on prenait la montre et comme la montre était vide
il n’y avait rien il n’y avait qu’un cadran , fallait donc faire écouter le
mouvement au client et il y avait une technique qui était la suivante , c’est à
dire que il faisait écouter comme ça voyez vous avec l’ongle et quand il y
avait une dizaine de montres de vendu , il y avait toujours le compère
qui était là qui lui demandait déjà une
dizaine de montres et qu’on lui refusait bien sur parce que une par personne ,
ceux qui fait qu’il y avait des gens qui passaient 2 fois , ça c’était la
grosse technique et donc à ce moment là voilà les flics , on fermait la valise
, le pliant , on disparraissait dans la foule et puis le client était là il
essayait de remonter sa montre .
C’est à dire le bateleur
c’était l’illusion , tout ce qui faisait vivre une rue quoi . Les gens savaient
très bien quand ils s’arretaient que si les autres jonglaient s’était pour
gagner de l’argent donc pour avoir des pièces , et si c’était des vendeurs
automatiquement c’était une autre technique si c’était des vendeurs ils
savaient bien qu’ils allaient se faire avoir , à moins d’etre vraiment trop
naif .
Les cracheurs de feu
existaient depuis l’antiquité , depuis que les gens ont connus le feu . C’était
un médicament l’essence , le pétrole , il servait pour les shampoings , on se
lavait la tete avec du son . A l’époque on se lavait pas c’était déconseillé
par le corps médical et par l’église , on ne pouvait pas prendre un bain avant
l’age de 7 ans parce que ça ramollissait les os . On disait sale comme un
français , le moyen age le français était propre et quand est arrivé la
renaissance et qu’on a inventé l’eau de
cologne , là on s’est plus lavé , on a mis de l’autre cologne , déjà vous
n’aviez pas le droit de regarder votre corps , c’était punissable par l’église
. Le corps médical interdisait aussi les lunettes parce que ça rendait fou
puisque les Perrier avait inventer les lunettes qui étaient quand même quelque
chose d’important au 17 ème siècle et là l’église banissait les lunettes de
même que par exemple la fourchette , qui vous donnait l’excommunication . La
fourchette avait 2 dents c’est une invention vénitienne la fourchette et chez
nous on l’a utilisé au moins 200 ans après parce que la fourchette représentait
la fourche du diable .
Les vendeurs ambulants
c’était pas des artistes mais c’était la vie de la rue puisque dans le fond la
rue c’était là où on vivait parce que les appartements étaient mal chauffés ou
trop chaud suivant les saisons et c’était étroit ......Donc on vivait dans la
rue et donc les saltimbanques , les artistes , les charlatans de tout poil étaient
dans la rue .
Il ne faut pas oublier que
vous ne trouverez que des jongleurs , tout le monde s’appelait jongleurs .
C’est là le problème , les magiciens arrivaient à se démarquer parce que on les
appelaient des faiseurs de tours , donc jongleurs faiseurs de tours et encore
que faiseurs de tour arrivent très tard , ils étaient considérés déjà au départ
comme des jongleurs . Le jonglage comprenait tout du fait qu’on était dans la
rue on était jongleur .
L’imagerie populaire n’a pas
toujours tenu , (pour ça qu’on voit pas forcément des cracheurs de feu ) , vous
savez l’histoire non seulement elle est faite par les vainqueurs mais suivant
l’interet qui peut se porter . Je vois par exemple dans nos expositions
......Nous on a pris tout ce qui était petites histoires , ce qui ne s’apprend
pas à l’école . Et les gens sont toujours surpris par exemple vous avez le
fabriquant , marchand de hochet , un hochet c’est le truc le plus idiot qui
existe , depuis des générations on donne des hochets aux enfants et il faut pas
oublier que ce n’est pas un jouet . Le hochet à 13 pierres qui représente les
13 péchés capitaux et l’enfant agite le hochet pour éloigner les péchés . De
même quand vous voyiez des enfants que l’ont enmaillotaient et qui étaient très
serré comme des momies c’était pour le froid c’est vrai mais c’était la seconde
raison , la première raison c’etait pour éviter qu’il se fasse manger par les
rats . Tout ce qu’on fait à l’heure actuelle est régit soit par l’église , soit
par les rats .
Pourquoi nous français nous
mangeons des escargots et des cuisses de grenouille parce que nous sommes de
l’église romaine . (les anglais anglicanes , les allemands protestants ) et que
le pape avait décidé tous les étangs appartennaient aux moines à l’époque ,
donc il fallait qu’ils vendent leur poissons , et pour vendre leur poisson il
fallait trouver quelque chose donc on a trouvé le vendredi saint puis après on
a trouvé le vendredi maigre , tous les vendredis il fallait acheter du poisson
et comme il y avait des gens qui ne pouvait pas acheter du poisson , parce que
ils étaient trop pauvres , on a donc décider que les grenouilles et les
escargots étaient du poisson .
Puis vous aviez tous ces
artistes qui étaient par exemple les acheteurs de cheveux , parce que on
consommait beaucoup de cheveux pour les perruques , l’acheteur de cheveu
arrivait et payait en mouchoir de cholet
( un ou deux mouchoir ) parce que c’est de là que vient l’expression
« il ne vous reste plus que les yeux pour pleurer « parce que vous
aviez l ‘ acheteur qui arrivait ,qui faisait asseoir et qui estimait le cheveu
et en estimant le cheveu il coupait sans vous demander l’avis , donc la fille
pleurait donc on payait en mouchoir .
Le mouchoir c’était quelque
chose de luxueux .
- et les expressions qui
viennent des saltimbanques
- Oui bien sur , déjà il
faisait un peu le langage au départ , c’est eux qui permettait d’assimiler
d’une région à l’autre . Paris au 18ème siècle était une ville cosmopolite où
les gens se comprenaient pas , les quarteirs étaient bien déterminer , le
quartier des maçons bretons , les porteurs d’eau et les ramoneurs auvergnat .
Les saltimbanques étaient
obliger d’apprendre plusieurs langues , chez les circasiens encore actuellement
dans les gens de ma génération vous trouvez des gens totalement illétrer et qui
parlent couramment 6, 7 langues . Le saltimbanque allait de région en région et
il était bien obliger de se faire comprendre , c’est lui qui apportait
l’information .
Si vous prenez par exemple la
révolte des caduts à LYON qui a été
quand même quelque chose de très important et ben elle a été faite par les
saltimbanques , elle a été faite par Guignol . Guignol pouvait se permettre de
dire ce que tout le monde pensait mais ne pouvait dire sans etre arreté . Et
c’est ce qui a monté cette révolte parce que il y avait une communication qui
était faite .
Si il n’y avait pas eu les saltimbanques et les
colporteurs il est bien certain que la révolution française se serait passer à
Paris mais se serait pas passer en France .
Les chanteurs aussi
colportaient des idées. Plus que le livre parce que en France vous aviez
beaucoup de livres de contrebande , le livre de contrebande était à peu près le
seul qui passait facilement parce que aux frontières on avait pas le droit de
fouiller les carrosses et comme c ’etait une certaine classe bourgeoise
qui exploitait le livre , donc le livre arrivait parce que il était imprimer en
Suisse ou en Hollande , un livre arrivait par l’intermédiaire des carrosses
mais était vendu très cher donc pas à la portée de l’ouvrier . Donc c’est un
métier , le chanteur qui a eu une très grande importance dans l’évolution de
nos pays mais qui n’a jamais été reconnu .
- ça fait parti de la vie
de ce métier de ne pas etre reconnu .
- ça dépend où , vous avez des pays où le saltimbanque a une
importance primordial tel que par exemple le Japon , c’est inscrit dans sa
mentalité , l’artiste, le jongleur, le saltaimbanque c’est plus important qu’un
banquier que chez nous nous sommes des parasites. On n’est pas des productifs donc
on ne sert à rien .
La chine , tout vient de chez
eux , mais avec une culture diriger .
Je travaille mais je ne me
prostitue pas .
Le Maroc c’était des sauteurs
mais c’est quelque chose qui disparait complètement .
De tout temps l’être humain a
voulu s’élever et a toujours voulu épater ces contemporains et a toujours voulu
faire mieux et puis l’homme a toujours eu
besoin de rêve . Alors les rêves ont été donner sous forme de jeux sous forme
de ceci , sous forme de cela , ce qui est un reve qui va pas très loin parce
que il est déjà établi , il a déjà ses règles . Le reve c’est pas quelque chose
d’établi .
Laissons aux artistes la liberté de penser . De plus en plus difficile parce
que on a tout établi , il y a tellement d’interdit , puis comme tout est
rapporter à l’argent . C’est un métier voyez vous tant que vous n’avez pas eu
les financiers qui sont entrer dans ce métier , ça allait tout seul et du jour
où vous avez eu les firmes pornographiques qui se sont montés , que ce sont des
financiers qui ont commencer à prendre cela en main , on a fait de la vente .
Les automates ça date du
Moyen Age .Et puis après il y a eu Toute la période du 17ème siècle là où les
automates ont commencé vraiment à exister et là on a commencer à voir vraiment
l’automate se développer . Des hommes automates . L’automate il existe depuis
Jacquart . Sans Jacquart sans le métier
à tisser il n’y avait pas l’orgue de barbarie , puisquu’il avait inventer les
cartes perforées . On invente jamais rien , sans les connaissances de nos
ancetres on serait encore entrain de frotter des sylex . Maitenant on cherche à
faire de l’argent tout ça pour etre le plus riche du cimetière .
Dans l’école du cirque j’ai
eu des élèves puis j’ai fait des conférences en faculté .........On a monté une
exposition vivante , les gens arrivent déjà dans une salle de spectacle et se
retrouve au 18ème siècle avec les théatres d’ombre qui la journée servait de
théatre de marionnettes .... Le but culturel qu’il pouvait y avoir et en même
temps les sièges de silhouette , ce qui surprend d’ailleurs pas mal . Le siège
de silhouette c’était une plaque de verre maintenu de façon verticale et un
siège et là on faisait asseoir la personne et on tendait une feuille de papier
sur la plaque de verre , on avait si c’était le soir une bougie derrière , si
c’était la journée ben ma fois c’était le soleil qui faisait la lumière et dans
vos livres d’histoire quand vous voyez la silhouette de Louis 14 .....ça a été
fait comme ça , c’est simplement un fusain que l’on passait tout autour et
qu’on reprenait la silhouette comme ça . On présente aussi la lanterne magique
et on termine avec les cris de la rue parce ce que chaque métier avait ces cris
.(580 professions ) La rocratière vendait le reste des repas des riches dans la
rue ......Le marchand de bout de chandelle puisque on a toujours parler
d’économie de bout de chandelle , une économie de bout de chandelle , dans un
chateau on ne rallumait jamais une bougie , elle était donner aux domestiques ,
alors on essayait toujours de l’éteindre le plus vite possible , la différence
de prix était nul , ça représentait rien à la vente c’est pour ça qu’on disait
économie de bout de chandelle .
Les arracheurs de dent
avaient leur parade , l’assistant qui jouait du tambour , le bonimenteur et le
compère , il s’appelait le barbier . Il fallait payer d’avance bien entendu .
Et ça c’est tout le travail de la rue .
- et vous vous faites de la
magie
- ben c’est à dire que moi je
présente la magie sous différentes formes , je me suis spécialiser , j’ai
repris la magie égyptienne , la magie ancienne , la magie médiévale jusqu’à
reprendre la période qui a amener Robert Houdin , qui a sorti la magie de la
rue pour en faire un art de salon .
Moi je fais de la
manipulation , au cours de ma carrière j’ai 40, 45 heures de magie différentes
. J’ai fait la grande illusion . Le travail des mains et puis le travail des
pieds aussi . Dernier record du monde j’ai rasé 3 personnes en 4mn 1s avec un
rasoir couteau évidemment , avec les pieds . Après j’ai appris à écrire avec
les pieds , à dessiner , à faire de la presditigitation , manipulation de
cartes avec les pieds .
J’ai fait 11 tours du monde
avec .
J’ai un petit fils qui fait
de la magie mais vous savez ça se force pas ce genre de chose . Ca c’est la vie
de chacun . J’ai une fille qui fait de l’animation et des enregistrements elle
a une voix formidable .
Je crois que le métier de
saltimbanque reviendra , un métier venant de si loin peut pas mourrir comme ça
. J’en suis convaincu , avec beaucoup de difficultés , le métier a toujours été
difficile , il a toujours fallu faire son trou surtout quand on tombe à pied
joint là dedans un peu comme une marmite magique , c’est la marmite magique
mais attention au départ c’est chaud , vous vous brulez les ailes là dedans .
- mais c’est la passion qui
l’emporte
- bien sur ,
- vous etes un maitre pour
certain
- moi je suis un étudiant ,
j’ai de l’expérience c’est tout mais ça c’est
quelque chose qui n’est pas communicable . L’expérience des uns peut pas
servir aux autres malheureusement , l’époque n’est pas la même , ensuite sa
sensibilité n’est pas la mienne , ensuite la vie ne va pas le diriger comme
elle m’a dirigé . On peut aiguiller , aider à condition bien évidemment de
vouloir apprendre . Moi je connais des tas de gens qui viennent me voir en
disant qu’est ce qu’on va gagner , tu vas peut etre gagner la considération de
ta concierge mais à part ça et encore c’est pas sur parce que au départ on va
déjà te prendre pour un farfelu . C’est un métier dans lequel il faut déjà se
faire suer pendant 10 ans , ça ça à toujours été de toute époque . Il faut
galérer , à moins d’etre le fils d’un producteur , le talent peut se mettre de
coté de cette façon là .
- Les saltimbanques ne sont
pas issu de classe sociale élevé
- Non , parce que ça serait
un déshonneur
- C’est peut etre la force du
métier
- Peut etre bien , si vous
avez tout sous la main moi j’ai des amis qui ont toujours rever de ce métier et
qui sont nés riches ben ils n’ont jamais rien fait de leur vie pourquoi parce
que ils n’avaient pas à lutter et sans lutter on tombe dans la facilité . J’ai
connu un magicien en Belgique moi quand on m’a dit qu’avec de l’eau il faisait
toutes les boissons , j’ai plus eu de cesse sans le voir , et je l’ai revu 30
ans après , il faut jamais revoir les choses 30 ans après , c’est quelque chose
d’épouvantable et je me suis aperçu que c’était un pauvre type quoi , qui était
pas bon à grand chose mais il avait jamais eu de concurrence , seul dans son
coin , il avait jamais évolué , il n’avait rien qui l’obligeait à évoluer
puisqu’il vivait comme ça .
- Moi j’ai eu la chance
d’avoir des parents extrèmement libéraux , c’est énorme aussi ça , on faisait
ce qu’on voulait . Bouquiniste et ma mère était artiste , dans la famille il
n’y a que des peintres , des poètes , mon frère lui qui est à l’académie
française ............ On a tous mal tourné il n’y a pas de problème . J’ai un
ami qui a un talent fou , il est devenu
inspecteur d’académie et chaque fois que je le présente je dis c’est un copain
qui a mal tourner . A un moment donné il s’est quand même prostitué que l’on
veuille ou non . Non moi je me suis pas prostitué ce n’est pas ce qui m’a
facilité la vie .
OUI J’y crois et j’y crois
encore . La preuve que j’aurais l’avantage de mourrir attardé . J’ai l’avantage
d’avoir fait ce que j’avais envie de faire et le grand malheur c’est que chaque
fois que je rencontre du monde , il me dit vous avez fait une belle carrière ,
oui , qu’est ce que vous avez gagné comme argent , je dis non j’ai fait
beaucoup d’amis et j’ai beaucoup de souvenirs , l’argent non ça non . Parce que
réussir sa vie c’est avoir gagner beaucoup d’argent , mais pour moi c’est pas
ça du tout , réussir sa vie c’est tout à fait différent .
Sur une montagne d’or ça ne vous empeche pas de mourrir de faim et de soif si
il n’y a pas d’eau , ni de nourriture .
- La confrérie c’est quoi
- Voyez avant dans un même
spectacle vous aviez 5, 6 ,7 artistes . Maintenant on se retrouve chacun avec
un one man show , automatiquement alors ce qui fait qu’on se voit plus . Alors
il fallait qu’on retrouve une confrérie , qu’on se retrouve de façon à pouvoir
continuer à se connaitre . Il y en a à Paris , il y en a un petit peu partout .
Alors on a une réunion mensuelle sauf juillet , aout et décembre et puis on a
un chapitre annuelle où là on se retrouve en grande quantité où on fait des
spectacles qui dépassent un peu tout parce que on retrouve les hommes
orchestres , on retrouve les cracheurs de feu , aussi bien ça que la cantatrice
du paladium de las vegas ou la cantatrice de l’opéra de pékin ou les platters
........On a tous les corps de métiers , aussi bien maquilleur de théatre que
le metteur en scène , on a tout englobé , tout ce qui est spectacle .
On a monté un espèce de
système social , on a une cotisation de 150 fr par an mais en réalité c’est une
cotisation de 100fr et il y a 50 fr qui sont mis aux oeuvres sociales , ce qui
permet d’aider des personnes en difficulté dans le métier .
Moi je ne doute pas que le
métier survivra , il n’y a aucun problème mais peut etre pas sous les mêmes
formes.
A part la maladie on a du mal
à vieillir , c’est ça le problème , c’est bien mieux comme ça , tant que
l’enthousiasme est là il n’y a pas de problème .
Nous sommes des
exibitionnistes , ça c’est difficile de s’en séparer , la plupart du temps
beaucoup de timide . Je pense que c’est une fonction du métier la timidité , il
y a que comme ça qu’on peut s’exprimer , on est obligé toujours de se surpasser
.
- c’est toujours un départ
d’angoisse alors à chaque fois
- c’est normal , où alors il
faut faire comme certain vous montez quelque chose puis vous prenez plus de
risque mais si vous voulez faire un métier , il faut vous remettre en question
tous les matins puis jamais etre satisfait de ce que vous avez fait , le jour
où vous etes satisfait vous etes foutu . Vous etes content quand vous avez fait
quelque chose et deux jours après vous vous dites j’aurai quand même pu faire
mieux .
Et moi j’ai l’avantage voyez vous d’arriver en bout de course avec très peu de
vidéos , avec très peu de tout ça . Je trouve ça sensationnel parce que il arrivera un moment donné où on sera obligé de
renier son passé .
Une grande sensibilité , oui
c’est toujours des écorchés vifs , c’est certain que dès que vous etes dans ces
professions vous ressentez les ultra sons . Vous etes beaucoup plus fragile
normal , heureusement qu’il y a les échecs , sans les échecs on n’eévoluerai
pas et on arriverai à ce que certains arrivent , ça m’apparait difficile
d’avoir une grosse tete , ça remet les choses en place , le saltimbanque ne
peut pas avoir une grosse tete , c’est pas possible etant donner que la vie
vous remet tout de suite en place , heureusement sans cela ça ne serai pas
vivable , on s’imaginerai qu’on est bon .
J’ai fait du cinéma , j’ai
fait pas mal de chose mais il y a que dans mon art que je me suis éclaté pour
la bonne raison c’est qu’après c’est comme quelqu’un qui travaille en play back
, si vous recommencez 6 fois une scène , c’est pas comme ça que vous faites
quelque chose de bon , moi je le ressens comme ça , c’est le premier jet .
Dico Mots clefs, livre Gilbert
Histrion : Du latin. Mauvais acteurs ou charlatans.
Badaud : Regarder
bouche bée. Passant, promeneur.
Bateleur, euse : Ancien francais de Baastel. Personne qui fait des
tours d´adresse sur les places publics.
Saltimbanque : De l´Italien, ( Salto in
banco), sauter sur un banc, 1560
Amphore : Vase antique, à deux anses symétriques, col retréci.
Rupestre : Réalisé sur des rochers.
Agora : Place publics, centre de la vie politique, religieuse et économique de
la cité. Espace piétonnier
dans une ville nouvelle.
Caste : Catégorie de personnes qui se
distingue des autres par ses privilèges et son esprit d´ exclusive.
Castrat : Chanteur que l´on castrait des l´enfance pour qu´il
conserve une voix de soprano.
Hister : Bouffon.
Listes du métier de Saltimbanque.
Mime, acrobate, cracheur de feu, funambule, briseur de
chaines, évasioniste, musicien, chanteur, antipodiste, avaleur en tout genre,
magicien, rouliste, automate, marionnettiste, bonimenteur, vendeur a la
sauvette, ventriloque, hercule,caricaturiste, silhouetiste, etc…
Les P.V.
[1] Le "Festival des spectacles de rue", les "Fêtes de Gand", la "Fête des Artistes et des Artisans" à Chassepierre,...
[2] Voir définition p. 39.
[3] GARNIER (J.), Les Forains d'Hier et d'Aujourd'hui, Paris, 1968, P.386.
[4] Les Charlatans Célèbres, Tome 1, p. 5.
[5] Le Monde, 28 juillet 1979.
[6] HOTIER (H.), Le vocabulaire du cirque et du Music-Hall en France, Paris, 1973, p. 75.
[7] P. 13-14 Académiciens et saltimbanques, Christian GURY, Paris, 1997
[8] HANNAH-WINTER (M.), Le spectacle forain, in Histoire des spectacles, Paris, 1965, p. 1458.
[9] REMY (T.), Le Mime, in Histoire des spectacles, Paris, 1965, p. 1493.
[10] Ibid., p. 1493.
[11] Pour plus de précisions sur ce sujet, se référer à l'ouvrage d'André Boll : Théâtre, spectacles et fêtes populaires dans l'histoire, Bruxelles, 1945, p.9.
[12] Se référer à l'ouvrage de Jacques Heers : Fêtes des fous et Carnavals,...
[13] André Boll, Théâtre, spectacles et fêtes populaires dans l'histoire, Bruxelles, 1945, p.33-34.
[14] Ibid.
[15] JACQUIN (C.), Paris la Fête, Paris, 1977, P. 13.
[16] Ibid., p. 14.
[17] Les Charlatans Célèbres, Paris, 1819, Tome 1, p. 127.
[18] Ibid.,p. 14.
[19] HANNAH-WINTER, op. Cit., p. 1454.
[20] ADRIAN, Cirque Parade, Paris, 1974, P. 45.
[21] DENIS (D.), Découvrez le Cirque, Paris, 1978, P. 40.
[22] DORT (B.), Théâtre en jeu, Paris, 1979, p. 85.
[23] Jérôme Savary in Album du Grand Magic Circus, Paris, 1974, p. 27.
[24] Discours de réception à l'Académie française, 20 janvier 1983
[25] AUGUET R., Fêtes et spectacles populaires, Paris, 1974, p. 73
[26] Petit historique du cirque in L'Avant Courrier, n°3, janvier 1986,p. 3.
[27] Julian Beck cité par C. Degan, in Disparition de Julian Beck : la deuxième mort du Living, in Le Soir, 17 sept. 1985.
[28] Peter Schumann cité par Françoise
Kourilsky, in Bread and Puppet Theatre, 1971 p. 27.
[29] Propos recueillis par un artiste.
[30] Ferrand Serge, Le Busker, 1979 p. 250.
[31] Ibid., p.27.
[32] in Le Soir, janvier 1998, p.15.
[33] UBERSFELD (A.), L'école du spectateur, Lire le théâtre 2, Paris, 1981, p. 53.
[34] Organisateur du festival d'Aurillac.
[35] JACQUIN, (C.), Paris la fête, 1977, p. 130.
[36] JACQUIN, (C.), Op. Cit., p. 130.
[37] JACQUIN, (C.), op. cit., p. 102.
[38] VSD, 28 octobre 1977.
[39] Nouvel Observateur, 6 août 1979, Canard Enchaîné, 27 juillet 1979.
[40] A. Simon, Encyclopédia, in Théâtre occidental - La scène, p. 1076.
[41] B. Dort, Théâtre en jeu, Paris, 1979, p.85.
[42] Guide Michelin de Paris, 1997, p. 131
[43] Guide Bleu de Paris, 1997, p. 355.
[44] Guide de Paris en Jeans, 1997, p. 121.
[45] Les lieux du spectacle, in L'architecture d'aujourd'hui, n° 152, Paris, 1970, p. 26.
[46] BAREY (J-J), Outils de l'itinérance, in Lieux Publics, n°1, Marne-la-Vallée, 1984, p. 24.
[48] SAVARY (J.), La Fête cette hantise..., in Revue Autrement, Paris, n)7, nov. 1976, p.167.
[49] BUISSON, op.cit., p. 59.
[50] Ibid.
[51] BUSSY (de), C., Les Forains à travers les âges, Paris, 1930, p. 12.
[52] Loi du 10/12/1830
[53] BUISSON, op.cit., p. 26.
[54] Ibid.
[55] Ibid.